Il est 18h50 lorsque Ramon Zenhäusern assied son double mètre sur l’une des barrières qui séparent la zone réservée aux journalistes de celle des athlètes. Sept minutes plus tôt, il terminait sa première manche du slalom nocturne de Schladming à une modeste 34e place, à près de trois secondes du leader allemand Linus Strasser. Indigne de son rang. Le géant de Bürchen a la mine des mauvais jours, comme (trop) souvent depuis le début de la saison. Après avoir ébloui le slalom helvétique de sa classe et de son talent, le skieur de 32 ans vit sa saison la plus cauchemardesque. Malgré son petit déclic à Kitzbühel, sa nouvelle non-qualification ne fait que valider un secret de polichinelle: il ne sera pas à Saalbach pour les Championnats du monde.

C’est la première fois depuis 2015 et alors qu’il avait fait ses débuts en 2013, à Schladming justement, que le Valaisan va manquer un grand rendez-vous. « Ça fait mal, surtout car j’ai toujours pensé que la piste de Saalbach m’aurait bien convenu », regrette-t-il. « Je me réjouissais de pouvoir skier là-bas. » Sa contre-performance dans la nuit de Styrie ce mercredi n’a fait qu’entériner cette non-qualification déjà actée pour beaucoup. Logique, lorsqu’on sait qu’il n’a jamais fait mieux que 20e cette saison et qu’il n’a pas réussi à intégrer le top 30 lors de 6 des 9 slaloms disputés. « Dans mon for intérieur, j’ai essayé de faire tourner la girouette, mais je n’y arrive pas, je suis trop crispé lorsque je skie », reconnaît-il.

L’avenir en questions

Désormais, Ramon Zenhäusern va bénéficier d’un mois pour s’entraîner avant la prochaine course, le slalom de Kranjska Gora le 2 mars. « J’en ai besoin pour revenir en forme, construire ma confiance et au moins finir avec deux bonnes courses en Coupe du monde », répète le vice-champion olympique 2018. « Bien sûr, j’aurais préféré m’entraîner pour les Mondiaux mais au moins, j’ai du temps pour essayer de me remettre et trouver ce qui me manque. Je ne suis pas si loin, je dois simplement assembler quelques pièces du puzzle. Avec un petit peu de confiance en plus, je parviendrai peut-être à lâcher mes skis. » L’homme aux six victoires en Coupe du monde va-t-il continuer à s’entraîner avec le groupe de Matteo Joris? « Honnêtement, je ne sais pas comment ça va se passer. Mon plan durait jusqu’à ce soir. Mais je suis dépendant de l’équipe pour avoir des pistes préparées. Dans notre sport, tu ne peux pas t’entraîner seul. »

À 32 ans et après une carrière bien chargée, celui qui a été le pionnier du renouveau du slalom helvétique sent peut-être la fin s’approcher. Questionné, il soupire avant de répondre. « Il y a quelques années, j’aurais pensé skier jusqu’à 40 ans. Mais on ne sait pas de quoi l’avenir est fait. Tout peut encore arriver. Ça peut tourner dans toutes les directions. Je peux revenir plus fort que jamais, c’est possible. L’avenir, personne ne le connaît. » Physiquement, après avoir connu quelques pépins ces dernières saisons, il affirme pourtant aller bien. « Il faudra voir après la saison mais si mon corps est en bonne santé, je prends quand même du plaisir à skier. Je n’ai pas l’impression que je vais m’arrêter. Après, j’ai besoin de points car si je recule dans la hiérarchie, ça devient encore plus compliqué… » Et comme il le dit si bien, personne ne sait de quoi l’avenir sera fait.

Laurent Morel, Schladming