Cela fait désormais six ans. Six ans que Mélanie Meillard a été coupée dans son élan alors qu’elle atteignait à seulement 19 ans, déjà, le sommet du ski alpin mondial. Mais une grave blessure au genou gauche en Corée du Sud juste avant les Jeux olympiques de PyeongChang avait complètement arrêté sa progression. De nombreux soucis de santé plus tard, revoici la Valaisanne dans d’excellentes dispositions.

Après avoir subi tous les maux, la skieuse d’origine neuchâteloise a enfin pu vivre un hiver quasiment “normal”. Surtout, elle est toute proche de valider sa place dans le top 15 mondial en slalom, grâce notamment à ses bons top 10 à Levi (7e) et à Jasná (5e). Si son genou la dérange parfois encore quelque peu, comme ces dernières semaines puisqu’elle a dû adapter sa préparation, la sœur de Loïc engrange de la confiance, petit à petit. Elle s’est confiée avant de s’élancer à Åre.

Mélanie Meillard, vous avez préféré renoncer au géant d’Åre après avoir ressenti une gêne à votre genou à Soldeu il y a quelques semaine. Comment va-t-il?

Ça va bien. Mais je n’ai pas chaussé mes skis de géant depuis et je n’ai que quatre jours de ski dans les jambes, j’ai donc préféré renoncer. Je ne sais pas comment mon genou aurait réagi après le géant et en plus, je n’ai rien à gagner dans la discipline, il m’était impossible d’intégrer le top 25 et de me qualifier pour les finales. Par contre, en slalom, j’ai beaucoup à gagner. Je mets la priorité là-dessus pour mettre toutes les chances de mon côté.

Surtout qu’on est à Åre, sur l’une de vos pistes fétiches!

C’est une des pistes où je me sens bien, en effet! Je ne peux pas dire que c’est “ma” piste mais c’est l’une des où ça a souvent bien fonctionné, avec Levi. Mais ne vous inquiétez pas, je vais rester en Suisse et pas venir vivre en Scandinavie.

Si l’été passé, on vous avait montré où vous en êtes maintenant, y auriez-vous cru?

Je crois que oui. L’un de mes objectifs était de finir dans les 15 en slalom et je suis en bonne voie de le réussir. Je prends tout le temps les 30 dans la discipline, c’est mieux que ces cinq dernières années. Je ne suis pas encore régulière lors de toutes les courses mais je montre que je m’améliore légèrement à chaque fois. Je progresse et je suis plus régulière en général. En géant, c’est une autre histoire mais je ne m’attendais pas forcément à beaucoup plus. Je suis déjà satisfaite avec ce que j’ai fait.

Cela fait déjà six ans que vous n’aviez pas autant souri sur des pistes de Coupe du monde. Vous êtes fière d’avoir réussi à vous accrocher?

Oui, complètement! Ce n’était pas toujours facile. Il y a eu plus de choses compliquées que de bons moments. Je suis très contente de ce que je fais actuellement et je pense que ce n’est pas terminé.

Justement, dans quel état d’esprit êtes vous aujourd’hui, par rapport à 2018, avant votre blessure?

Je ne pourrais jamais être dans le même état qu’à ce moment-là car j’ai grandi dans ma tête (rires). J’étais jeune et un petit peu inconsciente. Je prenais les choses comme elles venaient, à vitesse grand V. Là, je me rends plus compte de la situation. Je vis les choses différemment. Je me vois encore performer tout devant, mais j’ai appris beaucoup de choses, à me gérer. Ce qui est sûr, c’est que l’insouciance de la jeunesse n’est plus là. Mais j’en connais beaucoup plus sur moi.

Vos rêves ont-ils changé?

Non. Comme tout skieur j’imagine, j’espère gagner des Championnats du monde, des Jeux olympiques, des Globes.

La blessure de Wendy Holdener en début de saison a quelque peu modifié votre statut au sein de l’équipe de Suisse. Avez-vous changé votre façon d’aborder les courses?

Ce n’était pas simple car Wendy nous a fait beaucoup de bien durant l’été et encore en début d’hiver. Quand elle s’est blessée, ça a été en quelque sorte en tournant, c’est vrai. Avec Camille (Rast), c’était à nous de montrer ce dont on était capables. Mais personnellement, je n’ai jamais senti de pression supplémentaire. Mon chemin était clair pour moi. Je n’avais besoin que de temps pour construire et arriver là où j’en suis maintenant. Après, c’est vrai que sur certains poins, on a été plus écoutées. Quand Wendy est là, on doit la suivre, et c’est normal car elle a eu des résultats. Cependant, l’avenir, c’est nous. Cette situation nous a permis de plus discuter, en terme de planification notamment. Sans résultat, je ne me sens pas légitime pour donner mon avis qu’il soit positif ou négatif, mais la bonne nouvelle, c’est que désormais, on a obtenu des résultats. Logiquement, on se permet de dire un petit peu plus ce qu’on pense. Par exemple, on préfère parfois s’entraîner en Valais, et pouvoir rentrer à la maison entre les entraînements. On ne peut qu’être mieux dans notre tête.

Ce que réussit votre frère Loïc en ce moment doit aussi vous faire très plaisir!

Oui, c’est magnifique! J’avais les larmes aux yeux lors des ses exploits à Aspen! Dans la famille, on est des personnes qui ne parlent pas beaucoup. Même entre nous, on ne se dit pas énormément ce qu’on ressent. Mais je sentais qu’il y avait des moments lors desquels c’était compliqué cet hiver. Alors ses podium en super-G à Garmisch-Partenkirchen et en slalom à Chamonix ont fait beaucoup de bien. On sait qu’il en a le potentiel mais il faut le montrer. Il a pu construire là-dessus et réussir trois course énormes de suite à Aspen, c’est juste génial. J’étais trop contente. Même avec un début de saison “moyen” pour lui et pour ses attentes, il se retrouve 3e dans les deux disciplines techniques et au classement général, c’est beau!

Laurent Morel, Åre