Il s’agissait de ses premiers Jeux olympiques, mais Pat Burgener ne s’est pas pour autant dégonflé. En finale du halfpipe, le rider de 23 ans n’a pas tremblé face aux meilleurs mondiaux, échouant à la 5e place, non sans avoir rivalisé avec les tous meilleurs. S’il n’a que très peu réussi à trouver le sommeil la nuit précédent le “contest”, le Valdo-Valaisan n’avait pas perdu son sourire en matinée à l’heure de prendre le télésiège pour partir en haut de l’imposant pipe coréen. Il n’a pas hésité à saluer ses connaissances, comme si la pression ne l’atteignait pas.

Ambiance des grands jours

Pourtant, une atmosphère bien particulière régnait à Bokwang ce mercredi matin. Comme une sensation que quelque chose d’historique allait avoir lieu. Les immenses files d’attente à l’entrée du Phoenix Park trahissaient d’ailleurs cet air quelque peu surnaturel. Car se préparait ce qui sera peut-être le grand événement de ces Jeux olympiques, tant ce concours était attendu, de par la présence de la star planétaire Shaun White, de ses contradicteurs Ayumu Hirano ou Scotty James, ou du niveau déjà énorme des qualifications.

Pat Burgener le savait. “On sent que c’est là qu’il faut être, oui, c’est trop bien”, a-t-il d’ailleurs avoué. Et faire face à la foule ne lui fait pas peur. Le 3e des derniers Mondiaux en a d’ailleurs l’habitude derrière sa guitare et un micro lorsqu’il donne des concerts dans certains des festivals les plus renommés de Suisse. Cette fois, c’est sur la neige coréenne qu’il a partagé ses accords avec des milliers de spectateurs motivés et parfois médusés par les exploits de ces hommes volants au dessus de ce demi-tube tant scruté. “C’est le seul événement où tout le monde a les yeux braqués sur nous”, a d’ailleurs rappelé Jan Scherrer, 9e après avoir également réussi un run de haut vol.

“Une des plus belles batailles de ma vie”

Après avoir assuré un premier run probant (82 points), Pat Burgener a tombé la veste et lâché les chevaux afin de monter plus haut dans le classement. Sauf que pour son 2e passage, le garçon à la tignasse bien accrochée a dû patienter plusieurs minutes en haut de son terrain de jeu que le Japonais Yuto Totsuka soit évacué après sa violente chute. Pas de quoi s’élancer dans les meilleures conditions… Pourtant, “Pat” n’a pas tremblé. Il a lancé le run qui devait être celui de sa vie. Pourtant, il s’est manqué sur sa dernière figure.

Tout s’est alors joué sur son 3e passage. Tout donner, c’était le mot d’ordre. Ça passe ou ça casse. Ça a passé. Casque balancé dans le public, cris de joie et de rage. 89,75 points, juste en-dessous de la barre des 90 points et du podium. Certes, il n’a pas atteint le Graal, mais le rider de Crans-Montana a réussi. Il a plaqué le run de sa vie. “Je n’avais jamais aussi bien ridé, s’est réjouit le 5e du jour. C’était une des plus belles batailles de ma vie, je suis vraiment fier d’être là aujourd’hui. Je ne peux rien demander de plus, je suis super heureux et je peux juste profiter. J’ai ressenti des sensations parfaites. J’ai trouvé la musique qui me motive et j’ai pu profiter du moment. Je veux garder ces sentiments. Au début, j’étais tranquille, mes jambes ne tremblaient pas, je souriais à mes entraîneurs.”

La frustration du compétiteur

Dans l’aire d’arrivée, la joie prédominait sur le visage de l’athlète du Haut Plateau. “J’ai survécu!”, a-t-il notamment crié devant ses potes de l’équipe de Suisse de snowboard venus l’encourager. Pourtant, une pointe de frustration est rapidement apparue chez ce compétiteur. “L’Américain (ndlr: Ben Ferguson) me passe devant alors qu’il ne le mérite pas vraiment, a-t-il regretté. Il va falloir faire quelque chose au niveau des juges. J’ai 4 double cork dans mon run et lui en réussit un seul. Ce n’est pas juste. Cependant, je ne méritais pas de monter sur le podium et je reste très content d’avoir fait mon travail. J’ai plaqué mes runs, c’est tout ce qui compte.”

Le tout, avec les yeux déjà rivés sur Pékin, pour la prochaine échéance olympique, dans 4 ans. Où Pat Burgener visera une médaille. “Avec des performances comme celle d’aujourd’hui, il gagne en confiance, s’est réjoui l’entraîneur helvétique Pepe Regazzi. Le travail, il y en a encore. Pour le moment, au niveau de la hauteur, de la propreté et de ses figures, c’est déjà un incroyable niveau. La différence, il la fera avec des tricks encore meilleurs.”

 

 

Laurent Morel, PyeongChang