Il y a des personnes avec qui on se fait une joie de parler et Malorie Blanc fait partie de celles-ci. À seulement 20 ans, la Valaisanne sait donner le sourire à l’interlocuteur qui a l’occasion d’échanger avec elle. La skieuse d’Anzère a une maturité innée, tout en donnant l’impression de parvenir à profiter de sa jeunesse et à ne pas vouloir brûler les étapes. Et ce diamant brut du ski suisse, il faut continuer à le polir pour que “Malo” puisse un jour régner sur le Cirque blanc. Car c’est certain, elle en a les capacités.

“Ça pourrait être pire”, entame-t-elle avec le sourire, en parlant de sa forme actuelle. Il faut dire que Malorie Blanc reste sur un podium en Coupe d’Europe, son premier, et s’apprête à disputer les Championnats du monde juniors dès mardi. L’Ayentôte sera l’une des principales candidates aux médailles, aux Portes du Soleil, dans les épreuves de vitesse. “Je sais que si je parviens à montrer mon ski, je peux peut-être monter sur le podium, se réjouit l’athlète qui a fêté ses 20 ans il y a trois semaines. Ce serait mentir de dire que je n’ai pas d’objectif.”

“L’an passé, je n’étais pas prête”

Il faut dire que Malorie Blanc sait à quoi s’attendre puisqu’elle avait déjà participé à ces joutes il y a un an, à Sankt Anton (13e en descente, 14e en super-G). “Je ne m’y attendais pas et je n’étais pas prête, se souvient-elle. D’ailleurs, je ne savais même pas qu’il y avait des Championnats du monde juniors il y a douze mois. Cette fois, c’est différent, j’ai pu me préparer mentalement. Et je ne serai pas perturbée par les blessures qui avaient émaillé les épreuves l’an passé (ndlr: de Julie Deschenaux et Delphine Darbellay), je n’avais pas pu profiter à 100%.”

De plus, les compétitions auront lieu non loin de son domicile à Ayent puisque les épreuves de vitesse sont prévues à Châtel, en France voisine. “Il y aura la famille, se réjouit-elle. Et c’est sur une piste que je connais et je peux donc me situer.” Il y a un an, Malorie Blanc avait disputé les courses de Coupe d’Europe dans la station haut-savoyarde. Et lors des entraînements de descente dimanche et lundi, elle a déjà montré qu’il allait falloir compte avec elle en prenant respectivement la 2e et la 4e place, le tout sans forcer sur le bas…

Le soutien de Noémie Kolly

En France, la Valaisanne disputera également le géant, une discipline qu’elle tient à continuer de pratiquer. “C’est important pour garder de la mobilité dans mon ski, précise-t-elle. Et franchement, une fois qu’on a la technique, le reste suit.” Surtout qu’à l’opposé, la glisse est presque innée pour “Malo”. “C’est vrai que je m’en sors déjà pas mal même si je manque encore d’expérience.” De l’expérience, elle en engrange chaque jour un peu plus sous la houlette notamment de l’entraîneur Ivano Nesa. “J’ai de la chance de pouvoir compter sur un excellent staff, ajoute-t-elle. Et j’ai également pu profiter de l’aide de Noémie Kolly avec qui je parle beaucoup.”

Malorie Blanc est de plus en plus à l’aise en Coupe d’Europe. (Hervé Deprez/Deprez photo)

En difficulté en début de saison, la Fribourgeoise est passée par la Coupe d’Europe, où elle a souvent terminé derrière sa compatriote, avant de retrouver de très belles couleurs ce dimanche à Cortina d’Ampezzo. La preuve que Malorie Blanc n’est pas loin du meilleur niveau mondial. Dans l’antichambre de la Coupe du monde, elle progresse à grands pas. “Pour être honnête, j’espérais monter sur le podium et je sentais que ça allait arriver, raconte-t-elle quelques jours après sa 3e place obtenue en super-G à Orcières Merlette. Pourtant, ce n’est pas dans cette spécialité que j’imaginais y parvenir. Mais c’est une discipline d’instinct et j’aime ça.”

