Cela fait plusieurs saisons – quatre depuis qu’il a pu disputer ses premiers entraînements de descente sur le Cirque blanc à Garmisch-Partenkirchen -, qu’Arnaud Boisset attendait d’avoir sa chance en Coupe du monde. Ce rêve deviendra réalité l’hiver prochain, puisque le Martignerain s’est offert une place fixe en super-G avec la manière en remportant le classement de la spécialité sur le circuit continental. “C’est quelque chose qui va me rester à vie et que je peux mettre sur le CV”, sourit le Valaisan. “Je suis le skieur le plus constant de l’hiver en super-G en Coupe d’Europe et personne ne pourra me l’enlever.”

Pour mettre un point d’honneur à son incroyable saison, le Valaisan a remporté le dernier super-G de la saison lors des finales de Narvik, à égalité avec Gilles Roulin, alors qu’il avait déjà pratiquement assuré sa place dans le top 3. “Je ne suis pas du genre à juste vouloir me contenter d’être dans les trois premiers. Je voulais remporter le classement de la spécialité.” Arnaud Boisset l’avoue, il a rarement été aussi stressé au départ d’une course que dans la station qui borde un fjord norvégien. “Il fallait tout donner et j’ai eu de la peine à me libérer. Puis, j’ai réussi à faire une grosse fin de parcours. Quand j’ai vu du vert en bas, c’était un soulagement, mais il est vrai que je n’ai pas autant profité de ma victoire car j’étais totalement focalisé sur ce classement du super-G.”

Intoxication alimentaire, humérus cassé et perte de confiance

Au final, Arnaud Boisset termine également 3e du général de la Coupe d’Europe, derrière Josua Mettler et Marco Kohler. Il a enrichi son palmarès de quatre podiums continentaux, dont deux victoires. À 24 ans, le Bas-Valaisan démontre son potentiel, qu’il n’a pas encore terminé d’exploiter. “Je n’ai pas de recette miracle pour expliquer pourquoi tout a aussi bien fonctionné cet hiver, sinon je l’aurais déjà utilisée auparavant”, rigole-t-il. Car il est vrai que, comme beaucoup d’athlètes talentueux avant lui, Arnaud Boisset a trimé, dans l’ombre.

L’hiver dernier, il avait eu la chance de se frotter au groupe Coupe du monde lors de la préparation en amont de la tournée américaine. Mais contrairement à ses amis Yannick Chabloz et Alexis Monney, qui ont alors eu l’occasion de fêter leur baptême dans l’élite, le skieur de Martigny a été freiné dans sa progression. “J’ai connu tout d’abord une intoxication alimentaire, puis je me suis cassé l’humérus en décembre.” Rageant. Arnaud Boisset a mis la flèche à droite mi-février. “J’avais perdu la confiance à la suite de ces blessures.”

Construire son propre chemin

Toujours est-il qu’à l’image des autres skieurs bas-valaisans, l’athlète au casque rose a une tête dure, pour qui le mot abandon ne figure pas dans le dictionnaire. “J’ai été rétrogradé dans un second groupe d’entraînement de Coupe d’Europe, mais j’ai pris ce temps pour me reconstruire.” En compagnie des Christophe Torrent, Marco Kohler et Franjo von Allmen, le skieur de Martigny retrouve ses sensations. “On a eu une incroyable dynamique de groupe cette saison avec de nombreux jeunes. Tout le monde se tirait la bourre, pouvait viser le podium. Ainsi toutes les conditions nécessaires pour performer étaient réunies.”

Avec le recul, Arnaud Boisset explique “avoir grandi” depuis sa “première” à Garmisch-Partenkirchen en 2019. “Il y a un monde qui sépare le Arnaud d’il y a quatre ans et celui d’aujourd’hui. J’ai beaucoup appris, notamment de mes échecs. A l’époque, je m’étais retrouvé à l’entraînement en Coupe du monde après un podium surprise en Coupe d’Europe.” Celui qui fêtera son quart de siècle au mois de mai estime avoir “tous les ingrédients” pour faire le pas en Coupe du monde l’hiver prochain. “Certains sont arrivés en haut plus vite que moi, d’autres plus tardivement. Mais chacun trace son chemin. Si à 28 ans, je peux monter sur le podium en Coupe du monde, je serai très content.”

Arnaud Boisset en ouvreur à la descente de Coupe du monde de Crans-Montana. (Frédéric Dubuis)

Libre, comme Tanguy Nef

Comme son pote slalomeur Tanguy Nef, le Valaisan ne veut pas être classé dans un moule et souhaite suivre sa “propre voie”. “Ce que je fais ne fonctionne pas pour tout le monde. J’estime que l’on ne doit pas rentrer dans des cases pour être performant. Il faut simplement faire preuve d’ouverture d’esprit. Et je sais que c’est lorsque je suis libéré que je m’exprime le mieux.”

Et libéré de tout poids pour la saison à venir après avoir rempli ses objectifs, c’est un Arnaud Boisset relâché qui entend conclure sa saison de la meilleur des manières: avec une médaille nationale en descente ou en super-G cette semaine sur les pistes de Verbier qu’il connaît comme sa poche.

Johan Tachet/LMO, Crans-Montana et Verbier