Cette fois, ce ne sont pas des larmes d’émotion qui inondent le visage de Mikaela Shiffrin mais bien un immense sourire. Car depuis hier, dans l’aire d’arrivée de l’Eclipse, la skieuse de Vail a retrouvé la lumière. Deux ans après le décès accidentel de son père duquel elle était extrêmement proche, l’Américaine est à nouveau au sommet du ski mondial puisqu’elle s’est assurée ce jeudi le gain d’un quatrième gros Globe de cristal, égalant sa compatriote Lindsey Vonn. Sa rivale Petra Vlhova ne peut plus la rattraper.

Après avoir cédé son bien aux méritantes Federica Brignone et Petra Vlhova, Mikaela Shiffrin est donc de retour aux affaires, grâce notamment à deux épreuves de vitesse parfaitement gérées lors de finales de Courchevel. Au lendemain de sa surprenante victoire en descente, l’athlète de 27 ans a confirmé en prenant la 2e place du super-G, à seulement 0″05 de la gagnante Ragnhild Mowinckel. “Hier, je suis restée sans voix parce que je ne suis pas censée gagner des descentes, souriait la skieuse aux 120 podiums de Coupe du monde. J’ai vécu deux jours merveilleux.”

De quoi effacer en partie la grosse déception des Jeux olympiques de Pékin, d’où elle est repartie les mains vides. “C’est mon Globe le plus improbables, relève ainsi la championne. Il me paraissait impossible à décrocher, notamment car j’ai fait plusieurs impasses durant l’hiver. En plus, j’ai dû m’isoler durant dix jours autour du passage à la nouvelle année en raison du Covid-19, ce que mes principales rivales n’ont pas eu à subir. Mais je suis vraiment fière de ce trophée, qui récompense toute mon équipe.”

La place d’Aleksander Aamodt Kilde

Son clan s’est agrandi au cours de la dernière intersaison avec l’arrivée d’un compagnon pour le moins expérimenté en la personne d’Aleksander Aamodt Kilde. Le Norvégien, qui vient lui de décrocher les Globes de descente et de super-G lui apporte la stabilité et la maturité qu’elle avait peut-être perdu avec la disparition de son père. “On parle beaucoup de ski, confiait-elle mercredi après sa 3e victoire en descente. C’est facile pour moi de comprendre ce qu’il dit.”

Et la manière dont ils se dépêchent de se sauter dans les bras l’un de l’autre et de s’embrasser à chaque arrivée prouve la complicité qui lie désormais le couple le plus glamour du Cirque blanc. Et le Norvégien, lui aussi bourreau de travail, semble aussi avoir trouvé sa place auprès de la famille de l’Américaine. Il partageait en tout cas le bonheur d’Eileen Shiffrin, la mère de Mikaela, au moment où celle-ci enchaînait les interviews après son sacre ce jeudi.

Dans les bras de son amoureux Aleksander Aamodt Kilde, Mikaela Shiffrin a retrouvé la sérénité. (Alexis Boichard/Zoom)

C’est aussi grâce à ces bases solides que Mikaela Shiffrin a pu retrouver les sommets. “Toute ma saison a été faite de hauts et de bas. Et mes bas ont été très très bas, j’ai vécu certains des moments les plus difficiles de ma carrière, de ma vie, reconnaît-elle. Chaque fois que je vis un moment difficile, ça me rappelle d’autres moments difficiles et ça me met dans un tel état que j’ai juste envie de rentrer chez moi. J’ai encore ressenti ça il y a cinq jours, comme aux Jeux olympiques. C’est donc incroyable dans ces conditions d’atteindre mon objectif principal de l’hiver.”


Petra Vlhova: “Parfois tu gagnes, parfois tu perds”

Très fairplay, Petra Vlhova n’était pas trop déçue de céder son Globe de cristal à Mikaela Shiffrin, non sans avoir combattu. La championne olympique de slalom gardera surtout le positif de sa saison.

Que retenez-vous de ces deux derniers jours?

J’ai essayé de tout donner, mais Mikaela a réussi deux jours extraordinaires. Bien sûr, je suis contente pour elle. Elle confirme qu’elle est la meilleure en ce moment. C’est pour ça qu’elle gagne le général. On a décidé après les Jeux olympiques qu’on allait tenter de se battre pour le général. On a essayé mais… c’est comme ça, c’est le sport. Parfois tu gagnes, parfois tu perds.

C’est surprenant de retrouver Mikaela devant en vitesse?

Oui, en quelque sorte. Après les Jeux, beaucoup de gens ont commencé à dire qu’elle n’était pas si forte mais elle est revenue, comme une vraie championne. Pour gagner une descente, il faut skier parfaitement. Elle l’a fait.

Vous avez choisi de vous concentrer sur la technique cette saison. C’était le bon choix?

Je n’ai aucun regret. Après la saison dernière, j’avais besoin de faire un pas en retrait. J’étais fatiguée et j’avais perdu la flamme. Je suis en accord avec cette décision qu’on a prise avant la saison. On a rempli tous les objectifs qu’on s’était fixés avant la saison alors on est plus que contents.

Pensez-vous changer quelque chose pour la saison prochaine?

Oh là! Je ne pense pas à ça pour le moment. C’est difficile de dire ce que je vais faire. Je dois me reposer et réfléchir. J’ai réussi tout ce que j’ai voulu. Là, je dois me reposer, retrouver la motivation. Ensuite je déciderai avec mon équipe. Mais en ce moment, je n’en sais rien.

Laurent Morel, Courchevel