A la veille du slalom de Garmisch-Partenkirchen, les trois coaches de l’équipe de Suisse, Matteo Joris, Thierry Meynet et Julien Vuignier criaient d’une seule voix: “Marc Rochat est en grande forme, c’est un gros bosseur, un acharné. Il va en claquer une ou deux durant ce mois de janvier”. Il n’a fallu attendre que vingt-quatre heures pour que se réalise la prophétie. Le skieur Vaudois de Crans-Montana a pris une magnifique 7e place, synonyme de qualification pour les Mondiaux de Courchevel/Méribel lors d’un slalom plein de rebondissements.

Pour Marc Rochat, cette performance, la deuxième meilleure en carrière après une 6e place à Kranjska Gora en 2018, est la récompense d’un travail de forcené. Face aux épreuves, aux nombreuses blessures qui l’ont freiné, l’athlète de 30 ans n’a jamais baissé les bras, conscient de son potentiel sur les skis. Alors il a cravaché, plus que les autres. Et désormais, il n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Interview.

Marc Rochat, on vous savait en pleine forme, il ne manquait plus que de le démontrer en course. Ce résultat est la performance référence que vous attendiez?

Absolument. J’enfourche à Val d’Isère, d’accord. Puis à Madonna, je suis sorti, et là j’étais vraiment frustré car je m’attendais à un gros résultat. En plus, je me suis fait mal au bras. Je pensais qu’il était potentiellement cassé. J’ai eu des jours compliqués, mais finalement cela s’est bien passé et je suis arrivé serein à Garmisch. À nouveau, comme je l’ai déjà dit, après le travail effectué l’été dernier, j’étais parfaitement en confiance même si j’étais sorti deux fois en ce début de saison. Je n’ai pas perdu ma vision.

Vous saviez que ça allait passer à un moment ou à un autre?

Après la première course, je me suis dit si c’est pas celle-là, c’est la prochaine. Alors à Madonna, je pensais que ce serait la bonne. Et ce n’est pas venu. Alors ça devait encore être la prochaine, et c’est là… Dans des conditions difficiles ici, je ne m’attendais pas à faire une course exceptionnelle. Je voulais juste skier intelligemment et je savais qu’un bon résultat allait suivre.

Qu’est-ce que va vous apporter cette 7e place pour les cinq slaloms qui vont s’enchaîner en peu de temps?

De la confiance, du plaisir. Commencer l’année avec le sourire, c’est toujours un plus, on ne va pas se leurrer. Lorsqu’il y a une mauvaise performance, c’est toujours frustrant. Mais je me fais plaisir, mon dos va bien, donc ça me donne le sourire.

Ici à Garmisch-Partenkirchen, vous avez notamment réussi un premier parcours assez étonnant (23e chrono) compte tenu que vous vous êtes élancé avec le dossard 34 et que la piste était bien défoncée…

Oui effectivement, c’était chaotique, c’était très sportif. Mais comme je le dis souvent à mes entraîneurs, quand c’est dégueulasse, je suis meilleur que les autres. Ce sont des conditions qui sont difficiles mais dans lesquelles je me sens à l’aise. J’ai beaucoup travaillé sur d’autres conditions qui me convenaient moins à l’époque. Mais j’ai toujours été bon pour skier dans des trous depuis enfant, c’est mon jardin. J’ai rien fait d’extraordinaire, simplement une manche pleine en première, et lors de la seconde également, dans des conditions un peu meilleures. Et c’est ainsi que l’on va de l’avant.

Cette performance est aussi la reconnaissance de tout le travail que vous avez investi depuis plusieurs mois, plusieurs années.

Oui et je suis vraiment content, car c’est un résultat que j’attends depuis longtemps et que j’estime mérité. C’était vraiment une course spéciale, mais il faut saisir les opportunités. Je n’ai pas toujours réussi à le faire par le passé et aujourd’hui j’y suis parvenu. Et sans partir premier en deuxième manche, puisque je me suis élancé en 8e position. Je suis très heureux de ma course et c’est un bon départ pour ce mois de janvier.

On a vu tous vos coéquipiers se précipiter vers vous et vous féliciter…

Comme tous mes coéquipiers m’ont dit ce soir: «Putain enfin!» Car j’ai skié fort tout l’été, j’estime faire partie des meilleurs skieurs du monde et aujourd’hui j’ai pu le montrer sur deux manches.

Vous vous sentez plus solide sur vos skis, mieux armé?

Oui, car quand tout fonctionne, le dos, le matériel, je suis très serein. Je skie bien et je ne me pose pas trop de questions et cela se voit dans mon ski.

Logiquement, la prochaine étape c’est le podium?

Absolument, mais il ne faut pas oublier de prendre du plaisir. On ne peut pas se focaliser sur les résultats, car on dépend aussi beaucoup des autres. Il faut simplement produire le même ski qu’aujourd’hui et ces résultats viendront.

Johan Tachet, Garmisch-Partenkirchen