“Les flèches peuvent partir de toutes les directions.” A la veille du premier slalom de la saison, Matteo Joris, l’entraîneur des slalomeurs suisses, se montrent confiant sur la capacité de briller de sa troupe. On ne peut le nier, à la vue des résultats affichés ces deux dernières saisons, la Suisse possède très certainement l’équipe de slalom la plus homogène et la plus compétitive du circuit. Les huit athlètes au départ ce dimanche ont tous le potentiel pour se classer dans les quinze et, pour certains, la perspective de briguer le podium. Petit tour d’horizon de l’état de forme de chacun.

Daniel Yule: Ne pas penser au Globe

C’est avec le statut de leader de l’équipe de Suisse qu’aborde cette nouvelle saison Daniel Yule. Troisième de la Coupe du monde de slalom l’an dernier et auteur de sa première victoire sur le circuit à Madonna, le skieur du val Ferret se profile comme un sérieux candidat pour la conquête du Globe de cristal de la spécialité après la retraite de Marcel Hirscher. “Personnellement, je ne me considère pas comme un favori”, nuance-t-il. “Du moins, je ne le vois pas comme un  objectif, mais plutôt comme une conséquence. Si avant Levi, je pense au Globe, je n’y arriverais pas. Cela peut paraître cliché mais je me focalise sur une course après l’autre. Lors d’un tournoi de tennis, un joueur ne se projette jamais déjà en finale.”

Le Valaisan se réjouit que les hostilités débutent après sept mois de préparation. “Je crois que j’ai fait le tour à l’entraînement. On s’est fixé des objectifs ce printemps, on y a travaillé dessus et maintenant il y a l’envie de voir si ce qu’on a fait est juste”, explique-t-il avouant qu’il y a davantage de pression à Levi que lors des autres compétitions. “Avant la première course, il y a toujours des inconnues.”

Ramon Zenhäusern: Performer sur toutes les pistes

Daniel Yule ne sera pas le seul candidat helvétique au Globe de cristal en slalom. Ramon Zenhäusern peut légitimement prétendre faire partie de la liste, même si le Haut-Valaisan préfère ne pas trop y penser. “Même si Hirscher n’est plus là, le niveau est extrêmement élevé. Lors de chaque course, entre dix et quinze athlètes peuvent espérer jouer à la victoire.” Le géant de Bürchen, qui a remporté son premier succès en slalom la saison dernière à Kranjska Gora, sait qu’il est désormais capable de skier vite sur toutes les pentes et tous les revêtements. “J’ai désormais l’impression que je suis plus stable, mais j’aimerais continuer à progresser comme je l’ai fait chaque saison. L’hiver passé, je sais que lors de chaque manche, j’avais cinq ou six virages encore imparfaits, j’aimerais encore abaisser ce chiffre cette année.”

Ramon Zenhäusern retrouve dimanche la Black Levi sur laquelle il avait disputé sa première course il y a huit ans. “Je n’ai jamais réellement aimé cette piste, enfin jusqu’à l’année dernière après avoir enfin décroché un bon résultat.” Quatrième il y a douze mois, le Valaisan entend faire tout aussi bien ce week-end pour lancer sa saison.

Loïc Meillard: Gagner en constance

Perturbé par des douleurs musculaires à la hanche depuis cet été qui l’ont gêné à Sölden où il a connu l’élimination, Loïc Meillard se présente dans le portillon de départ de Levi requinqué. “J’ai profité pour m’arrêter complètement pendant une semaine, puis j’ai enchaîné avec de la physio pour me reconstruire petit à petit”, explique le skieur d’Hérémence qui certifie désormais skier sans avoir mal. “Je suis toujours un peu gêné, mais sur les skis je ne sens plus rien, c’est positif.”