Une pure descendeuse

Pourtant, c’est en descente que la Valaisanne se sent la plus à l’aise. C’est d’ailleurs lors des deux épreuves prévues dans les Hautes-Alpes qu’elle pensait avoir sa chance de briguer un podium. “J’avais pris beaucoup de plaisir lors des entraînements mais j’ai quelque peu manqué mes courses à cause de petites erreur, rappelle Malorie Blanc, respectivement 9e et 7e dans la discipline reine. Je n’arrive pas encore à être stratégique et à passer ce petit cap supplémentaire en course. J’ai été quelque peu frustrée mais c’est de l’expérience qui rentre.”

Car la descente, c’est vraiment la tasse de thé de l’actuelle 6e des classements de Coupe d’Europe de descente et de super-G. “J’aime bien quand il y a beaucoup de vitesse mais en descente, il y a une grosse part de mental que je dois encore bosser”, avoue-t-elle à seulement 20 ans. “J’ai le temps, je dois encore engranger des kilomètres.” Des kilomètres qui devraient prochainement mener Malorie Blanc en Coupe du monde. Sa non-sélection pour Zauchensee avait même été une petite surprise.

Malorie Blanc est un talent attendu depuis plusieurs années. (Hervé Deprez)

“C’est quelque chose qu’on a évoqué durant l’été mais ce n’était pas forcément au goût du jour pour moi, explique-t-elle. Mes entraîneurs sont hyper bienveillants avec moi et ils m’ont rappelé que c’était un objectif à long terme.” Pas de frustration donc pour la Valaisanne jusqu’à maintenant. “Je regarde un peu au jour le jour, sinon ça fait un peu peur, lâche-t-elle. Mais je me rends compte que ce n’est pas si loin. Il ne faudra pas être surprise si tout à coup il y a une possibilité.” Celle-ci devrait se présenter rapidement, étant donné la vague de blessures qui touche actuellement l’équipe de Suisse féminine de vitesse (Corinne Suter, Joana Hählen et dans une moindre mesure Michelle Gisin).

En Coupe du monde à Crans-Montana?

Il y a fort à parier que Malorie Blanc fera partie du contingent helvétique pour les épreuves de Coupe du monde de Crans-Montana du 16 au 18 février, la semaine suivant les courses de Coupe d’Europe sur le Haut-Plateau. “J’espère que si ça arrive, je ne vais pas changer ni me prendre la tête, dit encore la skieuse d’Anzère. Car moi, je regarde vraiment à long terme, c’est ma vision. Mieux vaut durer qu’en faire une seule et se griller. Il faut trouver le juste milieu. Quand ça arrivera, ça arrivera.” Surtout que la championne de 20 ans n’est pas fan de l’idée de devoir passer par des qualifications internes lors des entraînements. “C’est un côté qui ne plaît pas trop.”

Marius Robyr serait ravi d’accueillir Malorie Blanc pour les courses de Coupe du monde de Crans-Montana. (LMO/SkiActu)

Et si l’occasion ne se présente pas d’ici la fin de la saison, Malorie Blanc pourra toujours espérer se qualifier via un top 3 dans un classement de saison en Coupe d’Europe. “Ce serait la voie royale, avoue-t-elle encore. C’est vraiment le rêve et je sens qu’il y a quelque chose à faire d’ici trois ans. Mais bon, j’essaie de dédramatiser. Le ski est déjà assez compliqué comme ça.” Car oui, s’il y a une chose que Malorie Blanc ne veut surtout pas faire, c’est se prendre la tête.

Alors elle va déjà s’élancer avec ses ambitions pour la descente des Championnats du monde ce mardi, puis pour le super-G mercredi avant de soutenir sa coéquipière en soirée pour le combiné par équipes. Il pourrait d’ailleurs s’agir de la Valaisanne Annie Farquet. “Ce serait cool de faire une équipe 100% valaisanne”, conclut-elle.

Laurent Morel