Il y a des cadeaux de Noël que l’on savoure bien davantage que d’autres. Celui d’un premier triomphe en Coupe du monde en fait partie. Voici une petite semaine, Sixtine Cousin s’est offert un magnifique présent en remportant sa première épreuve de Coupe du monde à Innichen. “Je suis contente et fière de ce que j’ai réalisé mais après, la vie, c’est toujours la même. Pour Noël, je dois faire le ménage”, se marre la Genevoise qui n’entend pas changer après cette victoire. Et c’est tant mieux.

Dans le Sud-Tyrol, la skieuse de 24 ans a parfaitement joué son coup tactiquement. Du quart à la finale, en passant par la demie, avant la finale, Sixtine Cousin a déjoué les pronostics, faisant parler sa science de la glisse et devançant ses adversaires dans la dernière ligne droite. Tour à tour, les médaillées olympiques Fanny Smith, Daniela Maier (GER) et Marielle Thompson (CAN) se sont cassé les spatules sur la Genevoise. Sacré tableau de chasse. En finale, c’est la championne du monde et olympique Sandra Näslund qui est partie à la faute, alors qu’elle avait course gagnée, pour laisser la victoire à Sixtine Cousin qui a pris le meilleur sur la Française Marielle Berger Sabbatel.

Un élitisme trop présent

Dans l’aire d’arrivée, elle a exulté, mais ce n’est pas son succès qui l’a rendue la plus euphorique. “En passant la ligne d’arrivée, j’ai vu que les filles étaient heureuses pour moi et c’est cela qui m’a le plus touchée.” De Daniela Maier à sa compatriote du bout du Lac Margaux Dumont, toutes se sont précipitées pour féliciter celle qui n’était que la dixième fille à inscrire son nom au palmarès d’une épreuve en Coupe du monde au cours les sept dernières années. C’est que Sixtine Cousin est unanimement appréciée sur le circuit. Une athlète aussi joviale que franche, qui n’a pas peur de jouer des coudes et de dire ce qu’elle pense.

Sixtine Cousin l’avoue sans détour: “Je ne suis pas fan du sport de haut niveau”. Elle rejette une certaine forme d’élitisme. “C’est ma manière de voir les choses, mais il y a des privilèges et nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne”, lance-t-elle en s’incluant également dans l’équation. “Je prends l’exemple du serviceman. Maintenant, je peux en profiter. Mais quand tu es jeune et que tu débarques, on te demande des résultats, mais sans te donner forcément les moyens d’y parvenir. Tu dois te débrouiller.”

Une médiatisation en question

Et encore. Sixtine Cousin n’a pas la renommée des meilleures athlètes de sa discipline. Ainsi, elle doit se montrer pugnace non seulement sur la piste mais également en-dehors. Elle doit notamment cravacher pour trouver des partenaires. D’ailleurs, la Genevoise n’a pas de sponsor casque alors qu’elle joue dans la cours des grands de son sport depuis maintenant six années. “J’ai parfois l’impression que ce que je fais n’a aucune valeur, alors que je dois tout de même vivre de mon sport.”

La médiatisation du skicross est au centre des conversations. “Le privilège de passer à la télévision d’une discipline devrait se faire selon les performances d’ensemble de l’équipe. Nous avons une équipe très forte, qui joue le podium, mais cela ne suffit par pour que l’on soit diffusé en direct sur certaines chaînes nationales. Je me pose la question en voyant qu’il y a peu, on diffusait des concours de saut à ski alors que les Suisses n’y brillaient pas forcément.”

Sixtine Cousin se bat pour ses valeurs, ses convictions. Et sur la piste, après être montée pour la première fois sur la boîte en Italie, elle entend confirmer. “C’est toujours le plus difficile”, acquiesce-t-elle. Les blessures ont freiné sa progression, mais à 24 ans, la skieuse helvétique arrive progressivement à maturité. “On me disait que je devais me montrer patiente. Cela fait quatre que je patiente, qu’on me disait que je skiais bien mais que les résultats ne le traduisaient pas… Maintenant, je ne veux pas m’arrêter là.”

Johan Tachet