Des températures supérieures à 10°C et une couche de neige réduite à peau de chagrin, sur une bande blanche au milieu des pâturages et des forêts. Les conditions n’inspirent guère à la pratique du ski de compétition. Pourtant, la Coupe du monde de ski alpin bat son plein et fait étape à Zagreb et Kranjska Gora pour les dames ainsi qu’à Garmisch-Partenkirchen et Adelboden pour les messieurs. Pas forcément les lieux les plus reconnus pour leur altitude ou les meilleures conditions d’enneigement d’Europe. D’ailleurs, de la neige dans les quatre stations, il n’y en a pas, sauf sur les tracés de course.

Le Cirque blanc fait donc son entrée en 2023 dans la polémique. Car si les organisateurs sont bien contraints de s’adapter à la capricieuse Dame Nature, lancer les différentes courses comme prévu dans le calendrier soulève de nombreuses questions. Le fiasco d’il y a un an à Zagreb avait fait promettre qu’une telle situation ne devait pas se reproduire. Sauf que, précisément, c’est ce qu’il se passe en ce début de mois de janvier.

Le Cirque blanc résigné?

En Croatie, l’or blanc est absent sur la colline de Sljeme et une fine bande a pu être préservée pour lancer les deux courses féminines au programme mercredi et jeudi. L’entraîneur helvétique Christoph Kienzl a lui même dû slalomer entre les trous pour tracer la première manche du premier slalom au programme. En fait, le parcours suit les seules zones de la piste où la couche est suffisante. Le tout a été copieusement arrosé et salé afin de durcir au maximum la manche. En espérant que personne ne se blesse, comme cela a été le cas notamment de Victor Muffat-Jeandet il y a un an…

Sur les hauts de Zagreb, la piste d’échauffement se résume à quelques mètres. Et ce qui inquiète le plus certaines athlètes, c’est que personne ne semble réellement s’émouvoir de cette situation. “La plupart des skieuses et des entraîneurs se disent que bon, puisqu’on est là, il faut skier”, glisse-t-on au sein de certaines structures. En fait, est-on déjà résigné? Pense-t-on déjà aux années futures, lorsqu’il faudra probablement s’adapter à des conditions de plus en plus désastreuses?

Il s’agit peut-être plus d’une question d’assurances souscrites par les stations organisatrices des compétitions de Coupe du monde. Si la course avait été annulée à Adelboden dès la semaine dernière lors du “snow control”, la station de l’Oberland bernois n’aurait reçu aucun dédommagement de la part de son assureur, selon nos informations. À Zagreb, l’an dernier, les organisateurs de la capitale croate n’avait pas estimé raisonnable de prendre une assurance en cas d’annulation. L’argent, donc, reste le nerf de la guerre.

Chaque année, c’est la même problématique à Zagreb. (Anze Marlovh/Zoom)

Une reconnaissance pour le moins particulière en Bavière?

Niveau neige, la capitale croate n’est pas le seul site qui se retrouve en situation précaire. Le slalom masculin de Garmisch-Partenkirchen de ce mercredi était en sursis jusqu’à la dernière minute. Il faut dire que les températures montent jusqu’à 10°C en Bavière, où il a beaucoup plu ces derniers jours. Là aussi, une bande d’or blanc serpente la pente du Gudiberg. Pour combien de skieurs la piste tiendra-t-elle? Pour la préserver au mieux, les athlètes ont dû effectuer la reconnaissance du tracé de la première manche… sans aller sur le parcours en soi. Une barrière les empêchait de s’approcher à moins de 6 mètres des portes. Ce matin, à chaque fois qu’un pisteur traversait la piste, celle-ci marquait sous ses pas.

Des températures légèrement plus fraîches sont annoncées pour les prochains jours en Europe centrale. Cependant, elles passeront rarement sous les 0°C, qui permettent au peu de neige restant de se durcir et dans le meilleur des cas, aux stations de produire des flocons artificiels. Il sera compliqué de disputer des courses mais aussi de trouver des sites d’entraînement.

La Chuenisbärgli privée de son mur final?

Les épreuves masculines d’Adelboden, qui pourraient avoir lieu sous la pluie, n’auront peut-être pas la saveur habituelle mais elles ont donc été confirmées par la FIS. Il se murmure d’ailleurs que le géant de samedi n’empruntera peut-être pas le mur final puisque les organisateurs attendent le dernier moment pour y pousser les quantités de neige qu’ils ont stockées. Car celle-ci fait défaut sur le bas du parcours, dans ce secteur. Et si les athlètes étaient stoppés avant de faire face aux milliers de fans qui vont s’entasser au pied de la piste du Chuenisbärgli?

Même constat pour les courses féminines de Kranjska Gora, située à quelque 800 mètres d’altitude. Et dire que la station slovène remplace déjà régulièrement Maribor, dont les conditions sont largement plus chaudes… Le ski va vers le chaud, mais probablement pas vers le beau.

LMO/JT