Lucas Pinheiro Braathen sera le premier skieur brésilien à se lancer dans une épreuve de Coupe du monde ce week-end. Un an après sa retraite surprise, et après avoir monté sa propre équipe, il vise à nouveau le podium et espère enflammer toute une nation pour le ski alpin.

Lucas Pinheiro Braathen est de retour! Aux couleurs du Brésil et à la tête d’une plus petite équipe, privée et autofinancée. Mais avec une plus grande liberté de mouvement et avec le sourire retrouvé. Et ses objectifs ne pourraient être plus clairs. « À partir de dimanche, je représente 200 millions de Brésiliens en ski alpin. Et je ne vais pas m’arrêter avant d’avoir fait flotter le drapeau de la plus haute marche du podium. »

Il y a un an exactement, ici même à Sölden, le skieur norvégien annonçait en larmes sa retraite du ski, après une dispute avec sa fédération. Puis en mars, le comeback cette fois-ci sous les couleurs du Brésil, le pays de sa maman, avec le slogan « Vamos Dançar ». Le Cirque blanc retrouvait son athlète le plus flamboyant et électrisant, un skieur qui se plaît tout autant à un défilé de mode que sur les skis, qui danse la samba dans l’aire d’arrivée, et qui a un style bien à lui.

Et même s’il prendra le départ avec un dossard élevé cette saison – entre 31 et 34 probablement – cela ne change rien à ses objectifs ni à ses chances de gagner, à son avis. « Je ne suis pas revenu au sport pour faire autre chose qu’être le meilleur. Je respecte le processus avec les dossards, mais je sais ce dont je suis capable », insiste Lucas Pinheiro Braathen. Et de réitérer: « Je ne vais pas m’arrêter avant d’être monté sur la plus haute marche du podium. »

Une équipe soudée

La différence cet hiver, c’est qu’il peut organiser sa saison lui-même, sans devoir consulter personne ni s’accorder avec une énorme fédération nationale. Il est aussi entouré d’une équipe sélectionnée avec soin. Et pas des moindres. À ses côtés, on retrouve Mike Pircher, ancien entraîneur de Marcel Hirscher; Kurt Kothbauer, le préparateur physique de Marco Odermatt jusqu’à la saison dernière; et Charlie Raposo, ancien skieur de Coupe du monde qui s’occupe maintenant de son image. Tout ce petit monde est supervisé par son père Bjørn Braathen, un personnage clé qui l’a toujours encouragé à nager à contre courant.

« Pour être le meilleur, il faut oser faire les choses différemment », a insisté le skieur de 24 ans jeudi à Sölden. C’est d’ailleurs la philosophie principale de « Team Pinheiro ». « J’ai passé la plus grande partie de ma vie à essayer de faire plaisir aux gens autour de moi, à essayer de faire comme les autres. Et j’ai soumis ma vraie personnalité à cela », a lancé le champion, qui dit prendre exemple sur des idoles comme Dennis Rodman, Steve Jobs ou Ronaldinho. « Je veux être comme eux, je veux inspirer un gamin à l’autre bout de la planète à aller chercher son rêve. Mais je veux faire cela en restant toujours moi-même. »

Du fun et du sérieux

Le premier test aura lieu dimanche sur le glacier du Rettenbach. Même s’il n’est jamais resté loin du Cirque blanc, Lucas Pinheiro Braathen a tout de même manqué une saison entière en Coupe du monde. Ne faisant plus partie d’une grosse structure nationale, il a aussi eu moins d’occasions de rivaliser avec des athlètes au top pour juger son niveau pendant l’été. Mais ce n’est qu’un inconvénient comparé à tous les avantages qu’il a gagnés avec son équipe privée, dit celui qui se décrit comme un « showman » et insiste que le ski n’est pas que du sport, mais aussi du divertissement.

D’ailleurs, Team Pinheiro ne s’est pas contenté d’un lieu quelconque pour sa conférence de presse jeudi: les journalistes étaient conviés au Ice Q, un restaurant d’altitude, tout de verre et de métal, qui a figuré dans le film de James Bond « 007 Spectre ». Lucas Pinheiro Braathen ne fait rien sans style.

Un podium peut-être cette saison

Du côté de son entourage, on reste prudent quant à ce que l’on peut attendre de cette saison. « Sa forme est à la hausse. Nous sommes contents des progrès qu’il fait, il lui manque la régularité sur deux manches de course. Mais s’il y arrive, on peut s’attendre à de bons résultats », a assuré Mike Pircher.

Mais évidemment, son absence du circuit pendant une saison entière a eu ses conséquences. « Il a perdu un peu de sa forme », selon l’ancien entraîneur des Autrichiens. L’objectif, dans un premier temps, sera donc de se qualifier pour la 2e manche en slalom ou en géant. « Nous sommes dans une phase de développement, cela va prendre un peu de temps. Sölden, c’est le début de la saison, le voyage ne fait que commencer. » Mais à ce rythme, « un podium devrait être possible encore cette saison ».

Faire connaître le ski au Brésil

La fédération brésilienne, quant à elle, est complètement décontractée. Une attitude presque insolite comparée à des fédérations de pays alpins comme la Suisse, l’Autriche ou la Norvège. « On lui souhaite d’être heureux et qu’il revienne au même niveau où il était il y a deux ans », a confié Gustavo Haidar, directeur sportif de la fédération des sports de neige brésilienne, à SkiActu. « Ce qui est beau c’est de pouvoir lui donner de la liberté et de la flexibilité sans pousser pour une médaille. »

La fédération bresilienne, qui soutient en partie Team Pinheiro financièrement, se réjouit déjà de l’interêt que son champion suscite. « Les médias brésiliens en parlent un peu plus, mais on s’attend à plus de couverture à partir de maintenant. » Dans un premier temps, les courses de Coupe du monde seront diffusées en direct sur le site Youtube du comité olympique brésilien, mais des discussions sont en cours pour des retransmissions à la télévision.

Lucas Pinheiro Braathen n’est pas loin d’accomplir son premier objectif, de partager sa joie du ski bien au delà de l’Europe.

Sim Sim Wissgott, Sölden