« J’ai la conviction de pouvoir jouer avec les meilleurs. » Steven Amiez n’est pas passé loin du premier exploit de sa jeune carrière en Laponie. Sous les yeux du Père Noël et de sa famille, le skieur de Courchevel a pris la 6e place du slalom de Levi, ce qui coincïde avec son meilleur résultat en carrière. Il a notamment impressionné en réalisant le troisième temps de la première manche, dans le sillage de son leader et ami Clément Noël. « Je voulais faire bien mieux, je voulais goûter au podium », avoue-t-il, presque déçu.

Ce n’est qu’une question de temps. Car l’ambition grandissante de l’athlète de 26 ans va de pair avec ses progrès tant techniques que mentaux. « Steven monte en puissance depuis plus d’une année. Aujourd’hui, il est solide, engagé et surtout plus mature avec l’expérience nécessaire. » Les propos émanent de son papa Sébastien. Il est vrai que Steven a de qui tenir, fils de celui que l’on surnomme « Bastoune » et de Béatrice Filliol, tous deux présents en Finlande. Les parents Amiez cumulent 12 podiums réunis en Coupe du monde de slalom, auxquels s’ajoute surtout un titre de vice-champion olympique à Salt Lake City en 2002 pour papa. La pomme n’est pas tombée loin de l’arbre, ou plutôt le flocon n’est pas tombé loin du sapin.
Un genou en morceaux à 13 ans
Logiquement, Steven Amiez s’est mis à imiter ses deux modèles, lattes aux pieds dès le moment où il a appris à marcher. Si Sébastien était souvent en voyage sur le Cirque blanc, c’est Béatrice qui s’est occupée d’apprendre à skier à Steven. Dans la neige, avec sa petite soeur Stella, il s’amusait, s’épanouissant sans jamais être exagérément poussé. « Mes parents ont très bien su me transmettre leur passion. Si je fais du ski aujourd’hui, c’est que j’adore cela », mentionne Steven, qui a grandi « en contemplant les trophées et écoutant les belles histoires », de ses parents.

Le skieur tricolore, qui a fait ses armes sur les hauteurs de Pralognan-la-Vanoise, aurait très bien pu ranger précocement son matériel. Il n’avait que 13 ans lorsqu’il a été victime d’une grave blessure à un genou. À cet âge-là, au début de l’adolescence, il est souvent difficile de récupérer d’une telle blessure. D’ailleurs, Steven Amiez n’a pu skier pendant deux hivers successifs. De retour sur les lattes, il a également dû gérer un changement de règlement sur la taille des skis. « Il n’était pas très grand », se rappelle ‘Bastoune’. « En première année FIS, tu viens de te péter le croisé, et tu te retrouves avec skis de 165 cm en slalom et 190 cm en géant. C’est tout un processus à apprivoiser. »
De la frustration au déclic
Après sa blessure, Steven Amiez a avancé pas à pas, sans forcer le temps, ni son talent, intégrant la fédération française de ski sur le tard. S’il a fêté à 21 ans sa première apparition en Coupe du monde à Kitzbühel en janvier 2020, il a dû se montrer patient avant d’exploser. Sur la Coupe d’Europe, il a cartonné dès la saison 2021-2022, tout en peinant à faire son trou parmi l’élite, entre éliminations et non-qualifications. « Il était peut-être un peu trop feu follet et partait la tête dans le sac », analyse sa maman Béatrice.

Le déclic est enfin arrivé au passage de la nouvelle année 2024. Sur les sept slaloms qui on suivi, il n’a plus quitté le top 11, si ce n’est une 18e place à Schladming. Après avoir marqué une seule fois des points lors de ses 18 premiers slaloms de Coupe du monde, Steven Amiez se révèle désormais au plus haut niveau. « On avait l’impression qu’il vivait avec une petite épée de Damoclès au-dessus de la tête car il n’est jamais évident de se faire sa place. Mais une fois que c’est parti, il s’est complètement relâché », reprend son papa Sébastien.
Dans le sillage de Clément Noël
« Steven a mis du temps à exploser », poursuit ‘Bastoune’. Il n’est pas en avance, mais pas en retard non plus. Il a bien rattrapé le wagon. » Et avec la manière puisque le skieur de 26 ans est aujourd’hui installé dans le top 15 mondial du virage serré. Sur la place publique, Steven Amiez s’attire même les louanges de nombreux spécialistes. « C’est certainement le skieur qui m’a fait la plus grande impression durant l’été », nous a confié Didier Plaschy avant le slalom de Levi. Les observations du consultant valaisan de la SRF se sont confirmées en course. « On le voit venir depuis longtemps. Il est très stable, très posé. Il n’est pas très grand, il a un centre de masse qui n’est pas très bas. Ce n’est pas une surprise, c’est un très bon skieur », confirme Marc Rochat.
Il faut dire qu’à l’entraînement, le skieur de Courchevel ne se prive pas de battre Clément Noël, son coéquipier qui a survolé le premier slalom de l’hiver. « J’ai de la chance de pouvoir travailler avec Clément », souffle Steven Amiez, admiratif du champion olympique qu’il côtoie au quotidien. « C’est un excellent leader, un grand champion avec une belle mentalité. Il ne cache pas grand-chose et il partage volontiers pour que l’on progresse en groupe. »

Dans l’ombre du maître, Steven Amiez attend impatiemment son heure pour passer dans la lumière, pleinement conscient de son potentiel. « J’en ai encore sous le pied. Il y a encore deux ou trois petites choses à régler, mais je sais que je peux aller jouer tout devant. » Vingt-trois ans après son papa Sébastien, un nouvel Amiez est prêt à monter sur un podium de Coupe du monde et à se faire un prénom. « Même si là, ils sont au bas de la piste et plus dessus, je suis fier de pouvoir partager ces moments avec mes parents. » L’héritage Amiez est entre de bonnes mains.
Johan Tachet/LMO, de retour de Levi