Une descente de Coupe du monde entre Zermatt et Cervinia en ouverture de saison de vitesse de Coupe du monde en 2023? L’idée se précise. Au pied du Cervin, l’organisation italo-suisse poursuit son travail dans le but de créer l’événement. Sur le terrain, Didier Défago est l’architecte de la piste dont le départ de la descente masculine serait donné à Gobba di Rollin (3899 m d’altitude), en Suisse, et l’arrivée tracée à Laghi Cime Banche (2814 m), en Italie. Le champion olympique de descente analyse l’avancée du projet.

Didier Défago, peut-on considérer que le projet d’une descente de Coupe du monde est à bout touchant?

Oui, car la piste est dessinée et l’avancement du projet suit son cours. Les modifications de terrain demandées hors-glacier du côté de Cervinia ont été délivrées au début de l’été. Et nous avons attaqué mi-juillet les travaux qui se termineront cet automne. La partie glacier sera adaptée l’été prochain. Je ne vois que des aspects positifs et innovants entre deux pays. Le ski a besoin de ce genre de défi. Ce genre de projet se déroule déjà dans d’autres sports, à l’image de l’Euro en football. Ensuite, il existe un opening à Sölden, mais pour les techniciens fin octobre. Pourquoi les spécialistes de vitesse n’auraient pas le droit au leur fin octobre, début novembre? A cette période de l’année, aucune autre station n’est capable d’organiser un tel événement.

Il existe toutefois certaines contraintes à mettre sur pied une descente sur un glacier?

Comme partout, la plus grosse contrainte est la météo d’un point de vue purement organisationnelle. Nous avons la chance d’avoir de la neige garantie à cette période de l’année. D’un point de vue sportif, les contraintes sont surtout athlétiques pour les athlètes, car le départ est donné à près de 4000 mètres. Mais les skieurs en ont l’habitude, car l’altitude est déjà élevée à Beaver Creek (ndlr: dans la station du Colorado le départ se situe à 3483 mètres). Physiquement, c’est toutefois très demandeur pour un début de saison.

D’autant plus que cette descente sera la plus longue jamais skiée?

Nous serons à peu près à la même longueur que la descente de Wengen, entre 4,2 et 4,3 km, pour presque 1000 mètres de dénivelé. Nous devrions avoisiner les 2’30-2’40 de course.

Pour une telle longueur, 1000 mètres de dénivelé paraissent peu…

La descente de Kitzbühel ne fait « que » 800 mètres de dénivelé… Mais il est vrai que cette descente aura 40 secondes de course supplémentaire et il ne faut pas oublier que ce n’est pas la plus longue descente qui crée une bonne descente. Il faut plusieurs ingrédients que nous voulons mettre en place.

Pour le coup, en tant que concepteur de la piste, qu’avez-vous concocté aux descendeurs?

Sur le haut, nous nous trouvons sur une partie super-G avec une grande courbe qui amène au départ de la descente dames avec gros saut, suivi d’une traverse. C’est une partie assez raide qui va lancer un passage rapide où j’espère les skieurs arriveront avec de très hautes vitesse. S’ensuivra une partie de glisse avec le passage de la frontière où l’on parle d’une quinzaine de secondes de glisse pure environ. Puis nous retrouvons une section super-G où on va chercher le relief de la montagne sur le côté pour suivre le flanc de la montagne. Ensuite, nous avons un nouveau passage à haute vitesse avec des vitesse devant atteindre les 130 km/h, avant un section plus douce. Je souhaitais créer une part partie rock&roll en utilisant les mouvement de terrain sur la fin de parcours. Là, nous allons quitter la piste sur quelques dizaines de mètres, pour créer deux gros sauts, à l’image de ce qu’il se fait à Beaver Creek, où il faut être capable d’être bon dans les airs tout en épousant le terrain. Au final, ce sera une descente très complète.

Restent les questions logistiques. Où seront logés les athlètes? En Italie ou en Suisse?

Mon job est de concevoir la piste. Le côté logistique, ce sont les deux fédérations suisse et italienne qui doivent le mettre en place avec le comité d’organisation de Zermatt et de Cervinia-Aoste. Les personnes en place sont compétentes. Et ces questions vont se résoudre avec le temps.

On évoque donc des premières descentes de Coupe du monde en octobre-novembre 2023. Le délai pour 2022 paraît trop serré?

Nous serons prêts en octobre 2022 mais pour organiser des courses de niveau inférieur avant des compétitions de Coupe du monde en 2023. Il est nécessaire dans un premier temps de voir comment les athlètes se comportent sur la piste, et permettre aussi aux organisateurs d’évaluer le niveau logistique. Mais le travail suit toujours son cours. La FIS, tout comme les fédérations suisse et italienne, ainsi que les régions concernées, nous soutiennent.

Johan Tachet/LMO