Difficile d’imaginer écrire ces lignes alors que Noël 2024 pointe le bout de son nez, et pourtant… Lindsey Vonn a pris la 14e place du premier super-G de Saint-Moritz ce samedi, à une seconde exactement de Lara Gut-Behrami, deuxième derrière Conny Hütter. Sous le soleil grison, une semaine après avoir officié comme ouvreuse chez elle à Beaver Creek, l’Américaine a réussi une prestation très solide pour intégrer le top 15 près de six ans après sa dernière course parmi l’élite, le tout alors qu’elle est désormais âgée de 40 ans.

Une journée « parfaite »

« C’était une super journée, vraiment parfaite, j’ai profité de chaque seconde », s’est réjouie la championne de Vail. « J’ai bien skié. Mon objectif était d’être à l’arrivée et de pouvoir construire quelque chose là-dessus. Mission accomplie. Je suis stable, solide sur mes skis. Mon corps a un très bon comportement. Lors de ce super-G, j’étais juste sur les lignes mais j’ai mis un peu trop de direction, je n’ai pas été à fond. » Sa prothèse en titane au genou droit ne l’a en tout cas absolument pas gênée, au contraire. « Le titane va très bien, en tout cas mieux que mon cartilage qui n’existe pas… », a-t-elle d’ailleurs rassuré dans l’aire d’arrivée.

La marge de progression de Lindsey Vonn, partie avec le dossard 31 grâce à sa fameuse « wild card » semble encore très importante. Sur le haut de l’Engiadina, la native du Minnesota a perdu passablement de temps à la glisse, probablement en raison de réglages de matériel encore perfectibles. D’ailleurs, au premier temps intermédiaire, elle avait déjà perdu plus d’une demi-seconde sur les meilleures, occupant l’avant-dernière place (56e sur 57), juste devant la… Kényane Sabrina Simader. Mais en taillant les courbes de manière précise par la suite, la skieuse aux 82 succès sur le Cirque blanc a petit à petit remonté jusqu’à ce fameux 14e rang.

« Aujourd’hui, je n’ai quasiment pas pris de risques, je voulais juste arriver en bas. C’est tout ce dont j’avais besoin », a-t-elle martelé durant de longues minutes en anglais et en allemand devant les nombreux journalistes venus couvrir son retour. « Je suis capable d’aller plus vite, de gagner au moins une demi-seconde et d’être dans le coup. » Il est vrai qu’à plusieurs reprises, on a senti que la « Queen of Speed » se laissait quelques centimètres de marge et ne prenait pas tous les risques. Parfois, elle était également quelque peu relevée. Lorsque les réglages, le ski, le physique et la confiance seront entièrement revenus, les rêves les plus fous sont imaginables pour « LV ».

« Je sais ce dont je suis capable »

« Aujourd’hui, ce n’est que le début. » Cette phrase, Lindsey Vonn l’a répétée encore et encore en zone mixte, tout en assurant ne ressentir aucune autre pression que celle qu’elle se met elle-même. « Ce n’était que la première marche et il faut être patiente. Je sais ce dont je suis capable et tant pis si tout le monde n’est pas d’accord avec moi. » Petite pique à Pirmin Zurbriggen, Sonja Nef et Bernhard Russi, entre autres, qui n’avait pas soutenu son retour et dont elle s’était offusquée sur les réseaux sociaux. « Je fais ce que je veux, ce que je peux. Je ne me suis pas sentie aussi bien depuis très longtemps, probablement depuis ma première blessure à un ligament croisé d’un genou, en 2013. C’est la première fois que je skie sans avoir mal depuis cette période. Je suis un peu plus vieille, mais je suis plus forte que ce que j’étais. »

Ce comeback a tout d’un retour vers le futur, mais pas en DeLorean cette fois. Si toutes ses concurrentes n’ont pas toujours semblé à fond derrière la skieuse la plus titrée derrière sa compatriote Mikaela Shiffrin, Sofia Goggia s’est réjouie du retour de sa « jumelle ». « À cause de toutes les blessures dont on a souffert durant notre carrière, on doit juste être reconnaissantes de pouvoir être sur les skis », a souri l’Italienne, qui a félicité sa concurrente à l’heure de l’interview. « On est les mêmes personnes sauf qu’elle est italienne et que je suis américaine », a répliqué Lindsey Vonn. « Elle est toujours restée la même », a de son côté souligné une autre grande amie et admiratrice Corinne Suter.

Le public en tout cas a choisi son camp, celui des fans du retour de la skieuse américaine, comme en ont témoigné les (très) nombreux enfants à avoir attendu (et obtenu) un autographe de la championne au bas de la piste grisonne. « Leur soutien me donne beaucoup d’énergie. De l’énergie qui doit lui permettre d’atteindre les podiums, un objectif qu’elle ne cache désormais plus. « J’espère que demain je pourrai être un peu meilleure, que je pourrai prendre un petit peu plus de risque. Je sais ce dont je suis capable. Je ne pense pas que la concurrence tremble déjà, mais ça pourrait bientôt être le cas. » The queen is back. « Je suis de retour dans ma famille, la grande famille du ski. »

Laurent Morel, Saint-Moritz