Le mot “plaisir” n’est habituellement pas associé à la Streif, une vraie patinoire avec une inclinaison de 85% par endroits, où les skieurs atteignent des vitesses de 140 km/h. Mais pour Arnaud Boisset, de sacrés bons nerfs et une sagesse au-delà de son jeune âge, c’était franchement le cas. “J’étais content de passer la ligne vivant. Parce que c’est quand même long, c’est deux minutes de haute intensité et c’était vraiment à fond de haut en bas,” a confié le Valaisan de 24 ans après s’être essayé sur la légendaire piste de Kitzbühel. “Depuis tout petit, je rêve de dévaler ici. Du coup, je me suis dit fais toi plaisir, joue, prends des risques, parce qu’il faut en prendre pour jouer tout devant. Et franchement, j’ai eu beaucoup de plaisir!”

Les leçons de Kitzbühel

Le Martignerain, qui a réussi les 56e et 54e temps des entraînements, n’a pas réussi à se qualifier pour les fameuses courses du Hahnenkamm après avoir terminé derrière les autres Suisses en ballotage dans la station autrichienne. Mais son assurance et sa détermination prouvent que, le moment venu, il sera à même d’affronter les conditions les plus difficiles et les adversaires les plus redoutables. La Streif a fait naître beaucoup de champions mais aussi brisé bien des corps. Pas de quoi impressionner le Valaisan pour autant: “J’ai du respect, mais au départ, c’est moi qui décide. Et c’est moi qui dompte la piste, ce n’est pas la piste qui me dompte. Sinon, je pense qu’il n’y a aucune chance de faire ce qu’on veut faire”, lance-t-il.

Pour un skieur aligné principalement en Coupe d’Europe, Kitzbühel n’est pas du gâteau, même à l’entraînement. “C’est un gros challenge,” admet-il. Au niveau physique surtout. Alors que les courses de Coupe d’Europe ne durent souvent pas plus de 1’20”, la Streif demande deux minutes de concentration intense, les dents serrées, et ne permet pas la moindre erreur. Il faut aussi savoir skier de facon plus tactique: “Il y a des fois où il faut prendre un petit peu son temps dans certaines parties avant d’engager à nouveau dans d’autres.” Ne pas juste foncer à 200% tout le long du parcours donc, comme il est possible de le faire en Coupe d’Europe. En tout cas pas si on veut arriver en bas en un morceau.

Mais ce sont des expériences qu’il peut retenir et appliquer lors d’autres courses. “Si on a skié la Streif et qu’après on va en Coupe d’Europe, sur des pistes plus faciles, forcément quand on a fait des sauts de 60 mètres et on arrive sur un saut de 30 mètres, on se rend compte que ce n’est plus grand chose et on acquiert beaucoup de confiance dans la tête”, note Arnaud Boisset.

“Je me rapproche de la Coupe du monde”

Une confiance qui est cruciale et qui pourrait être le dernier élément qui lui manque pour faire le saut en Coupe du monde. En plus de Kitzbühel, le Valaisan a déjà fait plusieurs entraînements parmi l’élite à Wengen, Lake Louise ou Saalbach, mais ça n’a pas encore été suffisant pour une qualification interne. “Je pense que le plus important se passe dans la tête, c’est de la confiance,” explique-t-il. “On le voit avec Alexis (Monney) cette année, ça fonctionne super bien.” Même quand le Fribourgeois ne cherche pas la qualification, “il skie quand même très vite. Il est dans le flow et je pense que c’est cette confiance là qu’il faut avoir dans la tête.”

La question de son premier départ en Coupe du monde ne tourmente toutefois pas le spécialiste de vitesse, qui a terminé à une très bonne 6e place d’un super-G de Coupe d’Europe à Wengen il y a deux semaines. “Même si je suis encore relativement jeune, j’ai quand même appris, je fais moins une fixation sur ce premier départ et je fais les choses que j’ai à faire. Si ça se passe bien en Coupe d’Europe, j’aurai ma chance en Coupe du monde. Si je fais des bons entraînements, je peux faire mon premier départ. Aujourd’hui, on voit que je skie bien, je skie à fond. Je ne prends pas encore la qualif’, mais je pense que je m’en approche de plus en plus. Si ça arrive, ça sera super. Si ça n’arrive pas, j’ai déjà fait mon petit bout de chemin.”

Sim Sim Wissgott, de retour de Kitzbühel