Incrédule, Camille Rast est tombée dans les bras de Wendy Holdener et de Mélanie Meillard au moment où sa victoire lors du slalom de Killington a été entérinée. La skieuse de Vétroz a réalisé un rêve en remportant son premier succès en Coupe du monde, seulement une semaine après être montée sur son premier podium lors du slalom de Gurgl.
Quinze ans après Fränzi Aufdenblatten en super-G à Val d’Isère, elle devient la première Valaisanne à triompher sur le Cirque blanc. Et cerise sur le gâteau, Camille Rast est désormais leader non seulement du classement du slalom mais également du général. Alors, lorsqu’elle s’est confiée quelques heures après son exploit, elle avait naturellement de la peine à y croire. Interview.
Camille Rast. Mais quel week-end. Une troisième place lors du géant samedi et surtout un premier succès en Coupe du monde lors du slalom dimanche. C’est tout simplement un week-end exceptionnel!
Clairement, c’était un week-end de folie. Je n’ai pas encore réalisé que tout ça, c’est moi qui l’ai accompli. J’ai un dossard rouge sur le dos, et c’est encore plus difficile à croire. Je suis vraiment heureuse, car cela montre que tout le travail effectué cet été, qu’il s’agisse de la condition physique, du mental ou du ski, a fini par payer.
Vous avez paru très sereine avant votre second passage, après votre 3e place sur la première manche, alors que beaucoup de skieuses auraient été nerveuses dans une telle situation.
C’est vrai qu’au départ, j’ai ressenti un petit coup d’adrénaline en regardant partir la fin du top 15. Mais je me suis rapidement recentrée sur moi-même. Avec les années, j’ai appris que je skie mieux quand je fais les choses pour moi. Là, je me suis dit: « Prends du plaisir et comme on dit chez nous: fous-y! »
Une grande journée pour l’équipe de Suisse avec Wendy Holdener qui monte également sur le podium et Mélanie Meillard 5e. Les émotions devaient être fortes dans l’aire d’arrivée.
Quand je suis arrivée en bas, j’ai vu Mélanie et Wendy dans le leaderbox. Je n’avais pas encore vu le tableau, mais je me suis dit: « On est là, toutes les trois, c’est incroyable. » Cela montre qu’on fait du bon travail. Avec Mélanie, on revient de loin et c’est génial de voir les progrès. J’espère pouvoir partager un podium avec Mel très bientôt.
Vous êtes 1ère du général en Coupe du monde… Si on vous avait dit ça il y a peu?
J’en aurais ri. Mais nous ne sommes qu’au début de la saison, il faut rester calme. Avec cet hiver qui commence aussi bien, je me réjouis pour la suite. Je vais profiter de ces deux semaines à la maison pour récupérer, puis reprendre l’entraînement et les courses en janvier, un mois que j’adore. Ce sera l’occasion de peaufiner les petits détails et de continuer sur cette superbe dynamique.
Peut-on désormais vous attendre aux avant-postes à chaque course?
L’objectif principal reste de skier dans le top 7 à chaque course pour montrer ma régularité sur l’ensemble de la saison. Évidemment, il y a aussi les Championnats du monde en février. Il ne s’agit pas seulement de tenir en janvier, mais sur toute la saison. Il faudra bien gérer les réglages, le dosage entre les entraînements physiques et ceux sur les skis. Je suis impatiente de poser tout cela sur la table, d’analyser ce qui a été fait et de repartir encore plus fort après Noël.
N’est-il pas frustrant désormais d’avoir une pause jusqu’entre les Fêtes alors que vous êtes sur une belle lancée?
C’est vrai que j’adore l’enchaînement des courses, donc je suis un peu déçue de voir cette dynamique s’interrompre. Mais c’est aussi une opportunité. Ces dix jours en décembre vont être cruciaux pour récupérer et me préparer au mieux pour janvier, un mois exigeant et essentiel pour le reste de la saison.
La saison dernière, il vous manquait un brin de chance. Cette année, les choses tournent en votre faveur.
C’est un cercle vertueux. Je suis de plus en plus régulière, je fais moins d’erreurs et je prends soin des moindres détails. Tout cela commence à porter ses fruits et ça me motive à continuer dans cette direction.
Quelle est votre marge de progression?
Elle existe, c’est certain. J’en ai discuté avec Denis (ndlr: Wicki, son entraîneur). Il y a encore plusieurs points à travailler, ce qui est très excitant. J’ai hâte de le montrer sur les prochaines courses, tout en restant fidèle à mon ski, sans me mettre trop de pression.
Après votre podium samedi en géant, vous avez également eu une pensée pour Mikaela Shiffrin après sa chute.
Dans l’aire d’arrivée, c’était très silencieux. On était toutes inquiètes pour Mikaela, car on veut se mesurer aux meilleures. Heureusement, les nouvelles semblent rassurantes. J’espère qu’elle sera rapidement de retour, peut-être dès Semmering fin décembre. Avec le possible retour de Petra Vlhová, je me réjouis de me confronter à ces grandes championnes qui ont presque 100 victoires en Coupe du monde (rires). J’aime bien jouer les trouble-fêtes, mais rien n’est jamais acquis. Il faut prouver sa valeur sur deux manches à chaque course et je vais continuer à travailler pour rester dans le top 5.
Johan Tachet