Et si c’était enfin l’année de Marc Rochat en Coupe du monde? A 29 ans, Marc Rochat a lancé sa septième saison au sein de l’élite avec la volonté de franchir ce dernier palier. Aussi performant sur la Coupe d’Europe où il a terminé 4e et 3e les deux derniers hivers, le skieur vaudois de Crans-Montana a toujours peiné à s’affranchir du cap sur le Cirque blanc. Régulièrement classé la saison dernière dans les points, Marc Rochat sait qu’il a le potentiel pour viser le haut du tableau. Et avant un mois de janvier qui regroupera cinq slaloms, il se veut ambitieux.

Marc Rochat, comment analysez-vous vos deux premiers slaloms de la saison en Coupe du monde où vous n’êtes pas parvenu à marquer des points?

C’est un départ mitigé. A Val d’Isère, je ne me suis pas adapté aux conditions de course et je ne suis pas parvenu à faire la course que je souhaitais (ndlr: il a été éliminé en première manche). Ensuite à Madonna di Campiglio, je manque la qualification (31e) pour deux centièmes. Mais je me suis bloqué le dos une heure avant la compétition et pour être franc, je ne pense pas que j’aurais pris le départ de la seconde manche. Toutefois, la saison débute réellement à Zagreb avec les slaloms qui vont s’enchaîner.

Votre dos vous gène-t-il toujours?

J’ai connu des problèmes avec durant tout l’été. Depuis novembre, cela allait mieux mais je me suis cassé deux côtes à l’entraînement. Reste que je me sens en bonne forme maintenant et que je suis confiant pour la suite.

D’autant plus qu’il est important pour vous de confirmer les progrès entrevus l’hiver dernier.

J’aimerais désormais réellement passer l’épaule en Coupe du monde. J’ai terminé 30e du classement du slalom la saison passée et c’était un gros pas en avant par rapport aux précédentes qui étaient bien compliquées. Cet hiver, j’ai une place fixe et je n’ai donc rien à perdre. Je skiais bien l’an passé, j’étais constant, mais je ne suis jamais parvenu à mettre de la folie en deuxième manche. C’est cela que je dois entreprendre maintenant pour aller chercher un gros résultat.

Nous avons l’impression effectivement que vous être moins tête brûlée?

Oui, car j’ai toujours cherché à brûler les étapes. Surtout en Coupe du monde. J’attendais beaucoup de moi-même, comme tout athlète d’élite. Mais l’hiver dernier, j’ai changé de stratégie. J’ai choisi de construire, chose que j’ai faite. Et cette année, j’entends prendre du plaisir et de m’amuser pour aller chercher les premiers rangs en Coupe du monde.

Comment êtes-vous parvenu à changer?

On m’a toujours critiqué de trop en faire, de trop pousser. Mon but a alors été d’être constant, de marquer des points. J’y suis parvenu sans jouer avec la limite. Je dois poursuivre sur cette voie, mais j’aimerais y rajouter un peu ma sauce, c’est-à-dire de mettre un peu de folie dans mon ski.

Avec la perspective de pouvoir réaliser de gros résultats…

Bien sûr, mais je n’ai pas d’objectif concret en terme de position, car cela dépend également des autres athlètes. D’autant plus avec cinq courses en trois semaines, ça sera très intense. Mais le premier objectif sera de ne pas attraper le Covid-19, le second sera de m’amuser. Durant ma carrière, chaque fois que je me suis amusé, les résultats ont suivi. Franchement, je ne veux pas me mettre de pression car au final, on a une telle équipe… Les gars sont tous en forme, même si les premiers résultats étaient en demi-teinte. On peut faire des gros résultats. Et avec la perspective des Jeux en février, si on commence à calculer, à penser à quel classement obtenir, ça ne va pas aller. Ceux qui vont aller à Pékin, iront pour jouer la médaille. Ainsi je préfère me concentrer sur moi-même plutôt que sur les autres.

Vous aviez l’habitude de vous mettre trop de pression par le passé?

Oui. Au départ, on fait du ski pour s’amuser. Puis on arrive dans des structures, avec des entraîneurs, une fédération et un entourage qui ont des attentes. Du coup, on a tendance à oublier pourquoi on fait du ski et on ne pense qu’au chrono. On se retrouve toute l’année avec des chevaux de course. On est là pour se battre, pour botter les fesses de notre coéquipier à l’entraînement et en course. Ainsi, on oublie les fondamentaux de notre activité. Et pour ma part, ce que j’ai toujours adoré dans mon sport, c’est cet amusement que m’apporte le ski.

Est-ce un signe de maturité d’être plus relax?

Peut-être. Je suis devenu plus mature avec les années dans mon approche des courses. Je ne suis plus tout jeune non plus, il y a une vie après le ski et j’en suis conscient. J’ai envie de profiter au maximum de ces années qui me restent au plus haut niveau car je me suis battu toute ma vie pour être là.

L’après-carrière, vous y pensez?

J’entreprends actuellement des études en économie par correspondance. Je le fais surtout pour penser à autre chose que le ski car on au final, on mange, on sort, on s’entraîne, on fait tout pour le ski, nous sommes plongés dans ce petit monde. On a l’impression d’avoir des œillères.

A 29 ans, avez-vous l’impression que le temps commence à compter justement sur les skis?

L’étau se resserre (rires). Les jeunes arrivent derrière et poussent. Je dois défendre ma position. Mais cela ne me dérange pas et tant que je serai meilleur que les jeunes, je resterai là. Le jour où je ne le serai plus, je laisserai ma place. Si je ne pensais pas être capable de me retrouver sur un podium de Coupe du monde, je ne serais plus là. C’est certain. Je suis pas ici pour faire du tourisme alpin, mais pour essayer de gagner des Coupe du monde. Mais tout en essayant de m’amuser, de profiter. C’est une chance de pouvoir se battre contre les meilleurs de la planète dans une discipline et cela me motive.

Johan Tachet, Zagreb