Sous les giboulées de Saint-Moritz, la sélection helvétique de vitesse prend son mal en patience à l’hôtel Reine Victoria. Dans les couloirs du lieu de villégiature des skieuses suisses, Urs Lehmann enchaîne les meetings. Le président de Swiss-Ski est naturellement un homme très demandé au moment où un hiver particulier, crise du Covid-19, se profile. L’Argovien en profite alors pour présenter les défis auxquels il fait face depuis plusieurs mois et qu’il va encore devoir gérer, au moins, jusqu’au printemps.

Urs Lehmann, pouvoir organiser des courses de Coupe du monde de ski en Suisse dans ce contexte de crise sanitaire mondiale est pratiquement un exploit…

C’est un vrai défi. Imaginez que pour les stations, dans la vie de tous les jours, c’est extrêmement difficile. Si en plus, vous ajoutez une organisation de courses professionnelles, le challenge est des plus importants. Il est clair que notre côté, nous voulons tout faire pour avoir des compétitions. Pour les organisateurs, pour les athlètes et pour la valeur du produit final. Mais c’est évident que cela représente beaucoup de travail.

Vous avez pris très tôt la décision de mettre sur pied les compétitions de Coupe du monde de ski alpin à huis clos en Suisse. Aujourd’hui, votre décision était vraiment la bonne.

Nous avons rapidement réalisé des analyses approfondies. Nous avons cherché le contact avec la FIS et les organisateurs. On a alors pensé à quatre scénarios. L’un était avec du public, un autre était sans, et les deux derniers étaient des solutions intermédiaires. Nous avons immédiatement remarqué que la meilleur était de ne pas avoir de spectateurs. On a ainsi travaillé main dans la main avec Crans-Montana, Wengen, et les autres comités. Nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir et je suis à l’aise avec les décisions prises.

Peut-on, tout de même, peut-être envisager voir du public lors des finales de la Coupe du monde à Lenzerheide (17-21 mars 2021)?

(Il fait la moue) C’est dans très longtemps… Mais je l’ai toujours dit: tant qu’il n’y a pas de vaccin, rien ne changera dans notre modèle d’organisation. Après, il s’agit d’avoir une vision large car le but est avant tout de sauver la saison, mettre sur pied des événements et, donc, de suivre le protocole.

Quels sont les coûts pour une saison d’hiver perturbée par la crise du coronavirus?

Sans entrer dans les détails, ils s’élèvent à 10 millions de francs pour les organisateurs. La chance que nous avons est d’être une fédération financièrement saine et avons décidé de reverser l’argent que nous recevons de l’OFSPO (ndlr: 14 millions pour 2020 et 2021), concernant les mesures de stabilisation pour le sport, directement aux organisateurs des compétitions.

La France, L’Italie et l’Allemagne ont choisi de fermer leurs remontées mécaniques, que pensez-vous de la décision des autorités politiques helvétiques de les maintenir ouvertes pendant les Fêtes?

Je les félicite. Je voyage beaucoup et j’ai eu l’opportunité de voir comment cela se passait ailleurs et je suis très content que notre Gouvernement ait résisté à la pression de fermer les remontées mécaniques. Il y a un temps où j’étais critique avec nos décideurs, mais sur ce point de vue, je suis en accord. Après, bien évidemment, l’importance est de réduire les infections, sauver le système de santé pour que tout le monde puisse être traité, tout en essayant de vivre le plus normalement possible. Le fait d’avoir différentes décisions dans chaque canton ou dans chaque région est quelque chose de positif, qui fonctionne.

Si les stations et les remontées mécaniques sont ouvertes, les jeunes en dessous de 16 ans ne peuvent toutefois pas concourir en compétition. Regrettez-vous ce choix des autorités?

Non, je le respecte. Même si on sait qu’en ski alpin, une aire d’arrivée n’est pas comparable à un stade de football ou à une patinoire. Après, ils peuvent toujours s’entraîner, bouger. Et notre but est désormais de trouver des solutions pour que les jeunes talents ne quittent pas pour autant notre sport. Et pour cela, nous devons leur offrir des entraînements attractifs pour qu’ils gardent le plaisir de skier.

L’élection à la présidence de la FIS, à laquelle vous êtes candidat, a été repoussée de mai 2020 à juin 2021. Comment gérez-vous votre campagne?

Pour la moment, il n’y a aucune campagne pour ma candidature. Il se passe aujourd’hui des choses bien plus importantes. Ce qu’il faut assurer avant tout est la survie du sport. Et les éléments personnels viennent après. On ne sait d’ailleurs même pas si l’élection aura bien lieu en juin. Une fois seulement que l’on en saura davantage, je relancerai alors ma candidature.

Johan Tachet/LMO, Saint-Moritz