C’est un Jovian Hediger encore très ému qui s’est confié quelques minutes après son exploit depuis Ulricehamn (SWE). Il faut dire que son premier podium de Coupe du monde, il l’attendait depuis très longtemps, le Vaudois de 30 ans qui compte trois 4es places et deux 5es rangs sur le Cirque blanc. Il en a fait du chemin depuis ses débuts parmi l’élite en 2009, passant par tous les états, et échouant à de nombreuses reprises tout près du Graal.
C’est désormais du passé, puisque le fils de l’ancien athlète Daniel Hediger tient enfin son exploit. Et le Bellerin a en plus eu l’occasion de le partager avec son cousin Erwan Käser et ses amis de l’équipe de Suisse, Roman Furger (son équipier du jour) et Roman Schaad (qui faisait équipe avec l’autre Vaudois). Tous ont exulté à l’arrivée de ce sprint par équipes. Comme si cet aboutissement, ce premier podium d’une équipe helvétique masculine en sprint venait récompenser des années de labeur. Retour sur une folle journée avec l’un des héros du jour.
Jovian Hediger, quelles sont les émotions qui vous habitent en ce moment?
C’est juste exceptionnel, on a vécu un moment juste énorme! De nombreuses émotions m’ont d’ailleurs traversé au moment où Roman a franchi la ligne d’arrivée. C’est juste fou. Quand tu bosses depuis 10 ou 12 ans pour atteindre un podium et que tu y parviens enfin, c’est incroyable! Avec Roman Schaad, on attendait nos deux coéquipiers qui jouaient la gagne et on était très excités. Cependant, je n’ai pas voulu m’emballer trop vite car j’avais déjà connu cette situation et ça s’était mal terminé. Mais là, quand j’ai vu que ça allait le faire, j’ai pu laisser exploser ma joie.
Racontez-nous en quelques mots votre parcours à Ulricehamn ce dimanche?
En demi-finales, on a vraiment réussi à bien gérer (ndlr: Jovian Hediger et Roman Furger ont pris le 2e rang de leur série) et à conserver de la fraîcheur. La difficulté dans le sprint par équipes, c’est que c’est une discipline très tactique. Il ne faut pas être tout le temps à fond, avoir de bonnes sensations et savoir jouer avec ses adversaires. Ensuite, en finale, on est passé par tous les états. J’ai connu un accrochage au pire des moments mais il était hors de question que je me laisse abattre. Je me suis directement remobilisé et j’ai rapidement pu rattraper mon retard. Heureusement, j’avais de super jambes. Et j’ai réussi à tenir et à me replacer pour transmettre l’ultime relais à Roman dans les meilleures conditions possibles. Et ensuite, il a réalisé une superbe prestation.
Réussir cet exploit aux côtés de votre pote Roman Furger justement, c’est plutôt sympa, non?
C’est sûr que ça me fait extrêmement plaisir et c’est très spécial. Roman, je le connais depuis mes débuts en compétition. Il est le premier Suisse allemand que j’ai rencontré, en quelque sorte. Lorsque j’ai disputé mes premières courses, j’ai déjà partagé ma chambre avec lui. Ensuite, on a fait toute notre carrière ensemble alors pouvoir partager ce moment historique en devenant la première équipe de Suisse de sprint sur un podium de Coupe du monde, c’est beau.
Vous avez tous deux manqué la qualification pour les quarts de finale samedi lors du sprint individuel. Un mal pour un bien, finalement?
Oui et non, car je ne crois pas que ça change fondamentalement les choses. Certes, on avait quelques courses de moins dans les jambes, mais on a l’habitude d’un tel programme et on y est préparés.
Aujourd’hui, et même si certains spécialistes étaient absents, vous montez sur ce podium alors que l’ensemble des meilleurs nations étaient présentes. C’est d’autant plus fort.
Oui, mais comme je dis toujours, les absents ont toujours tort. Sur une saison, il manque toujours quelqu’un lors de l’une ou l’autre étape alors ça n’enlève rien au résultat, de toute façon. Et là, de voir que toutes les nations étaient présentes, ça montre qu’on est allés le chercher à la régulière, c’est sûr.
Ce résultat vous donne-t-il des idées pour les Championnats du monde d’Oberstdorf qui s’ouvrent dans une vingtaine de jours?
Déjà, on savoure. On a le temps de voir venir pour la suite. Je sais que j’y serai en sprint individuel, reste encore à connaître le choix des entraîneurs pour l’épreuve par équipes. La Suisse a plusieurs cartes. Mais c’est sûr qu’un tel résultat, ça booste.
Quel est votre programme d’ici là?
On va rentrer en Suisse demain (ndlr: lundi) avant de pouvoir profiter de quelques jours à la maison. Ensuite, la semaine précédant les Championnats du monde, j’irai probablement à Davos, histoire de parfaire la préparation et de me retrouver avec l’équipe. C’est un moment important.
Votre saison avait très bien commencé avec une finale à Ruka. Comment évaluez-vous la suite?
Dans l’ensemble, je suis satisfait. La régularité me tient vraiment à coeur et je suis content d’être toujours capable de tirer mon épingle du jeu. Après, il faut être conscient qu’il n’est pas possible d’enchaîner les exploits et il est vrai aussi que j’ai connu quelques qualifications compliquées. Mais lorsqu’il s’agissait d’affrontements, j’ai toujours été dans le coup, c’est très positif.
Il n’y avait pas de public à Ulricehamn, mais avez-vous senti le soutien de vos proches?
Oui, complètement. On sent qu’on a beaucoup de monde derrière nous. Mes proches savent à quel point je suis investi et depuis combien de temps je tournais autour de ce podium alors ils sont également extrêmement heureux pour moi. Il n’y avait certes pas de public, mais on se sent déjà privilégiés de pouvoir concourir alors on ne va pas s’en plaindre.
De quoi fêter ça ce soir?
Non, pas vraiment. On savoure sans fêter car on pense déjà à la suite de l’hiver. La fête, ce sera pour la fin de la saison…
Laurent Morel