À quelques minutes du départ du slalom féminin de Levi ce samedi, Reto Mächler est à côté de sa soeur Janine. La skieuse de 19 ans est au pied de la télécabine qui doit la mener au sommet de la Black, la célèbre piste de Coupe du monde lapone. Alors qu’il s’apprête à faire ses grands débuts en Coupe du monde dimanche, l’athlète de 23 ans n’oublie pas son rôle de mentor qu’il exerce depuis toujours ou presque sur sa petite soeur. Sous le regard bienveillant des parents qui ont évidemment fait le déplacement en Finlande, le clan zurichois à le sourire. Un sourire qui sera à peine terni par la 53e de la benjamine quelques minutes plus tard.

« Nous avons toujours rêvé d’être ensemble au départ, ce n’est pas souvent que les dames et les messieurs disputent une course au même endroit, alors c’est très cool et on se réjouit tous les deux », glissaient-ils en coeur et avec un regard complice, depuis l’hôtel de l’équipe vendredi. Cet été, les deux skieurs de Hausen am Albis avaient déjà pu partager du temps en Nouvelle-Zélande, où leur équipe respective était en camp. Ils ont d’ailleurs tous deux signé une victoire à une journée d’intervalle en Coupe d’Australie et de Nouvelle-Zélande. « On n’est pas souvent sur les mêmes courses et ça me motive un peu plus quand je le vois être rapide, je veux faire la même chose », confirme Janine, qui s’était imposé le lendemain de la victoire de son grand frère.

« On se connaît mieux que quiconque »

Les trois ans qui les séparent n’ont jamais été un obstacle à leur entente quasiment parfaite. « Plus jeunes, on s’est toujours entraînés ensemble dans notre skiclub mais aujourd’hui c’est un peu différent », explique Reto, qui a également pratiqué le football et le hockey sur glace. « On se voit encore, on a des échanges, mais plus autant qu’avant. » C’est majoritairement au téléphone que la fratrie passe du temps désormais pour discuter. « On parle souvent », confirme Reto. « Un peu de tout », ajoute Janine, qui était aussi passionnée d’équitation dans son plus jeune âge. « Parfois, on parle de ski, si je viens de faire une course, par exemple. Et ça m’aide aussi mentalement, il me donne des conseils, parce que c’est tout de même le grand frère, il a plus d’expérience. Et vice-versa aussi. »

Et l’aîné d’ajouter: « On n’a pas beaucoup en commun côté technique de ski, mais on parle aussi de la vie privée. On essaie de ne pas trop parler de ski si possible, parce que ça fait du bien parfois aussi de discuter d’autre chose. Mais quand ça ne va pas, j’aime l’appeler parce qu’elle sait comment c’est quand on a des problèmes, et c’est agréable d’avoir quelqu’un (ndlr: pour en parler). Il n’y a des choses que je ne peux pas évoquer avec mes amis mais qu’avec ma soeur. » Janine confirme, encore: « On se connaît mieux que quiconque entre frère et sœur. Mes amis ne me connaissent pas aussi bien. Et si j’analyse trop après une course, il sait exactement où était le problème, c’est dingue, il sait presque mieux que moi ce qui ne va pas. »

Une fierté partagée

Même si elle compte déjà cinq départs parmi l’élite, Janine se voit toujours dans le rôle de la « petite ». « Il est le grand frère. Pour moi, il a toujours été le meilleur, et c’est cool d’avoir un tel exemple. » Déjà double médaillée aux Championnats du monde juniors, Janine attire plus vite la lumière que son frère. De quoi rendre jaloux Reto, qui a pris plus de temps pour percer au plus haut niveau? « Non, pas du tout! Je suis vraiment fier, en la voyant réussir. D’ailleurs, je me suis dit que ce serait cool d’être tous les deux ici à Levi. Ce n’est pas commun d’avoir quelqu’un dans la famille qui est en Coupe du monde et qu’on puisse être ici tous les deux, ça donne encore plus de plaisir. »

Un plaisir que les deux Zurichois espèrent prolonger au cours de l’hiver. Tous deux skient bien et espèrent disputer un maximum de courses de Coupe du monde cet hiver, même s’ils sont conscients que leur pain quotidien se composera surtout de Coupe d’Europe. Et il faudra peut-être patienter avant de pouvoir à nouveau partager une étape sur le circuit, pour profiter de s’éclater ensemble, malgré les disputes inhérentes à leur statut de frère et soeur. « On s’entend très bien… en général », rigolent-ils en coeur.

Laurent Morel, Levi/SSW