Ils sont plusieurs centaines à dévaler toute l’année durant les pentes poudreuses de la planète en quête de précieux points sur le Freeride World Qualifier (FWQ). Cette compétition, qui regroupe une soixantaine d’événements aux quatre coins du globe, est l’antichambre du Freeride World Tour (FWT), circuit mondial et médiatisé du freeride.
En marge de la Verbier Freeride Week, six riders, aux objectifs divers et aux sensibilités différentes, nous content leur trajectoire, pas toujours rectiligne, sur ce circuit Qualifier des plus relevés, avec en point de mire: intégrer le World Tour.
Deuxième des trois volets avec les deux Romands de Nendaz: Tibor Sesti et Anthony Camoglu.
Tibor Sesti et Anthony Camoglu (Suisse, Nendaz)
Particularité: Ils sont Vaudois et Genevois et ont choisi de s’établir en Valais pour profiter de leur passion.
“Nous sommes des amateurs illuminés”
Dans la poudreuse, Tibor Sesti et Anthony Casmoglu s’éclatent. Les deux trentenaires romands se plaisent à tracer inlassablement leurs courbes sur les pentes raides et immaculées de Nendaz où ils ont élus domicile depuis quelques années. “Dans le coin, il y a un ou deux champions du monde qui trainent et tournent des films. On ride aussi avec des gars d’expérience, qui ont entre 45 et 50 ans, qui tiennent très bien sur leurs jambes et qui ont plein de spots à nous montrer”, savoure le Vaudois Tibor Sesti. “On a de la chance d’être là car on y a choppé un gros niveau.”
Entre le Mont Gond et la Dent de Nendaz, qu’ils connaissent comme leur poche, les deux snowbaordeurs ont fourbi leurs armes pour être considérés aujourd’hui comme de gros poissons sur le Qualifier, pouvant prétendre grimper sur les podiums des compétitions estampillées 4*. Voilà cinq années que les deux hommes roulent leur bosse et leur planche dans l’antichambre de World Tour avec toujours le même plaisir. “Ce circuit représente tellement d’expérience pour la vie de tous les jours, tu passes par tellement d’émotions. Tu peux te sentir invincible avant une compétition, puis te ramasser complètement”, poursuit Tibor Sesti, 15e du Qualifier l’année dernière. “Il y a trois ans je pensais arrêter, j’en avais plein le cul. Mais j’ai continué en mode relâché et depuis là j’ai de meilleurs résultats.”
Riders autodidactes, ils se financent seuls
S’ils font partie des meilleurs riders du Qualifier, Tibor Sesti et Anthony Camoglu n’ont plus d’attentes concernant le World Tour. “Ce serait un cadeau d’y parvenir. Mais lorsque l’on voit que seul le meilleur Européen du Qualifier gagne sa place, c’est cruel. Même si c’est proportionnel aux nombre de pratiquants, on a envie de leur dire: mais prenez au moins deux gars”, lance Anthony Camoglu qui se considère comme un “amateur illuminé”. “Nous sommes totalement autodidactes. Certains jeunes ont été pris en coaching, alors que de notre côté, sans véritable structure, nous sommes arrivés à faire de belle chose”, continue le Genevois de Nendaz, 16e du Qualifier 2018, et qui, comme son compère Tibor, ne peut vivre à l’année de sa passion.
Dans l’ombre du World Tour, il n’est jamais évident de décrocher des contrats de sponsoring. “On avait quinté il y a deux ans sur le Qualifier, car c’est difficile d’attirer les marques. Souvent, elles ne savent pas ce que représente ce circuit”, explique Tibor Sesti qui reçoit tout de même du soutien de l’une ou l’autre entreprise du milieu du snowboard. “Je reçois ainsi du matériel. De plus, je fais des économies car j’ai la chance de ne pas avoir à payer de loyer”, poursuit le Vaudois qui s’occupe de la maison familiale pendant que ses parents voyagent en catamaran.
Car sur le Qualifier, chaque rider paie ses déplacements, son logement et ses frais d’inscription de sa poche. Une saison coûte en moyenne 6000 francs, un montant qui peut doubler si le skieur possède la volonté de participer à des compétitions au Japon ou en Nouvelle-Zélande. Si Tibor Sesti travaille tout l’été pour être plus tranquille l’hiver, Anthony Camoglu partage sa saison hivernale entre taff et poudreuse. “Je ne peux faire autrement car je paie tous mes frais et je n’ai pas fait de démarche auprès de sponsors. J’ai de la peine à les faire”, car, rappelle-t-il, il reste “un amateur illuminé”.
Johan Tachet, Bruson/Verbier