La première grosse victoire de l’hiver pour la Coupe du monde de ski alpin, c’est de pouvoir entamer sa saison. La situation sanitaire actuelle en Europe n’incite pas vraiment à l’optimisme, alors retrouver les meilleurs skieurs du monde à Sölden (AUT), pour le grand rendez-vous automnal du Cirque blanc, c’est plutôt une belle nouvelle. Si les deux géants d’ouverture (dames samedi et messieurs dimanche) sont assurés ou presque, ils se dérouleront dans une ambiance bien particulière. Alors que ski rime souvent avec fête, notamment en Autriche, le rythme sera tout autre ce week-end.

Le public n’est en effet pas autorisé sur le glacier du Rettenbach et l’atmosphère qui règne dans l’Ötztal s’en ressent largement. Rues quasiment désertes, magasins, hôtels, restaurants et bars souvent fermés (et obligatoirement clos dès 22h pour un couvre-feu dans tout l’ouest de l’Autriche) et autres haut-parleurs qui ne diffusent pas de schlager à tue-tête, comme c’est habituellement le cas pour lancer une longue saison hivernale à Sölden, donnent au lieu une ambiance morne. Aucune réception, mise en place annuellement par les grands sponsors, n’a non plus été organisée. La neige apparue ces dernières heures n’aura fait qu’accentuer ce sentiment de quiétude. C’est donc dans cette configuration étrange que se retrouvent les athlètes, staffs et suiveurs de la Coupe du monde de ski alpin.

Montrer patte blanche

Afin de récupérer son accréditation dans un sous-sol au terme d’un parcours du combattant, tout ce beau monde doit montrer patte blanche, à savoir un test Covid négatif, datant de moins de 72 heures. Deux possibilités existent: se faire tester avant de rejoindre Sölden, ou sur place, contre 85 euros, dans un camion mobile prévu à cet effet. Promis en trois heures, le résultat tombe en à peine moins de quatre heures. Il a été heureusement négatif pour les deux journalistes de SkiActu présents sur place. Pourtant, aucun lieu de travail existe pour les journalistes à Sölden même afin d’éviter les contacts, alors que normalement une salle de fête de la station est mise à disposition. D’ailleurs, les accréditations ont été limitées à peine plus d’une centaine d’heureux qui pourront toutefois avoir un poste de travail sur le glacier du Rettenbach les jours de courses, à distance respectable du voisin de table.

Ces journalistes justement, comme l’ensemble des membres la “bulle” FIS, doivent impérativement être hébergés dans des hôtels officiels, retenus par l’organisation. S’il existe plusieurs standings (et des nuits dans une fourchette de 65 à 150 euros), les possibilités sont largement limitées. Et si certains hébergements peuvent donc se réjouir quelque peu d’accueillir des clients dans cette période particulière, les propriétaires restent très inquiets. “Et dire qu’il n’y aura pas d’après-ski cet hiver, c’est inimaginable”, avoue d’ailleurs notre hôte.

Une “bulle” plus ou moins hermétique

Pour manger, pas le choix. Les médias doivent se rendre dans un seul et unique restaurant, avec un menu quasiment fixe. Il est interdit, même s’il n’y a évidemment pas de contrôle, de se rendre dans d’autres lieux tels que des bars, magasins et autres. Difficile cependant à réellement mettre en place, tant les déplacements sont importants et les besoins variés. Comme bientôt partout, le masque est également l’objet à ne jamais oublier. Ce fameux masque est notamment essentiel lors des conférences de presse organisées dans la station, mais dans le parking au sous-sol d’un hôtel – alors qu’elles ont habituellement lieu dans les lobbys d’hôtels – qui n’est pas des plus accueillants. Les journalistes ont leur entrée et les athlètes la leur. Il se voient et peuvent discuter, mais à bonne distance, à travers des barrières.

C’est le prix à payer pour qu’un course puisse se disputer samedi et, jusqu’à vendredi après-midi, la FIS se réjouissait de n’avoir aucun cas positif à déclarer. C’était avant qu’Ola Masdal, entraîneur de l’équipe masculine suédoise de ski, soit testé positif, selon SVT Sport. Placé en quarantaine, il n’a apparemment pas eu de contact direct avec ses athlètes, l’équipe italienne et Henrik Kristoffersen, qui logent dans le même hôtel. La fédération suédoise promet que l’entraîneur est resté séparé des athlètes, et n’ont jamais voyagé dans le même véhicule.

Seul un test positif entraîne un forfait

Jusqu’à quand la situation restera sous contrôle? Personne ne le sait… En revanche, la FIS a tout mis en place pour qu’un maximum d’athlètes puissent être au départ quoiqu’il arrive. Les quarantaines ne doivent être imposées qu’en cas de test positif. Et s’il y a un doute, les skieurs peuvent être justement testés jusqu’au dernier moment ou presque, et obtenir un résultat en quatre heures. Du côté des athlètes, on fait bon an mal an, avec. “Nous sommes déjà chanceux de pouvoir skier lorsque d’autres sportifs de haut niveau sont au chômage technique”, lance Loïc Meillard, lors d’une conférence de presse en visioconférence avec l’équipe masculine de ski suisse. “L’ambiance va nous manquer, regrette Tanguy Nef. Mais je suis content d’arriver à la première course de Coupe du monde en mode Covid pour voir comment ça se passe. Cette pandémie, c’est aussi quelque chose d’important à respecter en tant que sportif.”

“C’est quelque chose qui se passe au niveau mondial, rappelle Lara Gut-Behrami, finalement présente après été obligée de rester en quarantaine il y a quelques semaines. Ça fait des mois qu’on vit de manière différente. Ce n’est plus comme avant. Il faut prendre des précautions mais on a de la chance de pouvoir skier.” Des propos confirmés par Wendy Holdener: “On a de la chance de ne pas être trop affecté par la situation. On peut quasiment mener une vie normale”. Michelle Gisin a aussi hâte de voir le bout du tunnel. “Pour moi comme pour tout le monde, on a beaucoup d’espoir de pouvoir revenir à la normalité le plus vite possible, explique l’Obwaldienne. Le pire serait d’être positive et de rater des courses sans être malade.”

Laurent Morel/JT, Sölden