Difficile d’imaginer plus grand sourire sur le visage de Fanny Smith que celui qui rayonnait en zone mixte à l’issue de sa finale, lors de laquelle elle a pris la 3e place synonyme de médaille de bronze. Après avoir salué ses proches, c’est une Vaudoise soulagée qui s’est confiée en tout sincérité. Le tout après avoir aimablement ramassé l’enregistreur de votre serviteur tombé dans la neige, en rigolant de la situation.

Fanny Smith, quel est votre sentiment après avoir décroché votre première médaille olympique?

Je suis très fière. Mes 3es Jeux olympiques auront enfin été les bons! J’ai réussi à me relâcher, j’ai vraiment dû me battre, alors cette médaille de bronze signifie énormément pour moi.

Quelles sont vos émotions en ce moment?

Il y a un peu de tout en même temps. Énormément de joie, de soulagement. Toute ma famille est là, à part ma grand-mère. D’ailleurs, je pense qu’elle a dû éteindre sa télévision au moment de mon départ, elle a trop peur pour moi. C’est à elle que je dédie cette médaille. Mamy Betty, c’est une femme formidable, très forte, et (ndlr: elle pleure à chaudes larmes)… Et voilà…

Depuis votre élimination en demi-finale olympique il y a 4 ans, qu’est-ce qui a été déterminant?

Ça a été très difficile de repartir, mentalement, après cet échec. J’ai ramé. Ensuite, mon entourage (elle verse à nouveau une larme)… Pourquoi j’en suis venue à ma famille? Il ne fallait pas (elle sourit)… Les gens autour de moi ont toujours cru en moi, ils m’ont encouragé dans mes choix. C’est grâce à eux si j’ai été capable de revenir au top. J’ai effectué beaucoup de changements, parce que j’en ressentais le besoin (notamment en passant d’un team privé aux structures nationales pour cet hiver). Heureusement, j’ai toujours eu la chance de pouvoir pratiquer ma passion.

Avez-vous pensé à Sotchi, aujourd’hui?

Jamais. Et c’est une grande réussite. Ce n’était pas simple mais je suis restée sereine. Mes 3 Jeux olympiques ont été très différents les uns des autres.

Cette médaille de bronze signifie-t-elle que vous pouvez désormais faire la paix avec les Jeux?

Elle a un goût de revanche. C’est un accomplissement, dans ma vie d’athlète, dans ma vie personnelle, dans ma vie olympique. C’est un objectif, un rêve aussi, qui s’est réalisé. D’autant plus avec la bataille que j’ai dû mener pour y arriver.

Quel était votre état d’esprit avant la finale?

Je me sentais bien. J’étais très contente de mon départ. J’ai voulu essayer de dépasser la Canadienne (Kelsey Serwa) mais ça n’a pas marché. Les deux dernières sont ensuite revenues sur moi et je suis restée patiente. Malheureusement, mon erreur m’a coûté très cher. Mes objectifs ont changé à ce moment-là.

Votre petite faute vous-a-t-elle fait craindre de terminer 4e?

Cette erreur m’a coûté beaucoup de vitesse, c’est clair. Je suis une compétitrice et je visais la médaille d’or. J’ai fait une erreur, ça peut arriver, mais je me suis battue dur comme fer pour rester sur le podium.

Votre réaction semble vous réjouir.

En finale, il y avait en quelque sorte deux courses en une, en fait. Après mon erreur, je me suis dit: «Allez Fanny, maintenant tu dois te bouger les fesses!» On m’a souvent reproché d’être un peu trop gentille sur la piste. Là, quand j’ai fait cette faute, je n’ai pas baissé les bras. De toute manière, les autres ne se gênent pas pour jouer des coudes. C’est chacune pour soi. A Nakiska, ce qui s’est passé (éliminée en quarts en Coupe du monde après avoir été bousculée) était finalement un mal pour un bien.

Parlez-nous de ce contact avec Sandra Naeslund (après son erreur, les deux skieuses se sont touchées, ce que les juges ont dû analyser en fin de course).

C’est du skicross, nous ne faisons pas de ski alpin. Nous sommes 4 compétitrices côte-à-côte et il faut réussir à conserver sa place. C’est sûr que nous nous sommes bousculées, mais c’était le cas de toutes les deux. Sandra Naeslund a signalé qu’elle aurait remporté l’argent si je ne l’avais pas poussée? J’aurais aussi été première si elle ne m’avait pas poussée. Je suis navrée pour elle. Si on va en parler? Non, je ne pense pas qu’elle le souhaite.

 

Parvenez-vous à vous projeter dans le futur? Viserez-vous l’or à Pékin en 2022?

Bien sûr, il y a toujours mieux à faire. D’autant que je n’ai pas réussi une course parfaite. Je suis très exigeante envers moi-même. Cette 3e place me comble mais, derrière, la saison continue.

Laurent Morel, PyeongChang