Quatre mois et demi après l’annonce choc qu’il mettait fin à sa carrière, le skieur norvégien Lucas Braathen est de retour. Mais pour le Brésil. Il s’est confié sur les challenges qui l’attendent, son nouveau sentiment de liberté et le besoin de suivre ses rêves. Entretien.

Look stylé mais décontracté, un bonnet de son sponsor sur ses boucles et un cardigan d’un vert éclatant, comme le drapeau du Brésil qu’il va dorénavant représenter: Lucas Braathen – “Pinheiro” pour ses fans – rayonnait en annonçant son retour au ski jeudi à Salzbourg. Une image bien éloignée de celle d’il y a quatre mois et demi à Sölden, lorsqu’il avait annoncé sa retraite, les larmes aux yeux et des tremblements dans la voix.

Le skieur de 23 ans, qui a toujours aimé pousser les limites et défier les conventions, troque dorénavant la grosse machine norvégienne pour une petite structure privée aux cadences de samba sous le slogan “Vamos dançar”. Dans le décor brillant et presque futuriste du fameux Hangar-7 de Red Bull, entouré de modèles de Formule 1, de fuselages étincelants et de motos ultra-performantes, le charismatique champion a évoqué au micro de SkiActu ses projets d’avenir, ce qui l’a décidé à revenir en Coupe du monde et ce que jouer au foot dans les rues de São Paulo a à faire avec le ski alpin.

Qu’est ce qui vous a décidé à revenir au ski après avoir annoncé votre retraite il n’y a pas si longtemps?

Lorsque je suis allé voir mes sponsors en octobre pour leur dire que je comptais arrêter, ils m’ont tout de suite dit qu’ils me soutiendraient si jamais je voulais revenir. À l’époque, je n’y pensais pas du tout, un comeback me semblait fantaisiste. Mais au cours de la saison, c’est devenu de plus en plus difficile de regarder une course de Coupe du monde sans y être. En janvier, j’ai soudain ressenti ce besoin de savoir si un retour serait possible. J’ai découvert que oui et que j’aurais le soutien nécessaire pour commencer ce projet. J’ai réalisé alors que c’était ma chance de pratiquer ce sport que j’aime, tout en travaillant vers mon plus grand objectif, qui est de transcender le sport en exprimant qui je suis. À partir de là, il n’y a plus eu de doute dans ma tête que c’était ce que je devais faire.

Comment vous sentez-vous maintenant après cette décision?

Je me sens soulagé! J’ai l’impression d’être revenu à la maison, je suis chez moi. Un facteur dans ma décision était ce sentiment que je n’en avais pas encore fini avec le Cirque blanc. Je sens que c’est la bonne décision, même si cela m’angoisse un peu quand je pense aux objectifs que je me suis fixés, en terme de résultats mais aussi les changements que je veux apporter au sport. Mais aucune grande ambition n’a jamais été facile.

Vous vous êtes plaint que la structure norvégienne était trop rigide. Vous sentez-vous plus libre maintenant?

Oui, c’est ce qui m’a permis de revenir au sport. Je n’aurais pas pu revenir si je n’avais pas eu la liberté qui m’est maintenant accordée et qui me permet de réaliser mes rêves et de vraiment m’exprimer. J’espère que cela encouragera d’autres personnes à suivre des rêves qui leur paraissent farfelus ou impossibles parce qu’ils ne se sentent pas acceptés.

Vous allez maintenant représenter le Brésil, le pays de votre maman, en Coupe du monde. Qu’est-ce que cela signifie pour vous?

C’est énorme. Mon amour du sport est né au Brésil, dans les rues de São Paulo en jouant au foot avec mes amis, mes voisins, ma famille. J’ai toujours voulu injecter cette atmosphère et cette sensation que j’ai eu comme enfant jouant au foot dans la rue, dans l’univers diamétralement opposé du ski alpin. Maintenant, représenter 200 millions de gens, et porter ce drapeau sur mes épaules en Coupe du monde, aux Championnats du monde et je l’espère aussi aux Jeux olympiques, ce sera un honneur.

Avez-vous eu l’occasion de vous entraîner ces derniers mois? Comment comptez-vous être prêt pour la nouvelle saison de Coupe du monde en octobre?

J’ai passé un peu de temps sur les pistes cet hiver à développer et tester des skis avec mon équipementier Atomic. Mais en termes de volume, c’est clair que ce n’est pas comparable à mes collègues de Coupe du monde et que j’ai beaucoup de rattrapage à faire. Je sais que je ne peux pas simplement revenir au niveau où j’étais la saison dernière, lorsque j’ai remporté le Globe du slalom, sans y mettre beaucoup de travail. Cela va être un énorme challenge et je ne sais pas comment je vais atteindre les objectifs que je me suis fixés, mais je suis confiant de pouvoir y arriver. Sinon, je ne serais pas ici aujourd’hui.

Quels sont donc vos objectifs immédiats pour la saison à venir?

Je veux revenir à un niveau où je peux aller chercher des podiums et des victoires dans les disciplines techniques. Et ensuite, il y a les Championnats du monde et la possibilité de hisser le drapeau brésilien sur le podium cette saison… C’est ambitieux et cela va être difficile, mais ce serait un mensonge de dire que ce n’est pas mon but.

Sim Sim Wissgott, Salzbourg