Lundi matin, Philippe May ne prend pas la peine de souffler. Après onze heures de route pour revenir d’Andorre où se déroulaient les finales de la Coupe du monde de ski de vitesse, le Directeur de l’Ecole suisse de ski de Verbier est déjà en train de régler les affaires courantes au bureau.

A 48 ans, le colosse valaisan est toujours un homme pressé et surtout compétitif. Dix-sept années après avoir conquis le Globe de cristal de la spécialité, Philippe May régate toujours avec les stars mondiales du ski de vitesse. Pour conclure une saison “difficile” de son propre aveu, il prend la 4e place à Grandvalira en étant flashé à 180,66 km/h sur une piste extrême et bosselée où les chutes, pourtant rares dans la discipline, ont été spectaculaires.

L’expérience d’un sage et le physique d’un jeune premier

Entre la satisfaction d’une performance de choix et le soulagement de montrer que le “papy” est aussi rapide qu’il y une décennie dans sa combinaison rouge profilée, se mêle la déception du compétiteur d’avoir manqué un 37epodium en Coupe du monde d’un rien. “Je fais une faute conséquente lors de mon run final qui me coûte la 3eplace. Mais terminer 4e, quand tous les gars du top 10 sont professionnels dans le milieu, c’est super”, analyse le Bagnard qui était devenu l’hiver dernier  le plus vieux vainqueur d’une épreuve Coupe du monde FIS, tout sport de neige confondu.

Philippe May prouve, malgré les années qui passent et la concurrence toujours plus conséquente, qu’il reste une bête de compétition. “Chaque saison, les autres athlètes sont surpris de me voir aussi performant, mais personnellement je ne le suis pas. J’ai l’expérience et physiquement, peu de gens s’investissent autant que moi. C’est gratifiant”, poursuit l’homme qui cible désormais ses rendez-vous durant l’hiver. “Mon seul handicap est de ne pas avoir autant de kilomètres que les autres skieurs.” Cette saison, outre les finales d’Andorre, Philippe May a également participé aux Mondiaux de Vars, où, affaibli par un virus – “J’ai perdu 4 kilos durant cette semaine-là”, il était tout de même parvenu à accrocher un top 10.

Un podium en Coupe du monde à 50 ans?

Et tant qu’il sera compétitif, la fusée de Versegères n’est pas près de ranger ses skis supersoniques, lui qui se plaît à défier les lois de la gravité sur ses lattes souvent à plus de 200 km/h. “Chaque année, j’ai cette crainte, de me prendre une claque, de faire la course de trop, car je n’ai pas envie de finir sur une note négative.” Dans un coin de la tête, Philippe May rêve secrètement d’un podium en Coupe du monde à 50 ans, âge qu’il aura dans deux hiver. “Ce serait la cerise sur le gâteau.”

1400 km à vélo et sans escale pour ne pas rouiller la machine

L’indestructible machine bagnarde ne s’arrête jamais. Qu’importe la pose d’un défibrillateur cardiaque il y a cinq ans, Philippe May est drogué à la performance et au sport. Le voici déjà depuis quelques mois sur son vélo à préparer son défi estival: la RAW (Race Accross West). Une course cycliste en solitaire et sans escale sur plus de 1400 kilomètres disputée sous le cagnard – à plus de 40° – de l’Ouest américain. “Cela me pousse à avoir une véritable discipline tout au long de l’hiver.”

Cette compétition, le Valaisan ne l’a encore jamais terminée en deux tentatives. En homme de défi, il compte bien enfin parachever son objectif,  se plaisant à “sortir de ma zone de confort”, afin de se surpasser. Plus haut, plus vite, plus loin, plus fort.

Johan Tachet