Dans l’aire d’arrivée glaciale du snowpark de Secret Garden, le drapeau suisse flotte de toutes ses forces sur les épaules de Ryan Regez et Alex Fiva. D’ailleurs, les épaules des deux athlètes ont été solides pour offrir à la Suisse un incroyable doublé lors du skicross olympique. « Je ne réalise vraiment pas ce que nous venons de faire », savoure le nouveau champion olympique de la discipline, Ryan Regez.
Sur le parcours chinois, le skieur de Wengen était bel et bien le plus fort, le plus agile et le plus intelligent. Hormis sa demi-finale où il a pris la 2e place, Ryan Regez a dominé l’ensemble de la journée, des qualifications à la finale, réussissant des départs à chaque fois canon. « Je n’ai pas forcément le meilleur temps de réaction, mais je suis grand et mon poids est sûrement un avantage », se marre-t-il.
Face à la pression, Ryan Regez a compris qu’il pouvait perdre pour gagner
Une journée de rêve pour le Bernois qui a pourtant senti l’énorme pression qui pesait sur ses spatules depuis plusieurs jours. Il est vrai que Ryan Regez, après son double succès à Idre Fjäll (SWE) avant les Jeux, était particulièrement attendu. « Tout le monde espérait que je gagne quelque chose. Depuis le début de la semaine, j’étais tendu et nerveux. »
Durant les entraînements, le Bernois peinait à avancer sur skis. Bileux de nature, ce genre de petits détails lui font inévitablement augmenter son stress qu’il peine souvent à gérer. Alors pour se rassurer, il a appelé ses amis en Suisse, mais surtout il a énormément échangé avec ses entraîneurs, et notamment Mike Schmid, le champion olympique de 2010 qui se trouve également être son idole de jeunesse. « Son expérience m’aide énormément. Son implication et son calme ont été précieux », remercie-t-il.
Car ce vendredi, Ryan Regez ne ressentait « plus aucune pression » au moment de monter sur le télésiège pour rejoindre la cabane de départ. « Il a fallu trouver les mots justes pour le rassurer », souligne l’entraîneur en chef de l’équipe de Suisse Ralph Pfäffli. « Comme il s’agissait de ses premiers Jeux, on l’a préparé à la pression, aux médias. Nous savions que Ryan figurait parmi les meilleurs, mais nous devions le calmer. » Pour ce faire, les coaches helvétiques ne l’ont pas préparé mentalement à gagner, mais… à perdre. « Il devait comprendre que tout pouvait s’arrêter après un run. Si on accepte la défaite, on peut aussi gagner. Et c’est ainsi qu’il a pu sortir son meilleur ski. »
Ryan Regez, le nouvel homme fort des grands rendez-vous
Ryan Regez était tout simplement imbattable. Alex Fiva n’a vu que le dos de son compatriote en finale. Mais le Grison se contente avec plaisir de l’argent, d’autant plus dans une discipline aussi relevée que le skicross. « Franchement, les 32 skieurs au départ avaient le potentiel de remporter une médaille. Et sortir la bonne course le jour-J est tout un art. »
Un art que le skieur de Parpan cultive désormais dans les grands rendez-vous. « Au début de ma carrière, on me disait que j’étais seulement bon en Coupe du monde et que je n’avais pas les nerfs quand ça comptait vraiment. Maintenant c’est le contraire », sourit celui qui a dû attendre d’avoir 35 ans pour être sacré champion du monde l’hiver dernier, avant de décrocher la médaille d’argent olympique pour ses troisièmes Jeux olympiques.
Fanny Smith vengée
Pour Ralph Pfäffli, cette performance collective est « une belle récompense » après les événements du skicross féminin qui ont perturbé l’ensemble du groupe helvétique. « Hier soir, lors de la réunion d’équipe, nous tenions à clarifier les choses sur l’histoire de Fanny (Smith), pour que tout tous soient au même point. On s’est dit, maintenant on arrête de parler de cette affaire, on prend toute la déception et la colère avec nous pour aller chercher l’énergie du jour. Et cela a plutôt bien fonctionné. » Fanny Smith est vengée et avec la manière!
Johan Tachet/LMO, Zhangjiakou