Cela ne vous a certainement pas échappé lors du géant dames des Championnats du monde à Méribel. L’écart entre la skieuse en piste et la plus rapide était mesuré en direct lors de chaque passage de porte. Une véritable première, et surtout une petite révolution numérique pour les courses de ski alpin, longtemps à la traîne dans ce domaine. “On nous demande d’avoir de plus en plus de data”, nous expliquait Emmanuel Couder, coordinateur des événements opérationnels alpins de la FIS, rencontré avant le début de la saison. “Cela fait plusieurs années que l’on travaille dessus.”

Pour pouvoir offrir les temps intermédiaires instantanément, les skieuses sont dotées d’un transpondeur, placé à l’arrière des chaussures. “Il a fallu trouver un endroit qui ne gênait pas les athlètes en cas de chute, détaille-t-il. Cela nous permet d’acquérir bon nombre de données.” À terme, ces transpondeurs offriront bon nombres de données supplémentaires, tels que la vitesse, la longueur des sauts, le temps passé dans les airs, mais également les forces d’accélération et les watts produits par les athlètes. “Ce n’est pas facile, car il y a beaucoup de vibration et des forces extérieures qui viennent perturber l’acquisition. Il y a encore du travail à faire sur la fiabilité de ces données.”

L’exemple avec la deuxième manche du géant de Mikaela Shiffrin:

En slalom dès l’hiver prochain

Si cette nouvelle technologie est déjà disponible pour le géant, il faudra patienter jusqu’à la saison prochaine pour pouvoir en profiter également en slalom. Toujours est-il que la FIS, en partenariat avec Swiss-Timing et Longines, les chronométreurs officiels des compétitions, entend prendre rapidement le contour du numérique. “On essaie d’allouer toujours davantage de ressources”, assure Emmanuel Couder.

Pour rendre attractif son sport et attirer une génération plus jeune de téléspectateurs, l’instance internationale veut “associer la data à l’image”, comme cela se fait déjà dans les sports motorisés. Ces dernières années, le passage de la haute définition à la 4K a déjà permis de hausser la qualité de l’image. Mais c’est surtout l’utilisation du drone qui offre des images spectaculaires, comme ce fut le cas à Kitzbühel ou lors de ces Championnats du monde à Courchevel et à Méribel. “Toutes ces innovations ont un coût, mais les grandes Classiques et les grands événements ont un modèle économique stable, qui permet d’investir dans la qualité du produit.”

Emmanuel Couder, coordinateur des événements opérationnels alpins de la FIS, entend véritablement donner une nouvelle impulsion aux retransmissions télévisuelles du ski alpin. (SkiActu)

Le règlement, l’écologie et Netflix

Le troisième point central concerne les fans. “Mais c’est un chantier qui démarrera plus tard”, poursuit Emmanuel Couder dont l’objectif est de voir du ski alpin “sur toutes les chaînes”. “Quand un téléspectateur voit un athlète, il doit avoir envie de rester pour le prochain. Mais cela passe aussi par la compréhension du règlement. Les gens ne comprennent pas forcément pourquoi dans une discipline, on s’arrêter à trente skieurs qui font deux manches et pas dans une autre, ou pourquoi on inverse ces trente. Ce sont des questions auxquelles nous nous devons réfléchir à l’interne, sans oublier que la sécurité des athlètes sera toujours la principale préoccupation.”

Et l’ancien directeur de course de la FIS n’esquive pas non plus la question écologique. “Peut-être que demain, la nature nous demandera d’être plus flexible et que le facteur de la piste soit moins prépondérant. Lorsque des athlètes s’élancent par dizaines les uns derrière les autres, cela a un impact.”

Toutes ces questions ont pour but “d’offrir le meilleur produit possible”. Avec un rêve, à l’instar de la Formule 1 sur Netflix, de profiter d’une plateforme de diffusion renommée pour promouvoir le ski alpin. Des projets seraient déjà dans les tuyaux…

Johan Tachet/LMO, Crans-Montana/Méribel