Ce n’est que le deuxième jour lors duquel sont distribuées des médailles aux Championnats du monde de freestyle en Engadine, mais on connaît déjà le nom de l’une des stars de ces joutes grisonnes. En survolant la compétition de géant parallèle en snowboard, Ester Ledecká a marqué de son empreinte le rendez-vous, décrochant le titre pour la première fois depuis huit ans, alors qu’elle n’avait plus pris de départ dans la discipline aux Mondiaux depuis ce moment-là, en raison de blessures ou de conflits de calendriers. Mais la double championne olympique 2018 de snowboard et de ski alpin (elle avait remporté le super-G à la surprise générale en Corée du Sud) a donc remis les pendules à l’heure.
« Ça a été une belle saison mais j’ai principalement été sur des skis (ndlr: elle est notamment monté sur le podium de la descente de Sankt Anton et des Championnats du monde de Saalbach). Je n’étais pas certaines d’être capable de montrer mon meilleur niveau ici, je ne savais pas trop à quoi m’attendre », a-t-elle ainsi confié juste après sa course victorieuse. « J’ai fait beaucoup d’erreurs mais malgré tout, j’avais un très bon sentiment. » Un sentiment qui lui a donc offert une 5e médaille mondiale, la troisième en or, tous sports confondus.
« On doit me laisser une chance »
Ce titre amène toutefois son lot de frustration pour la Tchèque de 29 ans. Le 8 février prochain, deux jours après la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Milan-Cortina, sont en effet programmés le même jours le géant parallèle en snowboard et la descente féminine en ski alpin. Une épreuve aura lieu à Livigno, l’autre à Cortina d’Ampezzo, deux sites distants de près de 200 km à vol d’oiseau, et entre lesquels près de 5 heures de route sont nécessaires. Le CIO et le comité d’organisation italien n’ont pas vraiment pris en compte le fait que la Tchèque, véritable star des sports d’hiver, ne pourra ainsi pas défendre ses chances dans deux disciplines dans lesquelles elle a été médaillée mondiale cette saison.
« J’ai prouvé que je pouvais gagner le bronze en ski alpin et l’or en snowboard lors des Championnats du monde. Je crois vraiment que « j’appartiens » à ces deux milieux, à ces deux sports », a-t-elle insisté au micro de SkiActu. « J’espère que ce sera une sorte de signal pour eux que je dois être respectée et qu’on me laisse une chance de concourir dans les deux sports, aussi aux Jeux olympiques. » La native de Prague a d’ailleurs écrit une lettre au CIO pour lui faire part de son mécontentement. « On n’a pas encore reçu de réponse vraiment officielle », a-t-elle ajouté. « J’espère qu’ils pourront encore faire bouger les choses. »
Aussi en planche à voile?
Quoiqu’il en soit, elle participera au super-G sur l’Olimipia delle Tofane, prévu deux jours seulement après l’épreuve de snowboard parallèle, mais n’aura pas eu la chance de prendre ses repères, tant lors des entraînements que lors de la descente olympique de Cortina. « Je ne choisirai pas quoiqu’il arrive », affirme-t-elle. « Il y a deux jours d’écarts et dans tous les cas, ce serait totalement fou. Je ne crois pas avoir fait quelque chose comme ça avant mais je tenterais le coup. Il reste un an avant les Jeux olympiques. J’espère d’ailleurs encore m’améliorer dans les deux sports. J’ai beaucoup de choses sur lesquelles travailler. » Et tenter d’inspirer les générations futures, ce qui a toujours été l’un de ses leitmotivs. « Je pense que c’est une belle histoire pas seulement pour la République tchèque mais pour tout le monde sportif. Motiver les jeunes athlètes, c’est ce à quoi doivent servir les Jeux olympiques. »
Récemment, la rumeur d’une éventuelle participation d’Ester Ledecká aux Jeux olympiques d’été en planche à voile s’est répandue. Elle ne l’exclut pas totalement mais rappelle la difficulté d’un tel projet. « Je n’y crois pas vraiment. Déjà, ma discipline n’est pas au programme olympique pour le moment », précise-t-elle, alors que la classe IQFoil, pas trop éloignée, a fait son apparition aux Jeux en 2024. « Ensuite, il y a de très nombreuses courses en hiver aussi et si je veux me qualifier pour les Jeux, il faudrait que je sois performante en Coupe du monde. Cela serait un programme… très chargé en hiver. » Mais aucun défi n’est vraiment insurmontable pour « STR ».
Laurent Morel, Saint-Moritz