Dans le ciel de Laponie, les aurores boréales dansent aussi gracieusement que Michelle Gisin virevolte dans les piquets de slalom. Dans les dessins célestes, l’Obwaldienne contemple ses desseins de grandeur au moment d’aborder sa 13e saison sur le front de la Coupe du monde. Et la double championne olympique se veut ambitieuse. « J’aimerais jouer le général et le grand Globe de cristal. Ce n’est pas un objectif, mais un rêve », assure, dans un grand sourire, celle qui vient de se fiancer l’été dernier avec le géantiste italien Luca de Aliprandini. « Si tu es dans le top 5, que tu as le momentum en ta faveur, tout est possible. Mais il faut évidemment un peu de chance et être prête à la saisir. »
Pour se galvaniser, Michelle Gisin se remémore sa formidable saison 2020-2021. Sur un circuit amputé de ses fans après la pandémie mondiale, la skieuse d’Engelberg avait tutoyé les sommets pour terminer au 3e rang du général derrière Petra Vlhová et Lara Gut-Behrami. « Terminer juste derrière ces deux athlètes représente l’un des plus beau accomplissements de ma carrière. » Cette saison, Michelle Gisin se retrouvera à nouveau face à la Slovaque, qui doit cependant retrouver son meilleur niveau après une grosse blessure au genou, à la Tessinoise, tenante du gros Globe, mais également face à la skieuse de tous les records Mikaela Shiffrin et à Federica Brignone, brillante lauréate du géant de Sölden. « Ce sont des athlètes qui sont extrêmement fortes dans trois disciplines. Elles y skient encore plus fort que moi. C’est la raison pour laquelle je me dois d’être performante dans quatre. »
Être performante dans les quatre disciplines
Une fois encore, la skieuse aux 268 départs en Coupe du monde s’alignera, normalement, sur toutes les compétitions de l’hiver. « J’aimerais faire les choses à 100% », concède cette bête de course, qui n’arrive « pas à pousser à l’entraînement » contrairement au moment où elle se retrouve avec un dossard sur le dos. Descente, super-G, géant et slalom, la petite soeur de Marc et Dominique a les moyens de ses ambitions. « Il est difficile à dire dans quelle discipline je suis la plus forte. » Pour appuyer ses propos, elle prend en exemple ses statistiques qui rappellent qu’elle a déjà terminé 4e tant en super-G (2017-2018), en géant (2020-2021), qu’en slalom (2020-2021 et 2023-2024), sans être non plus en reste en descente puisqu’elle avait conclu sa saison 2017-2018 au 6e rang. « L’objectif est d’assembler toutes les pièces, de retrouver mon niveau de 2020 et être au max dans toutes les disciplines. »
Et Michelle Gisin a mis toutes les chances de son côtés. Elle sort d’une excellente préparation physique estivale. « J’ai fait un grand pas en avant par rapport à l’année dernière et j’ai le sentiment d’être comme avant ma mononucléose, voire même mieux. » Oublié les déboires de la maladie qui l’a fortement handicapée lors de la saison 2021-2022, malgré un titre olympique en combiné à Pékin et une 5e place au général, et l’apprivoisement compliqué de ses nouveaux skis Salomon, une année plus tard. « Le matériel va extrêmement bien. Je peux m’appuyer sur une belle base. Il ne manque plus qu’à emmagasiner de la confiance », sourit celle qui est mue « par la passion de la course ».
Sur les skis à Crans-Montana en 2027?
Elle le certifie sans détour, elle a « toujours le feu », près de douze ans après sa première apparition sur le circuit lors d’un slalom à Semmering. « Je suis maintenant la maman, même la grand-maman du groupe », se marre-t-elle en honorant son rôle de modèle auprès de la relève helvétique. « J’adore être disponible pour les jeunes, les aider avec mon expérience. Et elles m’aident également, je peux prendre de nouveaux inputs et de l’énergie positive. » D’ailleurs, Michelle Gisin n’est plus aussi affirmative lorsqu’on lui demande si les Championnats du monde de Saalbach en février prochain seront ses derniers. « Je ne peux pas le dire maintenant. On verra si je laisse ouvert pour 2027 », continue l’ambassadrice des Mondiaux qui se dérouleront à Crans-Montana dans deux ans et demi. « Ce sera très très très difficile, mais je serai impliquée d’une manière ou d’une autre. »
Michelle Gisin n’est de loin pas rassasiée. Et avant de penser aux médailles mondiales et aux Globes de cristal, la skieuse aux 22 podiums sur le Cirque blanc ne serait pas contre ajouter un renne à sa collection de trophées. Mais pour espérer remporter un cervidé samedi, il faudra danser vite, très vite entre les piquets du slalom de Levi.
Johan Tachet, Sölden/Levi