L’attribution (quasiment) définitive des Jeux olympiques d’hiver 2030 a ouvert son lot de questions. La délégation des Alpes françaises y a répondu en grande partie lors d’une conférence de presse et en amont ce mercredi dans la foulée de sa victoire à Paris. Avec passablement d’émotions, mais aussi beaucoup de langage politique pour contenter la vingtaine de journalistes présents, dans une atmosphère d’enthousiasme somme toute mesuré.
« On a gagné en équipe. Pour la 4e fois, notre pays accueillera les Jeux olympiques d’hiver, c’est un vrai sentiment de fierté », s’est réjoui David Lappartient, président du comité national olympique et sportif français (CNOSF), avant de rappeler: « Nous avons lancé cette candidature il y a seulement un an, le 19 juillet. Nous avons été choisis, certes sous conditions, mais tout de même cela reste extraordinaire. Merci aux membres du CIO pour leur confiance. »
La garantie financière qui a consacré la candidature se fait attendre
Ces conditions, justement, se basent principalement sur une garantie financière que doit octroyer l’État et une loi olympique, qui permettra de faciliter la mise en place des projets. Les bouleversements politiques des dernières semaines ont empêché les organisateurs d’obtenir à temps cette garantie financière, qui doit être signée par le premier ministre. Il va falloir attendre la nomination de quelqu’un au poste, après les Jeux olympiques, pour s’assurer que le nouveau chef du gouvernement donne son aval avant le 1er octobre. Mais il y a fort à parier que le président français Emmanuel Macron, présent ce mercredi pour soutenir la candidature tricolore, fera en sorte de valider la nomination d’un premier ministre favorable au projet. Pour la loi olympique, il s’agira du même outil qui a été utilisé pour les Jeux olympiques de Paris 2024.
Toujours est-il que la garantie financière promise par la France n’est toujours pas assurée à 100%. Et c’est pourtant cet aspect qui avait permis à la candidature tricolore d’obtenir le soutien du CIO, contrairement à la Suisse et la Suède. Les autres projets étant désormais hors-jeu, il ne faudrait pas que la situation politique chez nos voisins vienne jouer les trouble-fêtes sous peine de mettre le CIO dans un gros embarras.
Du freeride, du ski de vitesse et du cyclo-cross?
« La France a toute notre confiance pour organiser une édition exceptionnelle des Jeux olympiques d’hiver, en faisant preuve de la même créativité, de la même imagination et de la même intuition que celles que nous observons actuellement à Paris 2024 », a toutefois avoué le président du CIO Thomas Bach.
« Les Alpes françaises du Léman à la Méditerranée sont exceptionnelles », a rappelé David Lappartient, qui vante avec son équipe un projet durable et novateur. « N’ayons pas peur d’être imaginatifs », a encore ajouté celui qui est également président de l’UCI. Derrière ses mots, une petite idée pour le moins originale. Outre l’idée de proposer au CIO les sports additionnels que peuvent être le ski-alpinisme, le freeride et le ski de vitesse, le Breton imagine « pourquoi pas » disputer du cross (en course à pied donc) et du cyclo-cross.
Les deux épreuves se partageraient un site unique, pas encore défini. Des contacts ont déjà été noués avec Sebastian Coe, président de World Athletics. « Nous pourrions accueillir un public nombreux pour cette épreuve et ainsi rentrer dans les frais occasionnés », ajoute David Lappartient. « Par ailleurs, cela permettrait à des athlètes de pays pas forcément habitués à participer aux Jeux d’hiver d’être présents. Ce serait bien pour l’universalité olympique. » Restera à faire plier le règlement olympique justement, qui veut que les sports des Jeux d’hiver se pratiquent à tout prix sur neige ou sur glace.
Ambassadrice de la candidature, la championne paralympique Marie Bochet a rappelé que « l’aventure ne fait que commencer ». Même constat pour Martin Fourcade, lui aussi ambassadeur et appelé à tenir un rôle-clé dans l’organisation, notamment de par son rôle de membre de la commission des athlètes du CIO. L’ancienne star du biathlon était d’ailleurs présent à Durban en 2011, lors la candidature d’Annecy avait été recalée. « Là, je suis ravi de voir les Jeux revenir dans mon pays. Je crois en l’Olympisme, en sa manière de rassembler. Mais on est aussi conscients des challenges. Le plus dur ne fait que débuter. On va devoir faire des choix forts. »
Val d’Isère de retour dans la course
À commencer par le choix définitifs des sites, qui va devoir être entériné au cours des prochaines semaines. L’idée reste d’avoir des épreuves réparties sur plusieurs zones. Val d’Isère, boudée sur demande du CIO (afin de regrouper au maximum les épreuves) devrait faire son retour sur la carte des Jeux. « Les Jeux olympiques doivent être à Val d’Isère », a ainsi souligné Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes prêt à assumer les coûts, et initiateur du projet avec son pendant de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur Renaud Muselier.
Si de nombreux sites seront simplement rénovés ou améliorés (piste de bobsleigh de La Plagne, tremplins de Courchevel, etc.) et qu’une patinoire doit être construite à Nice, le seul véritable souci est causé par l’absence d’anneau pour le patinage de vitesse en France. Trois options s’offrent au futur comité d’organisation: une structure provisoire à 30 millions d’euros, similaire à ce que va proposer Milan dans moins de deux ans, un déménagement à Turin, dans une patinoire qu’il faudra remettre en état pour près de 10 millions, ou alors la tenue des courses à Heerenveen (NED). Un choix sera effectué d’ici la fin de l’année
« On veut contribuer à réinventer une modèle de Jeux plus durable », a de son côté précisé la ministre des sports et des Jeux olympiques Amélie Oudéa-Castera. C’est d’ailleurs la première fois que le CIO a accepté d’accorder les Jeux non pas à une ou deux villes mais à une région entière. De bon augure pour la Suisse, avec son projet lui aussi quelque peu « éclaté » pour 2038. « On a d’ailleurs eu très peur pour 2030 lorsque la Suisse s’est présentée », a reconnu Laurent Wauquiez.
Laurent Morel, Paris