L’hiver 2020/2021 de Lara Gut-Behrami restera dans les annales. En remportant trois médailles aux Championnats du monde dans sa station fétiche de Cortina d’Ampezzo (dont deux en or), la skieuse de Comano a probablement vécu les plus belles émotions de sa carrière. Et sa saison est plus que réussie avec déjà un Globe de cristal dans sa besace, celui du super-G. Mais la Tessinoise de 29 ans ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et si le trophée du classement de la descente restera un doux rêve (elle comptait 97 points de retard sur Sofia Goggia avant l’annulation de ce mercredi), le classement général de la Coupe du monde reste indécis.
Petra Vlhova a récemment repris 96 points d’avance en tête mais Lara Gut-Behrami s’est offert le droit de rêver, en effectuant une remontée fantastique au cours des dernières semaines. Après la première descente de Crans-Montana, elle comptait en effet 338 points de retard sur la Slovaque. Ensuite, les courbes se sont inversées et la Tessinoise a même pris 187 points d’avance sur sa rivale dans le Val di Fassa. Depuis, Petra Vlhova s’est offert un léger répit avec ses victoires en géant à Jasna et lors du premier slalom d’Åre vendredi dernier. Tout reste possible, même si la native de Liptovský Mikuláš reste sur un succès à Lenzerheide en slalom en 2018.
Le Covid-19 comme premier obstacle
Quoiqu’il arrive sur la piste Silvano Beltrametti cette semaine, la saison de Lara Gut-Behrami restera certainement comme la plus improbable de sa carrière. Passablement touchée par la pandémie de Covid-19 – la Tessinoise vit en Italie, très impactée, et avait notamment dû se placer en quarantaine à la suite de plusieurs cas positifs dans le club du Genoa de son mari Valon Behrami -, elle avait abordé son hiver sur la pointe des pieds, faisant attention à ne pas trop se fixer d’ambitions. Mais une 8e place à Sölden l’avait mise sur les bons rails. Surtout que quelques semaines plus tard, elle remportait les qualifications du parallèle de Lech/Zürs et montait sur un premier podium de l’hiver.
La saison de Lara Gut-Behrami aurait peut-être pris encore un autre tournant si elle avait ensuite pu disputer les deux super-G de Saint-Moritz, sur une piste qu’elle apprécie. Deux courses qui lui auraient permis de déjà mettre la pression sur sa rivale. Sauf que les chutes de neige en ont décidé autrement. Et après une série de résultats positifs (elle n’est jamais sorti du top 11), la médaillée de bronze de la descente des Jeux olympiques de Sotchi en 2014 a décroché sa première victoire de l’hiver dans sa discipline de prédilection, le super-G de Sankt Anton.
Le retour en force en géant et les critiques à Crans-Montana
La fusée était alors lancée. A Kranjska Gora, sa 4e place en géant a certes été éclipsée par les podiums de Michelle Gisin, mais Lara Gut-Behrami a prouvé véritablement qu’elle était de retour au sommet, dans une discipline où elle avait tant galéré ces dernières années, enchaînant les dérapages pas forcément nécessaires. Derrière, la semaine de Crans-Montana aura été un véritable tournant. Arrivée en Valais avec des intentions difficiles à évaluer, elle avait qualifiée la piste de « désastre » après le premier entraînement. Un avis que ne partageait pas les autres skieuses, notamment après l’immense travail effectué par les organisateurs à la suite des chutes de neige survenues sur le Haut-Plateau.
De la critique à la douleur. Lors de la première descente disputée dans la station valaisanne, la Tessinoise souffrait le martyre, touchée au dos et au bassin. Sous anti-douleurs, elle est parvenue à prendre un honorable 16e rang, avant de s’écrouler à l’arrivée. Après un rapide aller-retour au Tessin pour se soigner, elle avait réussi l’exploit de prendre le 2e rang derrière Sofia Goggia le lendemain lors de la deuxième descente, avant de remporter le super-G dominical, toujours dans la douleur.
Des Championnats du monde de rêve
Depuis, Lara Gut-Behrami a enchaîné les prestations de haut vol. Après avoir retrouvé le podium en géant à Kronplatz, elle s’est est présentée aux Championnats du monde en pleine confiance, notamment car elle venait de remporter les deux super-G de Garmisch-Partenkirchen avant de se rendre dans les Dolomites. Et à Cortina d’Ampezzo, la bombe de Comano a encore fait parler d’elle. D’abord pas forcément en bien, dans un passage capté par les caméras italiennes où elle utilisait des mots crus pour parler d’un « président », probablement Marius Robyr. Puis en beaucoup mieux avec une victoire en super-G pour débuter ses Mondiaux. Mais la médaillée d’or avait rapidement calmé les ardeurs de ses fans, esquissant à peine à un demi-sourire et assurant que ce titre n’allait pas « changer sa vie ».
Après une faute en descente, Lara Gut-Behrami avait tout de même réussi à accrocher une médaille de bronze qui l’avait cette fois satisfaite. Et que dire de sa médaille d’or en géant! Rarement l’épouse de Valon Behrami n’avait autant explosé de joie à l’arrivée d’une course. “Une médaille en géant a toujours été un rêve”, avait-elle relevé, après avoir couru dans les bras de ses parents. Cette victoire lui avait permis de faire le plein de confiance, puisqu’elle avait ensuite enchaîné avec deux victoires et une deuxième place dans le Val di Fassa.
Lenzerheide comme ultime chance
Alors qu’elle assure n’avoir jamais pensé au gros Globe de cristal, LGB aborde les finales de Coupe du monde avec une réelle chance de l’emporter, même si l’annulation de la descente lui aura coûté cher. Elle a d’ailleurs profité de sa voix pour faire ses critiques à la FIS quant à un calendrier qu’elle ne trouve pas très équitable. A Lenzerheide, elle retrouve une station qui lui a souvent réussi par le passé. C’est d’ailleurs ici qu’elle s’était assurée de soulever son premier et unique gros Globe de cristal, en mars 2016.
Avant sa blessure, la Tessinoise avait enchaîné les brillantes performances dans la station grisonne. D’une 2e place en descente pour ses débuts en 2011, elle avait ensuite enchaîné les podiums (5 en 9 courses) jusqu’à sa grave blessure à un genou en 2017. Ses deux victoires (en descente et en super-G) lors des finales en 2014 restent notamment d’excellents souvenirs. Son retour en 2018 (12e en combiné et 20e en géant) ne s’était pas passé comme espéré, mais Lara Gut-Behrami courrait après ses meilleures sensations. Qu’elle a désormais retrouvées.
Laurent Morel, Lenzerheide