Une vingtaine de curieux se trouvaient mercredi en bas de la Birds of Prey. Alors non, le premier entraînement de la descente de Beaver Creek ne les intéressait pas vraiment, et encore moins de savoir comment ces dames allaient skier sur une piste exigeante qui est à l’accoutumée réservée aux messieurs. Leur intérêt était d’apercevoir Lindsey Vonn en personne et peut-être d’arracher une photo avec la championne qui a annoncé son retour aux affaires, près de six ans après avoir rangé ses skis. Du moins le pensait-on.

Mais la skieuse aux 82 victoires en Coupe du monde, aujourd’hui quadragénaire, était bien dans le portillon de départ. Non pas encore en tant qu’athlète, cela ne saurait tarder, mais en tant qu’ouvreuse de luxe. L’Américaine poursuit son plan qui doit, normalement, la conduire en Coupe du monde, et plus précisément sur la piste Corviglia de Saint-Moritz la semaine prochaine pour deux super-G. Interview.

Lindsey Vonn, comment avez-vous vécu ce retour sur une piste de Coupe du monde?

C’était comme si tout était normal. Pouvoir skier une telle manche après autant de temps sans compétition, c’était étrange mais aussi très stimulant. J’ai réalisé quelques bons virages, mais parfois, je suis restée un peu sur la retenue. Malgré tout, je me suis sentie vraiment bien. Être à la reconnaissance avec les filles, revenir dans le rythme d’une course, tout semblait en place.

C’était également votre première expérience en tant qu’ouvreuse…

J’avais à cœur d’assurer mon rôle. Par exemple, Jackie (ndlr: Jacqueline Wiles) avait le numéro 3 et je voulais être sûre qu’elle ait toutes les informations nécessaires, car la piste était beaucoup plus facile que ce que nous avons pu observer lors de la reconnaissance. Le but était de fournir un rapport précis pour que les filles soient bien préparées. C’est un rôle différent mais gratifiant.

Lindsey Vonn n’a rien perdu de son toucher de neige. (Alexis Boichard/Zoom)

Était-ce étrange de vous retrouver ouvreuse, après votre carrière impressionnante?

Je n’ai pas trouvé cela étrange, mais plutôt naturel, compte tenu des progrès que je réalise. Bien sûr, j’aurais préféré être en compétition ici. Cependant, je prends les choses pas à pas. Cette progression est essentielle pour revenir au meilleur niveau et je ne retiens que des éléments positifs de cette expérience.

Avez-vous une idée de votre chrono? Êtes-vous dans le coup?

Nous allons analyser tout cela en vidéo. Cela dit je suis sur la bonne voie. Je suis mon plan, qui se déroule mieux que ce que j’avais imaginé au départ. Je n’ai skié que neuf jours de descente et dix de super-G ces six dernières années, donc c’est une progression rapide. J’apprécie chaque instant.

Quelles sont d’ailleurs vos attentes pour votre retour à la compétition?

J’ai des attentes élevées, peut-être même plus que n’importe qui. Cependant, je dois apprendre à être patiente, ce qui est un défi pour moi. Je sais pertinemment que je ne vais pas immédiatement remporter une course lorsque je reviendrai en Coupe du monde. À l’entraînement, certains jours, je suis performante, et d’autres, je suis dépassée. Je suis proche d’un retour solide, mais je demande un peu de patience, à moi-même comme au public. Il ne faudra pas tout remettre en question et me rappeler que je n’ai plus de rotule lorsque je ne gagnerai pas une course.

On connaît votre amour pour Cortina d’Ampezzo, là où vous avez remporté 12 succès dans votre carrière. On imagine que participer aux Jeux olympiques en 2026, dans votre station de coeur, est un objectif concret?

Quand j’ai pris ma retraite, j’étais déçue de deux choses: de ne pas être parvenue à remporter 86 succès en Coupe du monde (ndlr: à l’époque, le record de victoires était détenu par Ingemar Stenmark qui a depuis été dépassé par les 99 triomphes de Mikaela Shiffrin) et de ne pas pouvoir skier à Cortina pour les Jeux. Cet endroit est spécial pour moi. J’y ai fait mon premier podium, j’y ai réalisé un record historique de victoires, tout cela est lié. Mais je dois rester concentrée sur le présent. Je construis mon retour étape par étape. On verra où ce chemin va m’amener car personne ne l’a encore emprunté par le passé.

En parlant de présent, serez-vous à Saint-Moritz la semaine prochaine en Coupe du monde?

C’est encore à décider. Nous allons analyser les vidéos des descentes. Physiquement, je me sens bien, mais je reste prudente. Je prendrai une décision dans les prochains jours.

Johan Tachet, Beaver Creek