Décidément, Wendy Holdener est une immense championne. Son palmarès parlait déjà pour elle. Double championne du monde de combiné, quintuple médaillée olympique, 45 podiums en Coupe du monde. Les lignes sont bien remplies sur son Curriculum Vitae. Pourtant, il en manquait une: la victoire en slalom. Ce n’était pas faute d’avoir essayé et d’y avoir cru puisque la skieuse d’Unteriberg était montée sur un record de 30 podiums sans victoire dans la discipline avant ce week-end à Killington (USA). Qui ne se rappelle pas de ses incalculables tentatives, à l’image des finales en Andorre en 2019? Et ce dimanche, le miracle s’est enfin produit. Oui, Wendy Holdener a remporté un slalom de Coupe du monde.

L’importance de la décontraction

Et le miracle n’en a en fait pas vraiment été un, tant la victoire de Wendy Holdener est méritée, même si elle a dû la partager avec la Suédoise Anna Swenn-Larsson, qui n’en était elle “qu’à” 6 podiums avant ce premier succès. “C’est génial et ça récompense aussi tous les gens qui m’ont aidé, s’est réjouie la Schwytzoise. C’est fou, enfin!” Ce feu d’artifice est en fait le fruit d’un long travail mais aussi d’une nouvelle manière d’aborder ses courses. Et si le sourire est l’une des caractéristiques de la championne helvétique depuis toujours, celui-ci a pris une toute autre ampleur depuis quelques mois. Il est aussi désormais synonyme de décontraction.

Cela se voit dans son ski, probablement le meilleur de sa carrière depuis le début de la saison alors qu’elle n’est encore qu’à “90% de ses capacités”, selon ses dires. Beaucoup l’avaient déjà imaginée tout devant lors du second slalom de Levi, avant qu’elle soit finalement devancée par une phénoménale Mikaela Shiffrin. “Ce n’est pas grave, il ne faut pas s’inquiéter”, avait rassuré sa maman, qui voyait probablement le potentiel de sa fille pour cet hiver. Et cette fois, ce dimanche, l’Américaine qui l’a tant surpassée n’a pas fait le poids, mais se disait elle aussi heureuse pour sa rivale helvétique dont elle a gâché tant de fois la fête. Le public, évidemment acquis à sa cause, n’était même pas déçu, tant il était lui aussi heureux pour une Wendy Holdener qui a fait l’unanimité et qui a dû signer des autographes à foison après son exploit, non sans avoir pris le temps de discuter avant avec son staff et les journalistes présents dans la raquette d’arrivée.

Femme libérée

Et si Wendy Holdener dégage cette impression de facilité, c’est qu’elle est désormais plus libérée. “Je pense qu’elle s’était malgré tout mis beaucoup de pression ces dernières années, confirme son amie Charlotte Chable, qui a souvent partagé sa chambre lors des compétitions. Je trouve qu’elle était parfois dure avec elle-même. Elle a toujours été une très grande bosseuse, mais elle en voulait parfois trop.” C’est désormais différent. “Elle semble beaucoup plus décontractée, poursuit la Vaudoise, qui a pris sa retraite il y a un an. Là, j’ai vraiment l’impression qu’elle veut profiter de skier.” Des propos que confirme l’intéressée: “Je n’ai pas toujours pris autant de plaisir, c’est vrai. Mais là, je suis vraiment bien.”

Cette notion, Wendy Holdener l’a peut-être aussi développée au contact de son compagnon, Remy Allemann. D’ailleurs, ces derniers mois, elle a quitté le domicile familial d’Unteriberg, pour le rejoindre dans le Seeland. Elle n’hésite pas à s’afficher à ses côtés sur les réseaux sociaux, ce qui n’avait pas toujours été le cas auparavant. Et dans la foulée de sa victoire à Killington, la skieuse de 29 ans est partie pour New York, où elle va passer du temps avec une amie qui étudie là-bas, et qui est venue la soutenir dans le Vermont. “Je lui ai proposé de venir me voir ici et quand elle a dit oui, j’en ai profité pour retarder mon retour en Suisse”, rigole l’héroïne du jour. De l’avis de ses proches, elle n’aurait pas fait un tel choix il y a encore quelques mois.

L’hiver de Wendy Holdener?

Ce côté méconnu de Wendy Holdener se remarque également à sa nouvelle volonté d’apprendre le français, aux côtés de Camille Rast, entre autres. D’ailleurs, pour la première fois, elle a communiqué dans la langue de Molière avec son entraîneur Denis Wicki lors de la reconnaissance de la deuxième manche. “J’essaie, ce n’est pas simple mais c’est sympa.” Et ses entraîneurs, justement, n’ont pas hésité à lui faire changer de position sur les skis pour gagner les centièmes qui lui manquaient encore pour jouer tout devant. Couplé à des skis Head qui fonctionnent extrêmement bien, probablement mieux que ceux de la plupart des autres marques en ce moment, le cocktail est explosif.

L’histoire est belle, et elle n’est même pas terminée tant la Schwytzoise semble prête à atteindre des sommets cet hiver. “Je pense en tout cas que ça va complètement la libérer”, se réjouit encore Denis Wicki, qui confirme qu’elle est plus forte que jamais à l’entraînement. “Et parvenir à gagner aussi tôt dans la saison, c’est juste idéal”, conclut la championne.

Laurent Morel, Killington