Camille Rast, avec son dossard 57 sur le dos, a ébloui son monde mardi soir lors du slalom de Flachau. La Valaisanne de 21 ans a réussi la meilleure performance de sa carrière en se classant 6e d’une compétition remportée par l’Américaine Mikaela Shiffrin, tenant la dragée haute aux meilleures skieuses de la planète. Sans trembler après avoir arraché sa première qualification dans la discipline en seconde manche en terminant au 14e rang, l’athlète de Vétroz a remis la compresse pour s’installer l’espace de huit concurrentes dans la leader box. Camille Rast a ainsi pu faire (re)découvrir à la planète ski un talent qui ne demande qu’à exploser après avoir connu de nombreux pépins physiques ces dernières saisons et fait son retour en Coupe du monde après près de deux ans d’absence en octobre à Sölden. Réaction.

Camille Rast, après une bonne nuit de sommeil, comment analysez-vous votre magnifique performance lors du slalom de Flachau?

Je pense que je ne réalise pas vraiment. C’est totalement incroyable de pouvoir skier à ce niveau avec un dossard aussi élevé. Déjà de pouvoir entrer dans le top 15 en première manche, puis de grappiller encore des rangs sur la seconde…

Après avoir tourné autour de la qualification, tant en géant qu’en slalom, ces dernières semaines, vous voilà enfin récompensée.

Je savais que j’étais en forme. J’a retrouvé ces derniers jours la confiance que je n’avais pas avant. J’étais plus calme et c’est ce qui m’a permis d’exprimer mon meilleur ski en course.

Justement, que vous manquait-il lors des compétitions précédentes?

De la confiance, de la folie dans mon ski… Je me frustrais également de ne pas parvenir à me qualifier. A Semmering, entre Noël et Nouvel An, je me sentais bien aussi. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire, car il y avait une bonne ambiance autour de moi. Malheureusement, cela ne s’est pas passé comme je l’aurais souhaité. Alors, à l’entraînement, j’ai fait les choses dans mon coin. J’avais mon serviceman avec moi, mon entourage était plus calme, et j’ai pu faire le vide dans ma tête. J’ai aussi travaillé étape par étape au Jaun (FR), en commençant par bosser sur les parties planes et la vitesse. Et c’est ainsi que j’ai pu faire ce pas en avant.

Quelle a été votre réaction lorsque vous arrivez en bas de la première manche avec le 14e chrono provisoire?

C’était un soulagement. Enfin, j’étais parvenue à claquer une manche. Pourtant, j’avais l’impression de ne pas avoir été forcément rapide. Tout du long, je me disais que cela allait être limite pour la qualification parmi les trente car j’avais fait une petite faute en haut et j’avais aussi fait très attention où Michelle (Gisin) avait commis une erreur. C’est la première fois que je skiais sur cette piste donc je n’avais pas de repère.

Comment avez-vos géré l’attente entre les deux manches?

Comme je me suis élancée avec le dossard 57, tout s’est enchaîné rapidement. J’ai grignoté un truc en dix minutes, puis il fallait remonter pour la reconnaissance. J’étais encore toute euphorique et il fallait que je me calme car j’avais les jambes en feu (rires). Finalement, je suis parvenue à me mettre à nouveau dans ma bulle pour réaliser ma routine.

Et claquer à nouveau une grosse performance sur le second parcours pour remonter huit places et terminer 6e. Que se passe-t-il dans votre tête lorsque, assise sur la leader box, vous voyez les filles vous passer derrière?

C’était la première fois que je me retrouvais dans cette situation en Coupe du monde et je n’ai pas compris tout de suite. Tu vois les filles défiler… une, deux, trois et ainsi de suite. Et quand Michelle (Gisin) descend et prend la tête, elle ne s’attendait pas à me voir encore assise là. Elle était aussi contente pour moi. Et franchement, on a réalisé une incroyable performance collective.

D’ailleurs, quel a été le message de Wendy Holdener et Michelle Gisin pour vous après la course?

Elles étaient super heureuses pour moi. Chaque fois que je rentrais de ma première manche, c’est elles qui me consolaient et me disaient que ce n’était pas grave, que je devais m’accrocher, car elles voyaient que je me rapprochais d’elles aux entraînements. Cela démontre le team spirit de notre équipe et grâce à l’expérience de Wendy et Michelle, j’ai réussi à progresser et c’est ce qui m’a permis d’être tirée vers le haut.

Peut-on dire que vous êtes totalement de retour aux affaires?

Oui, on peut le dire (rires). C’est clair que cette performance va m’aider pour la suite. Je fais un énorme pas en avant car j’aurai l’occasion de m’élancer parmi les trente meilleures slalomeuses lors des Championnats du monde. Cela change la vie. J’ai l’impression que c’est le début de ma carrière.

Votre coach physique Florian Lorimier disait récemment que vous étiez bien plus affûtée physiquement qu’avant votre blessure au genou en mars 2019. C’est également votre sentiment?

Totalement, je me sens bien mieux. Je peux encaisser davantage de charges et enchaîner les jours de ski sans problème. Mon genou, je n’y pense que très rarement, si ce n’est lorsque j’ai quelques tensions. Les conditions météorologiques ne sont plus un problème, je dois juste encore retrouver la confiance sur certaines pistes.

Pour ainsi également performer en géant…

Tout à fait, il me manque encore de la confiance quand il y a davantage de vitesse. Après, cela fait un petit moment que l’on avait mis l’accent sur le slalom à l’entraînement et je vais maintenant me concentrer sur le géant avec les deux épreuves de ce week-end à Kranjska Gora. Il est vrai que je suis plus à l’aise actuellement en slalom, mais c’est normal également, car le slalom est ma discipline de prédilection à la base, même si c’est en géant que j’ai percé.

Johan Tachet