Les conditions sont idéales ce samedi à midi, 30 minutes avant le départ de la descente du Lauberhorn. L’un des principaux rendez-vous de l’hiver est dans les starting blocks. Sous un soleil de plomb, sans la moindre nébulosité à l’horizon, la patrouille suisse vient d’effectuer ses acrobaties, impressionnantes en compagnie d’un avion Swiss, enchantant un public venu en nombre.

Les curieux se massent en haut du télésiège Wixi, à l’affût du moindre regard des champions qui vont s’élancer dans quelques minutes pour la plus longue descente de l’hiver. La plus atypique aussi. Les skieurs arrivent au compte-gouttes. Pas question pour la plupart d’entre-eux d’attendre 2 heures dans la zone d’échauffement avant de s’élancer. Surtout qu’ici, les 20 meilleurs partent toutes les 2’40. Un tel écart rallonge évidemment la durée de la course.

Du coup, seuls les plus petits dossards sont déjà dans l’aire de départ. Beat Feuz, qui porte la liquette numéro 1 sur les épaules, règle déjà les derniers détails. Les Norvégiens Aksel Lund Svindal et Kjetil Jansrud, qui partiront avec le 3 et le 5 se mettent à l’écart. Pour eux, c’est le moment de s’habiller en mode course, d’enfiler l’airbag, la combinaison. Après les derniers étirements, les Norvégiens filent voir le passage des premiers concurrents sur l’habituel minuscule écran mis à disposition. Histoire d’étudier les lignes des adversaires. Un grand sourire se lit sur les visages du staff helvétique après la descente du futur vainqueur, même si personne ne veut encore jubiler.

Gilles Roulin: “Avec l’ambiance, j’ai dû m’isoler pour me concentrer”

Grand amateur de hip-hop, Gilles Roulin vient d’arriver dans la zone. Il préfère rester dans sa bulle pour s’échauffer, écouteurs sur les oreilles. “C’était la première fois cette saison que j’ai écouté de la musique, explique le Zurichois, 14e pour sa première descente de Coupe du monde à Wengen. L’ambiance était très spéciale et il y avait beaucoup de bruit. J’ai dû m’isoler pour me concentrer.” Pas question pour lui d’aller analyser les trajectoires de ceux qui partent avant lui. “Je sais ce que je dois faire, explique-t-il. Du coup, j’essaie de faire mon truc de mon côté.”

La plupart des athlètes profitent également des dernières minutes avant de s’élancer pour faire un dernier pipi, sans oublier de saluer les adversaires, qui restent pour la plupart des proches avec qui on partage toute la saison. Certains en profitent pour jeter un oeil au panorama enchanteur du site. Et pour remarquer qu’on peut voir l’aire d’arriver depuis là. Désormais, il faut être à 100% concentré sur la descente. Les dossards légèrement plus élevés commencent à profiter des conseils de leurs coéquipiers déjà en bas. “On a Adri à la radio, venez!” Le staff de l’équipe de France rassemble ses troupes. Il est important d’écouter les conseils d’Adrien Théaux, parti avec le dossard 13.

Conseils basiques à la radio, pour rassurer

“Entre Français, on se donne des renseignements , c’est clair, relève le skieur de Val Thorens. Ça reste les meilleurs infos, car on a le ressenti de la piste, de la neige.” Avant la descente de Wengen, Adrien Théaux a précisés les quelques spécificités du jour sur un piste bien connue par ses compatriotes. “Je leur ai uniquement précisé aujourd’hui que la neige était extrêmement bonne à skier, précise-t-il. Elle est légèrement plus dure qu’aux entraînements. Je sais que c’est rassurant à entendre.”

Comme pour Gilles Roulin, la préparation dépend de l’épreuve. “Des fois je regarde les autres sur l’écran, d’autres fois non, raconte le médaillé de bronze en super-G aux Mondiaux de Beaver Creek en 2015. En super-G, je regarde quelques dossards, je sélectionne ceux que je veux voir descendre mais en descente, je regarde uniquement le temps d’arrivée des premiers pour savoir si ça va plus vite qu’aux entraînements. Si ce n’est pas le cas, je sais ce que j’ai à faire. On connaît la descente par coeur donc il n’y a pas forcément grand-chose à regarder.” Le Français souligne par contre l’importance des informations données par les entraîneurs placés au long de la piste.

Quelques instants plus tard, il est temps de s’avancer dans le portillon de départ pour Maxence Muzaton et Cie. La clameur des dizaines de milliers de spectateurs se fait entendre. Mais il faut y aller. Histoire d’aller braver une nouvelle fois le mythique Lauberhorn.

Textes et photos: Laurent Morel