Rien ne va plus pour Marc Rochat et Ramon Zenhäusern. Les deux hommes ont réalisé une nouvelle contre-performance lors du slalom d’Alta Badia. Luca Aerni, lui, se console avec le géant. Tentative d’explication avec les principaux intéressés.

Les semaines se suivent et se ressemblent pour Marc Rochat (39e ce lundi), Ramon Zenhäusern (46e) et Luca Aerni (52e). Les trois hommes, qui ont fait partie de la brillante armada helvétique en slalom ces dernières années, n’y arrivent tout simplement pas cet hiver. Cette saison, seul Ramon Zenhäusern a grignoté les quelques maigres points de la 25e place à Val d’Isère. En dehors de ça, c’est un zéro pointé pour les trois skieurs, pourtant habitués à jouer les premiers rôles ou au moins les places d’honneur. Alors que Loïc Meillard, Tanguy Nef, Daniel Yule et même Matthias Iten tirent leur épingle du jeu, le constat est le même après chaque course, alors que l’épreuve d’Alta Badia était déjà la 4e de la saison dans la discipline.

Marc Rochat: « Casser ce que j’ai construit »

« Ça fait chier », avouait Marc Rochat, dégoûté. « Je skie bien en ce moment et je ne pense pas faire une mauvaise manche. Mais je ne suis pas assez régulier, assez stable et les résultats ne sont pas à la hauteur de mon niveau actuel et c’est d’autant plus frustrant. » Pour le Vaudois, la configuration actuelle des pistes de slalom ne l’avantage pas. « J’ai l’impression que la Coupe du monde est en train de tourner. Longtemps, je ne pouvais pas skier comme en Coupe d’Europe car les tracés et les pistes étaient plus difficiles. J’ai dû adapter mon ski, prendre moins de risques. Et aujourd’hui, on skie sur des autoroutes. La piste du concours du ski club est plus raide que celle-là. Tout le monde y va comme un con et ce n’est plus ce que j’ai envie de faire. » Il est vrai que la Gran Risa n’est pas réputée pour sa difficulté en slalom et que la tracé de la première manche de ce lundi ne comportait guère de piège.

Alors que faut-il à Marc Rochat, qui n’est absolument pas décroché à l’entraînement, pour réussir à montrer son niveau en course? « Je n’arrive pas à développer mon potentiel, il faut peut-être que je fasse plus de vitesse à l’entraînement, sur des tracés plus faciles pour arriver à y être plus relâché. On doit peut-être arrêter de se prendre la tête avec des pistes compliquées. Je dois peut-être réussir à casser ce que j’ai construit ces dernières années pour à nouveau tout risquer de la première à la dernière porte. » Sauf que le problème est plus complexe que cela pour le médaillé de bronze en combiné par équipes des derniers Championnats du monde car les prochains slaloms seront ceux de Madonna di Campiglio, Adelboden, Wengen, Kitzbühel et Schladming… parmi les plus exigeants et difficiles du circuit. « Et là, tu ne peux pas skier comme un kamikaze car si tu le fais, tu ne vois pas l’arrivée. »

Ramon Zenhäusern: « Je vais continuer à croire en moi »

Pour Ramon Zenhäusern, le problème semble mental. Le géant de Bürchen ne parvient pas à reproduire en course ce qu’il propose à l’entraînement. « C’est vraiment dommage car j’aime cette piste et mon niveau a augmenté ces derniers temps », relève le Valaisan. « Aujourd’hui, je voulais être léger mais j’ai de nouveau trop bouclé mes virages. » Alors qu’il a souvent dû rebondir au cours de sa carrière, le vice-champion olympique 2018 semble cette fois dans une impasse. « Je vais continuer à croire en moi, parce que je pense qu’il y aura encore du beau », se défend-il, repoussant l’idée d’une fin de carrière anticipée, alors qu’il est âgé de 33 ans. « Cela serait différent si je n’avançais pas, mais mon ski est bon à l’entraînement. »

La situation de Luca Aerni est un petit peu différente et son image corporelle également. C’est d’ailleurs avec le sourire que le skieur de Crans-Montana cherche des explications à sa nouvelle contre-performance entre les piquets serrés. « Ça ne se voit pas forcément, mais je trouve que je fais des progrès lors de chaque manche, en course comme à l’entraînement. Après, l’écart est grand, mais je pense que ça peut aller très vite. » Heureusement pour lui, le Valaisan est désormais un géantiste accompli et fait partie des 15 meilleurs mondiaux dans la discipline. Et ça change tout! « Ça prouve que je suis sur le bon chemin. Sinon, je serais probablement un petit peu perdu également dans la tête. »

Luca Aerni: « Je ne suis pas dans le catastrophisme »

Avec le sourire, le skieur de 32 ans parvient à tirer du positif, même s’il lui a manqué près d’une seconde pour accrocher une première qualification cette saison en slalom. « Je commence à enchaîner, je suis sur le bon chemin, mais ça prend un peu de temps. Un jour, tout d’un coup, je vais faire un saut. À l’entraînement, je ne suis pas encore tout exactement dans les mêmes temps que les meilleurs, mais j’ai une certaine constance. C’est rassurant. » L’ancien champion du monde de combiné l’assure, il est loin de renoncer au slalom. « Il y a encore des choses à aller chercher, j’y vais par paliers, je ne suis pas dans le catastrophisme. »

L’avantage, c’est que le Valaisan va pouvoir rentrer plus tôt à la maison ce lundi. « Ça va me faire du bien », sourit-il. « Je vais passer Noël en famille et peut-être aller skier à Crans-Montana une journée. Et qu’a-t-il demandé au Père Noël? « Du bon ski de slalom! ». La réponse est quasiment similaire pour Ramon Zenhäusern, qui va évidemment se ressourcer en famille avant de retourner s’entraîner. « Comme cadeau, j’ai demandé des centièmes… Enfin des secondes, c’est ce qui me manque en ce moment… » Le souhait est un peu différent pour Marc Rochat, qui a quelque peu souffert physiquement ces derniers jours. « J’aimerais bien deux nouveaux genoux… » Pas sûr que le bonhomme rouge à la barbe blanche puisse glisser cela dans sa hotte.

Laurent Morel, Alta Badia