Cette fois, c’est fait. Le jour de ses 30 ans, Alexis Pinturault s’est offert le plus beau des cadeaux. En repartant de Lenzerheide dimanche, ses valises seront en effet un peu plus lourdes, avec un gros Globe de cristal à caser. Ce trophée, il court après depuis près de 10 ans. Le Français est entré dans le top 10 des dix derniers classements de la Coupe du monde, tout en montant six fois sur le podium. Longtemps barré par Marcel Hirscher, il avait vu son rêve s’envoler l’hiver dernier, notamment à cause d’une fin de saison anticipée par la pandémie de Covid-19. “Je suis soulagé de savoir qu’on ne va plus me demander quand j’allais être le prochain Français à l’emporter”, a-t-il glissé quelques minutes après sa victoire lors du géant des finales de Lenzerheide. Il s’inscrit désormais dans la lignée de Jean-Claude Killy, Michèle Jacot et Luc Alphand.

“C’est vraiment beaucoup d’émotions, c’est la première fois de ma vie que je verse des larmes de joie, a confié le héros du jour, qui n’a cette fois pas tremblé face à la pression. Je savais que mon anniversaire tombait pendant ces finales, ce qui n’était jamais arrivé jusqu’ici. Je savais comment m’offrir le plus beau des cadeaux. C’était une journée fabuleuse, forte en émotions et difficile en même temps.” Pintu a accompli son exploit sous les yeux de son épouse Romane, qui peinait à cacher son émotion. “Ce résultat vient récompenser un travail de longue haleine, rappelle celle qui est également son attachée de presse. Alexis est quelqu’un de réservé, et on a su construire une équipe qui fonctionne autour de lui.”

Un athlète apprécié par ses pairs

Depuis plusieurs années, la structure Pinturault évolue en parallèle de l’équipe de France, entre Courchevel (FRA) et Altenmarkt (AUT), où le skieur passe le plus clair de son temps en hiver notamment. Très apprécié, ayant toujours un mot sympathique pour les autres malgré son esprit de gagnant, Pintu a largement été félicité par ses pairs ce samedi, et même par Marco Odermatt, qui a admis la supériorité de son rival. Au cours des nombreuses interviews qui ont ont occupé son après-midi, le Français a souvent été “dérangé” pour recevoir une tape amicale de félicitations méritées.

Même s’il n’est désormais plus dans l’équipe de France à proprement parler, l’encadrement tricolore ne pouvait que se réjouir de ce succès. “Je ne dors plus depuis 3 semaines car Marco Odermatt est revenu comme une balle de fusil, a d’ailleurs relevé Fabien Saguez, directeur technique national et donc responsable des Bleus. Alexis est le plus grand skieur français de tous les temps, n’en déplaise à certains. Ce qu’il réalise est fou.” Les superlatifs n’ont cessé de pleuvoir au cours de la journée.

“Le plus beau jour de ma carrière”

“Ça fait de longues années que je me bats pour aller chercher ce gros Globe, a-t-il souligné. C’est le plus beau jour de ma carrière, c’est sensationnel.” De nature discrète, Alexis Pinturault n’a pas hésité à partager ses émotions sur le bas de la piste Silvano Beltrametti. De quoi le rendre encore plus sympathique encore aux yeux du grand public. “Après Kranjska Gora, c’était un moment difficile, je savais que tout se jouerait lors de la finale, qu’il fallait revenir sur l’essentiel, attaquer.” Mission accomplie donc pour l’égérie Red Bull.

Depuis une décennie, le skieur de Courchevel a tout tenté pour atteindre son Graal, qui équivaut pour lui à une médaille d’or olympique: “Je n’ai pas envie de dire que c’est des sacrifices, parce que c’est des choix que j’ai fait pour ma carrière. Mais ça demande de prendre un certain nombre de décisions, de passer beaucoup de temps à l’entraînement, de boire moins de bière, de passer moins de soirée dehors, de faire moins de restaurants, mais c’est aussi une vie très riche, forte en émotions. Difficile par moment, mais très belle quand ça paie”.

Avec 70 podiums dont 34 victoires en Coupe du monde, Pintu a déjà un palmarès digne des plus grands. “Je peux être fier de ce que j’ai réalisé, ose le Savoyard. On peut toujours améliorer quelque chose et d’ailleurs cela sera un objectif. Mais c’est un soulagement d’avoir rempli l’objectif du gros Globe. Je pourrais peut-être me concentrer sur autre chose désormais, j’aurai peut-être moins peur de faire des choix, en prévision des grands événements par exemple.

Laurent Morel, Lenzerheide