Mikaela Shiffrin s’est remise physiquement de sa grosse blessure à Killington mais se bat encore mentalement pour revenir au top de sa forme. L’idée de participer aux Mondiaux était « terrifiante », a confié l’Américaine, qui a décroché l’or en combiné avec Breezy Johnson mardi à Saalbach.
La décision de Mikaela Shiffrin de concourir dans le premier combiné par équipe de l’histoire était bien inspirée. L’Américaine lance ces Championnats du monde avec une 8e médaille d’or. Mais les séquelles de sa blessure en novembre à Killington étaient visibles mardi. Alors qu’elle a livré la troisième meilleure manche du slalom dans sa deuxième course de retour, ce n’était pas le genre de démonstration à laquelle on était habitués de la part de la GOAT (« greatest of all time » = meilleure de tous les temps). Surtout, l’expression sur son visage en franchissant la ligne d’arrivée reflétait l’épuisement, l’incertitude, l’appréhension presque.
« Ça me fait peur »
En annonçant lundi qu’elle prendrait le départ du combiné mais pas celui du géant à Saalbach, la championne avait fait état de difficultés mentales après sa grosse chute au Vermont qui lui empêchaient encore de se lancer à fond dans sa discipline préférée. Parlant aux journalistes après la course mardi, elle était rieuse mais on sentait une plus grande réserve que d’habitude chez la championne, qui a surtout laissé parler sa coéquipière Breezy Johnson. « Ces deux dernières semaines, je n’avais pas envie d’être ici, ça me paraissait absolument terrifiant », a-t-elle enfin avoué. Des propos étonnants pour une skieuse qui a battu presque tous les records et qui compte pas moins de 99 victoires en Coupe du monde.
Mikaela Shiffrin va bien physiquement et n’a plus de douleurs liées à sa blessure à l’abdomen. Les problèmes sont ailleurs. « Tu penses que la récupération va être facile et quand tu reviens sur la neige, tu te dis que ça va être cool et que ta passion te fera oublier les difficultés. Mais ce n’est pas aussi facile que ça », a noté la skieuse de 29 ans, qui n’en est pourtant pas à sa première blessure. « Je suis censée plonger dans un virage, sans retenue, et je ne veux pas, je ne veux pas me mettre sur les carres, ça me fait peur. Ça va prendre du temps », a-t-elle expliqué.
Une offre séduisante
C’est la demande de Breezy Johnson, la nouvelle championne du monde en descente et une copine de toujours, qui l’a convaincue de tenter le combiné. « Elle m’a dit : ‘Ce n’est pas pour une médaille, fais-le parce que c’est du fun, fais-le parce que tu aimes le ski.’ Elle m’a vraiment aidée à affronter cette journée », a confié la native de Vail.
Sa coéquipière a aussi critiqué les attentes autour de la championne. « On s’attend toujours à ce qu’elle gagne. Et si elle ne gagne pas, alors il y a clairement quelque chose qui ne va pas. Mais il faut se rappeler que c’est super dur de gagner. Même si tu l’as fait 99 fois, ça ne devient pas plus facile. » D’où son invitation à faire équipe ensemble. « Je ne voulais pas faire comme si c’était garanti de gagner parce que Mikaela était ma coéquipière. J’avais plutôt la pression de skier à sa hauteur et j’ai voulu l’aider à entamer ces Mondiaux avec une médaille d’or, histoire de lui ôter toutes les attentes des autres. »
Les attentes risquent quand même d’être élevées pour la skieuse d’exception lors du slalom féminin, suite à sa prestation de mardi. Difficultés mentales ou pas, Mikaela Shiffrin a prouvé qu’elle n’est jamais loin d’une médaille, surtout une en or.
Sim Sim Wissgott, Saalbach-Hinterglemm