Croiser Martin Fourcade au restaurant, Fanny Smith sur un vélo, Ester Ledecka au fitness ou encore Noriaki Kasai à la laverie automatique. Ce genre de privilèges n’arrive qu’aux Jeux olympiques et surtout à certains endroits. C’est notamment pour ça que le village olympique s’est construit un mythe depuis de longues années. Sans parler des histoires d’amour nées dans cette enceinte réservée aux équipes nationales. Roger et Mirka Federer ne se sont-ils pas rencontrés sur le site à Sydney en 2000, pour ne parler que des plus connus?

A PyeongChang, il fait certes un peu plus froid entre les immeubles construits pour l’occasion. De plus, les athlètes ont été séparés en deux villages principaux, à savoir le pôle “glace” à Gangneung et le pôle “neige” en montagne. Toutefois, l’ambiance n’en reste pas moins bien particulière. A l’occasion de quelques heures passées dans le Saint des saints, qui n’est plus que rarement ouvert aux journalistes depuis de longues années, SkiActu a pu se faire une idée de la vie au village coréen.

On entre pas dans le village comme dans un moulin

D’abord, l’entrée. La sécurité est devenue un aspect primordial et les athlètes peuvent parfois perdre plusieurs minutes sous la grande tente installée pour l’occasion. On n’est pas dans un aéroport mais à ce niveau-là, c’est tout comme. Des bénévoles guident ensuite athlètes et staff vers leur destination. Les Suisses occupent 12 étages d’un bâtiment, le 105.

Mais juste après le premier écueil, se trouve d’abord l’Olympic Plaza. C’est là que les délégations sont accueillies lors d’une cérémonie officielle. C’est aussi là que toute personne accréditée pour les Jeux olympiques peut entrer. Dans cette petite ville provisoire, la boutique de souvenirs fait un carton. Chaque athlète veut ramener sa petite mascotte en peluche ou son porte-clé aux couleurs de PyeongChang 2018.

De nombreuses coupes… de cheveux

Le coiffeur présent pour l’occasion ne chôme pas non plus. De nombreux athlètes veulent se mettre sur leur 31 avant de défiler en mondovision lors de la cérémonie d’ouverture. “L’un d’entre-eux nous a même demandé une coupe avec les anneaux olympiques, relève le patron des lieux, qui ne dévoile pas le nom de l’athlète. On est très fier d’avoir accueilli autant de monde.” Les messages de remerciements accrochés aux murs prouvent que de nombreux participants ont en effet défilé sur les lieux, avant de défiler dans le stade olympique.

Si l’épicerie et la zone “déguisement traditionnel” fonctionnent bien également, l’immense stand Samsung peine à attirer les chalands. Il faut dire que tous les participants aux Jeux olympiques ont de quoi s’occuper avec le téléphone portable dernier cri de la marque coréenne qui leur a été remis. A noter encore sur le site la présence d’une poste, d’une agence de voyage, d’une banque et d’un fleuriste. Et oui, il faut bien pouvoir trouver de quoi féliciter les gagnants, non? Ou alors est-ce pour conquérir un coeur à prendre?

Une salle à manger fonctionnelle mais sans âme

Au delà de cette zone, plus question de retrouver tous les “accrédités”. Seuls les Olympiens et leur staff peuvent accéder au véritable village, ce hameau sportif. Dès les portiques de vérifications franchis, se trouve un grand dôme. La salle multifonctions déjà existante avant les Jeux a été reconvertie en grand réfectoire pour l’occasion. C’est la salle à manger, le restaurant, autour duquel on retrouve quelques salles pour la prière ou encore la prévention antidopage.

Les athlètes ont le choix entre des mets de tous les continents. Souvent, c’est là que se font les rencontres. “Mais cette fois, je trouve le site pas très chaleureux, ça manque d’identité et de cachet et ça fait très cantine, comme c’était déjà le cas à Sotchi, regrette Pierre Vaultier, champion olympique de snowboardcross il y a 4 ans. Ma référence, c’est Vancouver, en 2010. Il y avait plusieurs petits chalets en bois dans une énorme tente. Chacun avait de la nourriture d’un pays. Et ça, c’est important. Quand je découvre un pays, je le découvre par sa gastronomie et le décor qu’il y a autour. Et en tant que Français, c’est important la nourriture, faut pas déconner, hein!”

Malgré cet avis, les skieuses helvétiques viennent manger au village olympique. Pourtant, elles logent à quelques kilomètres, dans un hôtel de Yongpyong, au pied des pistes. “Manger au village, c’est aussi prendre moins de risque au niveau de la qualité des mets”, souligne-t-on dans leur entourage.

Des appartements confortables

“Au delà de cette zone, je dirais que l’ambiance est similaire à ce que j’ai connu jusqu’à aujourd’hui”, poursuit Pierre Vaultier. Et le Français sait de quoi il parle puisqu’il s’apprête à disputer ses 4es Jeux. Après être passés à côté des différentes zones techniques, les athlètes entrent donc dans “leur” univers. Les différents immeubles qui leur servent de logements sont alignés autour d’une place centrale. D’une quinzaine d’étages, ceux-ci sont composés d’appartements neufs, qui serviront notamment à des étudiants par la suite. Afin de pouvoir vendre ou louer ceux-ci dans leur état original après les Jeux, des plaques de plastique recouvrent notamment la cuisine et les portes.

Mais la plupart des participants apprécient le confort et peuvent profiter de logements dans lesquels leurs bagages ont été acheminés. “On est très bien même si les ascenseurs ne fonctionnent que très mal, confirme Pierre Vaultier. On est sportifs, mais ce n’est pas idéal. Je n’avais jamais autant découvert un village. Le fait d’avoir des grands bâtiments permet que tout le monde soit assez regroupé, c’est pratique.”

L’orignal canadien

Sinon, chaque pays a tenté de décorer au mieux ses étages afin de se donner un petit air du pays. Des immenses drapeaux pendent notamment depuis certaines fenêtres. La palme revient toutefois au Canada qui a déplacé une statue d’orignal à ses couleurs. Rares sont ceux qui ne s’arrêtent pas prendre une photo souvenir devant l’emblème du pays à la feuille d’érable. Le passage devant les anneaux olympiques est également “obligatoire” pour l’ensemble des pensionnaires.

Sous les immeubles se trouvent les différentes salles de sport et de fitness tandis qu’au centre de la petite dizaine d’immeubles, se situe une place avec un espace de recueillement ainsi que diverses tentes destinées à une polyclinique, aux laveries et aux loisirs des résidents. Dans les salles d’amusement, on retrouve notamment des fauteuils de massage, des baby-foot, des billards, des air-hockey ou encore des consoles de jeux. Ces dernières remportent le plus de succès chez les athlètes, qui préfèrent souvent le football aux sports d’hiver devant les écrans.

Texte et photos: Laurent Morel, PyeongChang