D’autant plus que Loïc Meillard fait partie des outsiders pour grimper sur les podiums en slalom cet hiver. “Je vais essayer de repartir sur les mêmes bases qu’en début de saison dernière”, poursuit-il en faisant référence à sa 14e place à Levi, mais surtout à son podium à Saalbach. “Ensuite, je me suis un peu perdu. Je voulais peut-être trop en faire. Cela m’a pris un moment à retrouver ses sensations”, glisse-t-il avec comme objectif “être plus constant” dans les virages courts.

Tanguy Nef: sortir de la zone de confort

Il y a douze mois, Tanguy Nef, pour son premier départ en Coupe du monde, s’est révélé à Levi en prenant la 11e place. Un an plus tard, c’est avec des ambitions légitimes que le Genevois revient en Finlande. “J’aimerais faire encore mieux que l’année dernière. Et c’est envisageable, lorsque je pense que je n’étais qu’à quatre dixièmes du podium.” Le skieur du bout du lac certifie qu’il se trouve toujours “en phase d’apprentissage” au moment d’aborder sa seconde saison sur le Cirque blanc. “Mais je vois cet hiver comme une saison de performance durant laquelle je veux sortir de ma zone de confort et réaliser de gros résultats.” Dans un coin de la tête, Tanguy Nef, qui s’élancera pour la première fois de sa carrière dimanche parmi le top 30, pense au podium. “Ou du moins m’en rapprocher le plus possible. Mais si tout s’aligne, on peut s’attendre à une surprise.”

Pour mettre toutes les chances de son côté, le Genevois a mis entre parenthèses ses études aux Etats-Unis, puisqu’il n’y retournera qu’au mois d’avril après la saison de ski. “Pour moi, c’est une suite logique. Je veux me concentrer sur le ski, me professionnaliser et pouvoir participer à toutes les courses de la saison.”

Luca Aerni: revenir aux avant-postes

“Je me sens frais et léger.” C’est un Luca Aerni retrouvé qui va entamer cette nouvelle saison après un dernier hiver manqué lors duquel il n’a jamais fait mieux que 16e, c’était déjà à Levi, sans oublier qu’il est désormais sorti du top 30 mondial. “J’ai entrepris plusieurs changements qui m’ont permis de me remettre dans le droit chemin.” Il s’est notamment entouré de Patrick Flaction comme préparateur physique et a affiné son matériel. “J’ai l’impression d’être davantage solide. Je me sens joueur sur les skis mais je dois encore oser les lâcher davantage.” Aux entraînements, Luca Aerni réduit l’écart qui le séparait de Daniel Yule et Ramon Zenhäusern l’an dernier. 

Dimanche, Luca Aerni s’élancera avec dossard élevé. “Mon objectif est de retrouver le plus rapidement possible les trente. Avancer dans la starting list et retrouver le top niveau.” Le skieur de Crans-Montana se dit encore trop juste pour aller jouer le podium dans l’immédiat. “Mais si je parviens à skier avec légèreté, je peux revenir devant. Avant tout, je souhaite rentrer dans les 15.”

Marc Rochat: relever la tête

L’hiver 2018-2019 de Marc Rochat? 9 éliminations et une 26e place à Kranjska Gora. Toutefois, tout n’était pas à jeter pour le Vaudois de Crans-Montana. “J’étais quand même rapide, après j’ai manqué les opportunités qui se présentaient à moi. Je n’allais ainsi pas tout changé dans ma préparation car je sais que j’ai ce qu’il faut pour aller chercher les gars qui sont devant moi.” Marc Rochat s’est tout de même entouré d’un nouveau préparateur physique et d’un nouveau coach mental. “Cela m’a fait du bien, je me sens plus mature.”

En ce début de saison, Marc Rochat, qui doit retrouver la confiance en compétition, ne s’attend pas à réaliser des miracles. “J’aimerais pouvoir tirer deux manches et marquer des points. Après, Levi, c’est spécial et ce n’est pas ici que ma saison se déterminera. Mais j’aimerais parvenir à accrocher des résultats probants et faire mon ski.”

Pour être totalement complet, la sélection suisse à Levi comprend également Reto Schmidiger et Sandro Simonet.

Johan Tachet, Levi