Après trois jours de report de courses successifs, les Championnats du monde démarrent enfin jeudi à Cortina d’Ampezzo avec le super-G dames à 10 heures 45. Dans le portillon de départ la grande favorite se nomme Lara Gut-Behrami, mais la Suissesse devra se méfier des Italiennes Federica Brignone et Marta Bassino, de la Slovaque Petra Vlhova et surtout de l’Américaine Mikeala Shiffrin.
Même si elle n’a pas pris le départ d’une seule compétition en vitesse cet hiver, la skieuse de Vail entend défendre bec et ongle son titre mondial du super-G, acquis il y a deux ans à Are. A la veille de la première épreuve, la quintuple championne du monde, qui participera également au combiné, au géant et au slalom, se confie.
Mikaela Shiffrin, sans véritable repères en super-G cet hiver, vous sentez-vous capable de conserver votre titre mondial?
Je n’ai aucune garantie. Il y a deux ans, devenir championne du monde de super-G était pour moi une énorme surprise. Pour tout vous dire, me présenter au départ de ce super-G ici à Cortina est davantage tactique pour obtenir des points FIS et conserver un bon classement dans la discipline en vue d’avoir des bons dossards la saison prochaine.
Mais vous restez tout de même ambitieuse?
Oui, car j’ai fait trois jours d’entraînement dans la discipline, je me sens bien sur mes skis. Je sais que je peux faire un bon résultat, mais je ne participe pas à cette course pour défendre mon titre. J’ai tout juste remis les skis de super-G que je n’avais plus chaussés depuis une année à Bansko.
Vous avez choisi cet hiver de vous concentrer sur les épreuves techniques en Coupe du monde, c’est un choix que vous pourriez être amenée à répéter dans le futur et ainsi de ne plus disputer toutes les compétitions?
Ce n’est pas mauvais d’avoir l’une ou l’autre année où je skie moins en compétition. C’était excitant les dernières saisons de parvenir à maintenir un gros niveau en enchaînant les courses, mais j’adore également m’entraîner et j’ai eu davantage la possibilité de le faire cet hiver. J’ai appris de nouvelles choses, je me sens libre, sans pression, ce qui me permet d’être productive et progresser.
L’Olimpia delle Tofane, ici à Cortina, est une piste que vous semblez apprécier?
J’ai une bonne connection avec. Dès ma première venue en 2017, j’avais fait les reconnaissances lors des entraînements de la descente, sans intention de prendre le départ. Finalement, je me suis élancée en super-G et j’ai pris la 4e place. C’est là où j’ai eu un coup de coeur pour la vitesse. Sur cette piste, il y a de nombreux challenges qui donnent un aspect tactique à la course entre vitesse et gestion des parties techniques. Sans oublier qu’il y a une atmosphère particulière autour de la piste, car le paysage y est magnifique.
Cinq médailles d’or aux Championnats du monde, dont le titre lors des quatre derniers slaloms, vos statistiques sont phénoménales.
C’est totalement fou… Jamais je n’aurais imaginé remporter l’or durant quatre Mondiaux de suite en slalom. Du coup, j’essaie de ne pas trop penser à continuer cette série. Il y a peu, j’ai revu ma première victoire à Schladming en 2013. A la fin de ma course, je tombe par terre et pose mes skis contre ma tête, comme le faisait parfois Bode Miller. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ce geste, peut-être la pression, mais j’avais besoin de ce moment à moi. Le sport est fou et demande beaucoup d’énergie, entre les victoires et les échecs, et il est nécessaire parfois d’intérioriser ce que l’on ressent dans un moment de calme. Je me rappelle que j’étais très nerveuse entre les deux manches. A ce moment-là, Steven Nyman (ndlr: l’un des descendeurs américains) est venu me voir et il m’a dit que je n’avais aucun point à défendre, que tout le monde se trouvait dans la même situation: que tu sois 30e ou 1ère après la première manche, la tactique est la même, il faut attaquer pour gagner l’or. Ses mots ne m’ont pas enlevé la pression, mais permis de ressortir mon meilleur ski. Et j’y pense souvent.
Quelles seront vos principales rivales durant ces Mondiaux à la conquête aux médailles?
En super-G, Lara (Gut-Behrami) est bien évidemment la grande favorite. Elle skie fort et vite. Petra (Vlhova) et Ester (Ledecka) ont montré cette saison qu’elles pouvaient être très bien également dans cette discipline. Je n’oublie pas Federica (Brignone), Marta (Bassino) et Tamara (Tippler). La liste est longue pour monter sur le podium et ce dans toutes les disciplines. En géant, les Italiennes seront les favorites, surtout qu’elles ont eu la chance de s’entraîner sur cette piste. J’ajoute également Tessa (Worley) et Michelle (Gisin), qui est incroyable cette saison. Et enfin, en slalom, Michelle, encore, sera présente, tout comme Petra (Vlhova), Wendy (Holdener) et Kathrin (Liensberger). C’est excitant de voir qu’il y a beaucoup de prétendantes, et franchement, il est bien difficile de prévoir qui remportera l’or.
Johan Tachet, Cortina d’Ampezzo