“Lara Gut-Behrami embrasse l’imperfection pour gagner le super-G de Sankt Anton.” On ne saurait mieux analyser la victoire de la Tessinoise que les suiveurs de la FIS. La skieuse de Comano a accroché son 36e succès en Coupe du monde, malgré de nombreuses fautes sur une piste Karl Schranz qui ne laissait aucun répit. “Lorsque je suis arrivée en bas de ma manche, je pensais que cela ne suffirait jamais pour gagner”, confie une Lara Gut-Behrami qui avoue avoir tendu les lignes au maximum sur le bas du tracé autrichien pour faire la différence dans les derniers hectomètres.

Une démonstration, tant technique que tactique, qui offre à la championne olympique de super-G les louanges de Federica Brignone qu’elle a devancé de 15 petits centièmes. “Lara est tellement forte lorsqu’elle doit tirer ses lignes. Elle parvient à créer une vitesse incroyable avec la piste”, explique l’Italienne en admiration devant sa rivale helvétique. “Lara est une grande championne. Elle est capable de changer de disciplines et d’être toute aussi forte. C’est une skieuse très intelligente, notamment tactiquement. Elle sait comment aborder les passages compliqués et dans ce genre de situation, c’est véritablement la meilleure.”

Un record, quatorze ans après

Ce dimanche, Lara Gut-Behrami a remporté son 18e succès en super-G, devenant la deuxième athlète la plus victorieuse dans la spécialité derrière l’Américaine Lindsey Vonn et ses 28 triomphes. La moitié des victoires de la Tessinoise a été acquise dans sa discipline favorite. “Je suis heureuse de pouvoir skier à ce niveau après tant d’années”, sourit l’athlète de Comano, rappelant que son premier succès en super-G remonte à 14 années en arrière. C’était à Saint-Moritz en décembre 2008, une éternité. Jamais une skieuse n’avait connu un aussi grand écart entre son premier et son dernier triomphe. “Je n’aurais jamais pensé avoir une telle longévité aux avant-postes. Lorsque l’on est jeune, on pense uniquement en terme de victoire, désormais on pense davantage à la signification.”

A 31 ans, la double championne du monde de Cortina d’Ampezzo en 2021, se plaît sur les skis. “Le fait d’être toujours performante après ces années me donne de l’énergie quand je suis fatiguée.” Même ses 15 années sur le circuit n’altère en rien sa motivation, même si Lara Gut-Behrami ne devrait pas encore faire long feu sur le circuit. “J’essaie à chaque compétition de donner le meilleur de mon potentiel. Et par rapport à avant, j’essaie de profiter au maximum car je sais qu’il ne me reste pas beaucoup de courses non plus.”

Le super-G, clé de la simplicité sur les skis

Elle l’assure également, son expérience, du haut de ses 330 départs et 70 podiums en Coupe du monde, est devenu un gros atout. “Cela fait la différence sur des pistes comme celle de Sankt Anton. Lorsque tu les connais, tout devient plus simple.” Géant, super-G, en attendant un podium en descente cette saison, Lara Gut-Behrami prouve surtout qu’elle est capable de s’adapter à n’importe quel changement de discipline en l’espace de quelques jours. Avant ce week-end autrichien, elle n’avait plus remis les skis de vitesse depuis Saint-Moritz. Son instinct sur les skis a ensuite fait le reste. “Le super-G reste toujours la clé pour moi afin de retrouver la simplicité du ski”, analyse-t-elle. “Cette discipline me permet d’être libre et d’avoir confiance. Le super-G, c’est être capable de jouer.”

Et Lara Gut-Behrami aime jouer, notamment lorsqu’elle est challengée. Pas uniquement par ses adversaires, mais également par les conditions de course qui évoluent de jour en jour. “C’est un nouvel élément que je ne connaissais pas au début de ma carrière. On est toujours en train de s’adapter”, explique-t-elle en faisant référence au revêtement neigeux tantôt dure, tantôt mou, rencontré sur le tracé du jour et qui était bien différent par rapport à celui de la veille. “C’est un véritable challenge de trouver chaque jour une nouvelle clé.”

Mais son trousseau est aussi bien fourni qu’elle est affûtée. A trois semaines des Mondiaux, la Tessinoise, qui aura deux titres à défendre en super-G et en géant, monte en puissance. “Je n’ai rien à défendre, ni à perdre. Quant on prend le départ d’une course, c’est uniquement pour gagner quelque chose de nouveau.”

Johan Tachet, Sankt Anton