C’est l’histoire d’une Gruérienne qui vient tout juste de fêter ses 18 ans, il y a 10 jours, et à qui tout réussi. Certes, Mathilde Gremaud est passée par des phases extrêmement compliquées ces derniers mois, mais la retrouver sur le podium olympique vient couronner le travail acharné de cette passionnée de ski. Et lorsqu’on sait que la championne de La Berra est une véritable surdouée, sa médaille d’argent juste derrière sa “grande soeur” comme elle présente Sarah Höfflin est tout sauf un hasard.

“Elle est juste incroyable, prévient justement la nouvelle championne olympique de slopestyle (27 ans). Tout ce qu’elle a fait pour revenir de sa blessure à temps est très impressionnant.” Opérée du ligament croisé antérieur du genou droit au printemps dernier, Mathilde Gremaud a en effet gagné sa course contre-la-montre. “Cette médaille est une récompense pour tout le boulot que j’ai effectué pour revenir, lâche la nouvelle vice-championne olympique. Elle l’est également pour tous ceux qui m’ont supportée et aidée durant cette période. Cette médaille d’argent a la valeur de l’or, de 3, 4, 5 médailles d’or même.” Pourtant, elle a encore failli tout perdre à la veille de l’épreuve olympique.

Les sirènes dans l’ambulance

A l’entraînement, la vainqueur du Big Air X Games en Norvège en 2017 est en effet tombée d’un rail et s’est tapé la tête contre le sol, sans perdre conscience. “Je ne peux pas vous en dire plus, je ne me rappelle de rien, avouait-elle sans détour après la compétition. On m’a montré une vidéo. Je sais que je pleurais, c’est tout.” Après sa mésaventure, aucun risque n’a été pris avec sa santé. “J’ai été transportée à l’hôpital en ambulance et j’ai même eu droit aux sirènes, sourit-elle. Je ne souffrais pas. J’avais un léger mal de tête mais rien de grave.”

Cependant, pas question pour le staff de Swiss Ski de la laisser participer si le diagnostic d’une commotion cérébrale ne pouvait être écarté. Dans ce dernier cas, 6 à 7 jours de pause au minimum auraient été nécessaires. Un examen au scanner a donc été pratiqué dans l’établissement traumatologie dans la ville de Wonju, à quelques dizaines de kilomètres du Phoenix Park. “J’ai encore pratiqué de nombreux examens neurologiques ce matin pour voir si elle avait des maux de tête ou des vomissements notamment”, avouait le médecin de l’équipe German Clénin, qui a finalement donné son feu vert quelques heures avant l’épreuve.

Aucune pression

“J’étais trop contente quand le médecin m’a dit que je pouvais skier ce matin, raconte la native de Fribourg. Et du coup, avec cette mésaventure, je n’avais plus aucune pression. Etre au départ était déjà une victoire.” Elle se réjouissait par ailleurs d’avoir pu retrouver un tel niveau: “C’est bien, j’arrive à skier comme avant ma blessure au genou. Ici, c’était vraiment la plus belle compétition de ma vie, il n’y a rien à changer.”

Mathilde Gremaud n’avait plus disputé de gros concours depuis la fin de saison dernière. Présente aux X Games le mois dernier, elle n’avait pas pris le départ, après concertation avec ses entraîneurs. “C’était la bonne décision, reconnaît-elle. Je n’étais pas prête.” Toujours en gardant les Jeux olympiques dans un coin de la tête, la Gruérienne n’a jamais arrêté de visualiser ses runs. “Durant tout ma période de réhabilitation, j’ai également continué à regarder des vidéos de ski et de mes runs afin de garder un contact avec le sport”, précise-t-elle. Sur les pistes, le compte à rebours pour PyeongChang a commencé à mi-octobre, avec un premier contact avec la neige “pour voir ce qui n’allait pas encore” puis des premières journées en ski libre début décembre avant de se frotter à quelques petites bosses. Le vrai retour dans les snowparks a été effectif au mois de janvier. Avec le résultat qu’on connaît.

Malgré sa performance, la skieuse de La Berra est restée fidèle à elle-même. Ce qui lui a arraché le plus grand sourire était de voir des images de sa famille qui a suivi la compétition depuis chez elle: “Regardez, c’est mon grand-père là, il est génial!”. Il y a aussi le message de félicitations de Roger Federer. Après sa blessure au genou, la Fribourgeoise était si peu sure de pouvoir participer aux Jeux olympiques qu’elle a demandé à ses proches de ne pas venir la soutenir en Corée du Sud. Seule sa marraine, qui était présente dans cette partie du monde à ce moment, est ainsi venue assister à son exploit retentissant.

Laurent Morel, PyeongChang