Aire d’arrivée au pied du Zwölferkogel à Hinterglemm. Il est 14h08 lorsque l’hymne national suisse est joué devant un public fair-play resté en nombre. Tribune « bronze ». Comme un signe. Quelques mètres sous le fanclub du nouveau champion du monde de descente Franjo von Allmen, une quinzaine de Fribourgeois avec un dossard au nom d’Alexis Monney se pressent devant la barrière pour acclamer leur héros, médaillé de bronze de la descente. Les yeux d’Isabelle et de Louis, les parents du prodige, s’embuent.
« C’était terrible, mais absolument magnifique », glisse la maman d’Alexis, extrêmement fière du fiston. « C’est un de nos plus beaux jours », confirme le papa avec son accès typique de la Veveyse tant apprécié. « Notre fille a accouché il y a un peu plus d’un mois, c’était un jour incroyable », rappelle celui qui a entraîné Didier Cuche avant la naissance d’Alexis. « Et puis il y a eu cette victoire à Bormio, Kitzbühel et cette performance aujourd’hui. Une médaille aux Championnats du monde, il faut en profiter! »
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Les parents sont interrompus par un supporter autrichien venu leur offrir des bières, tant les « Rot-Weiss-Rot » respectent ce qu’a réussi leur fils. Depuis leur arrivée jeudi avec les quelques membres du fanclub à avoir fait le déplacement, « le groupe vit bien ». D’ailleurs, toute la fine équipe est resté très soudée au moment de fêter son champion. Alors qu’il avait prévu de quitter Saalbach peu de temps après la descente, tout ce beau monde ne pouvait pas manquer la remise de la médaille et la soirée à la Maison suisse qui s’en est suivi. « On conduira toute la nuit s’il le faut », rigolent les préposés au volant. Outre la médaille de leur protégé, ils ont également été récompensés par les remerciements personnalisés des autres héros de l’équipe que sont Franjo von Allmen, Marco Odermatt, Justin Murisier ou encore Stefan Rogentin, très joyeux tout au long de la journée.
Une relation privilégiée athlète – entraîneur
Toute cette bande, qui est passée chez un drôle de coiffeur après un pari qui a suivi la victoire d’Odi en super-G, peut compter sur le soutien de Valentin Crettaz, nouveau venu au sein du groupe d’entraîneurs cette saison. Le Valaisan était très ému après la descente de ses poulains, lui qui avait déjà suivi Franjo von Allmen et Alexis Monney lorsqu’ils faisaient leurs classes chez les jeunes. « Ça me touche particulièrement car j’ai travaillé avec eux et aujourd’hui on se retrouve ici ensemble », souriait-il le crâne fraîchement rasé. « J’ai le cœur qui a été dans tous les sens à un moment pendant la course. Je suis vraiment trop content pour eux et pour le reste de l’équipe, c’est juste exceptionnel. »
Le Valaisan a notamment noué une relation particulière avec le discret mais déterminé Alexis Monney, qu’il suit depuis près de 10 ans désormais. « On a vécu énormément de choses ensemble, à commencer par son titre de champion du monde juniors », rappelle-t-il. « Je l’ai laissé voler de ses propres ailes et là, je le retrouve, c’est génial. » La boucle est presque bouclée. « Leur lien est très fort », confirme Isabelle Monney, qui apprécie aussi beaucoup la force de caractère de son fils. « Il ne va pas changer, c’est sûr! » Il restera le garçon de Fruence qui devait se faire amener les devoirs car il « était toujours au ski au lieu de venir à l’école », rigole une de ses amies d’enfance.
Jacques Lüthy en supporter attentif
Ce qui change en revanche, c’est le nombre de membres dans le fanclub, en plein développement depuis deux ans. « C’est juste le rêve », rigole le président Pascal Genoud. « On arrive à 1000 membres et ça change toutes les minutes actuellement! » Et tout cela n’est peut-être que le début d’une longue et belle aventure. Une belle aventure que vit à distance le dernier et unique médaillé mondial fribourgeois jusqu’à maintenant Jacques Lüthy. Bien qu’atteint d’une maladie neurodégénérative du cerveau, le médaillé de bronze du slalom de Lake Placid 1980 (les Jeux olympiques comptaient alors comme Championnats du monde) suit avec attention les exploits de son successeur.
« On regarde toutes les courses, on n’en loupe pas une », affirme son épouse Anne, qui confirme que la passion de son mari reste le ski. « Il est très impliqué, très enthousiaste. » Le couple vibre lui aussi et ne peut que se réjouir des exploits d’Alexis Monney, qui ne font que débuter. Le ranz des vaches, chanté dans la soirée par le héros fribourgeois avec ses proches à la Maison suisse, n’a pas fini de retentir.
Laurent Morel, Saalbach-Hinterglemm