Pour la première fois depuis la lourde chute de Cyprien Sarrazin le 27 décembre à Bormio, le médecin de l’équipe de France de ski alpin Stéphane Bulle a donné des nouvelles en visioconférence du skieur tricolore. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela a permis aux quelques dizaines de journalistes présents de se rendre compte de la gravité du choc encaissé par le descendeur et de la longue période de rééducation qui l’attend, avant un éventuel retour sur les skis de compétition.
« Vous connaissez les circonstances », a rappelé le docteur Stéphane Bulle. « Cyprien Sarrazin a subi une lourde chute et a été immédiatement héliporté à l’hôpital de Sondalo. Il souffrait d’un hématome sous-dural aigu qui s’est rapidement aggravé et a entraîné une compression du cerveau. En accord avec les chirurgiens, un trou de trépan a été effectué dans le crâne (ndlr: afin de drainer la blessure). » Le médecin n’a pas fait de sensationnalisme mais a souligné qu’il s’agissait d’une « pathologie relativement sérieuse » qui « nécessitera une période certaine de récupération« .
Un bilan à affiner
Grâce à l’intervention efficace des secours, le pronostic vital de Cyprien Sarrazin n’a pas réellement été engagé. « Les Italiens ont été vraiment bons », a rassuré Stéphane Bulle. « Dans un premier temps, j’ai été en souci qu’il ne soit pas transporté à Milan dans un centre approprié, mais à Sondalo, les soins étaient de très bonne qualité avec une prise en charge et une humanité incroyables. » Vendredi, le rival de Marco Odermatt a été transféré à Lyon, dans le service de soins de neurochirurgie d’une clinique privée, où son bilan va être affiné au cours des prochains jours avant d’entamer sa rééducation.
« Aujourd’hui, ‘Cyp’ va bien et je suis relativement serein quant à un bilan définitif de potentielles lésions », a ajouté le médecin français qui a détaillé les prochains jours du skieur. « On va commencer par lui permettre de faire des choses que tout le monde fait comme s’asseoir au bord d’un lit, manger correctement, se tenir debout. Il a encore du mal à ouvrir les yeux car il souffre d’une diplopie (réflexes des yeux perturbés). » Le double vainqueur de Kitzbühel la saison dernière, qui avait déjà subi une commotion cérébrale après une chute à Garmisch-Partenkirchen en 2018 est toutefois bien conscient de ce qui lui est arrivé et de ce qui l’attend. « Cyprien a eu vraiment conscience hier (vendredi) d’avoir été rapatrié, ça l’a vraiment soulagé. Il est conscient mais est juste ultra fatigué. Il sait très bien ce qu’il lui est arrivé. »
Un très long chemin vers un éventuel retour
Pour la suite, le corps médical espère que l’athlète pourra être transféré à l’hôpital spécialisé Henry Gabrielle, dans la banlieue lyonnaise, afin de poursuivre sa rééducation. « On va vers des périodes longues pour cette récupération. C’est incomparable avec une rupture d’un ligament croisé antérieur d’un genou dont on a l’habitude. Ce sera beaucoup plus long! » La date d’un éventuel retour de Cyprien Sarrazin se fixe en mois, voire en années.
La situation est comparable à celle de Valentin Giraud-Moine, a décrit Stéphane Bulle, qui n’a pas mentionné le terme « retour » en tant que tel. L’ancien descendeur, grand ami et devenu manager de Cyprien Sarrazin, était parvenu à revenir après une grave chute à Garmisch-Partenkirchen mais avait dû se contraindre à arrêter, incapable de retrouver son tout meilleur niveau. « Je ne sais pas encore si Cyprien pourra revenir mais on va tout mettre en place pour que ce soit le cas. Je ne sais pas où ça va nous mener mais c’est notre objectif. »
Avant cela, il va falloir franchir bon nombre d’étapes même s’il est « beaucoup trop tôt » pour définir un échéancier: « Il a encore évidemment des problèmes cognitifs. Aujourd’hui, il est très très fatigué et a du mal à communiquer encore, il lui est logiquement très compliqué d’avoir un flux normal de langage. Dans les semaines à venir, on va essayer de définir les compétences qu’il a déjà et comment lui faire regagner les autres. »
Laurent Morel/SSW